L'Etrange Festival : Jour 2
Le vendredi de l'angoisse
En ce deuxième jour de l'Etrange Festival fut projeté, dans le cadre de l'hommage à Martine Beswick, un film rare et méconnu du réalisateur britannique Peter Collinson : La Nuit des Alligators (The Penthouse).
Bruce, un agent immobilier qui aime les évasions extras-conjugales, amène sa maîtresse Barbara à passer une soirée torride dans un luxueux studio. Deux faux employés du gaz, Tom et Dick, vont malheureusement ternir ces amours clandestines en sonnant à la porte. Bruce est ligoté, Barbara enivrée. La folie et la peur s'installent dans la pénombre alors qu'à l'extérieur une journée ensoleillée commence.
En adaptant une pièce de Scott Forbes, Peter Collinson offre ici les prémisses du genre aujourd'hui plutôt commun du « Home Invasion ». Sur le papier, l'histoire est très classique et n'offre donc rien de vraiment révolutionnaire. Toute la subtilité du film se situera plutôt dans la confection de dialogues assez savoureux, dans un duo de malfaiteurs farfelus ou encore dans un rebondissement assez inattendu. On aimerait dire que le film vaut le détour pour Suzy Kendall (Torso), mais étrangement, hormis peut-être sur une ou deux séquences, l'actrice – pourtant première victime des actes commis par nos agresseurs - est particulièrement effacée, et même ses charmes naturels ne seront pas mis proprement en valeur et resteront plutôt prudes (peut-être parce qu'on est encore en 1967 et qu'on n'est qu'au début de la libération sexuelle). L'autre rôle de victime fut confié à Terence Morgan (Les Maléfices de la momie) et là on ne peut pas vraiment dire que l'acteur se montre crédible, pour être honnête il sonne même plutôt faux. Il apparaît donc clairement que tout repose sur le duo Tony Beckley et Norman Rodway, les deux acteurs sont complices et on croit réellement à leur « partenariat ». On notera d'ailleurs un savoureux et assez long monologue, sans coupe de montage, de Tony Beckley : impressionnant. Quant à Martine Beswick, si au final son personnage intervient brièvement (une quinzaine de minutes), il est évident qu'il y a là aussi une belle performance de l'actrice, surtout que pour cette fois ce ne sera pas sa superbe silhouette qui sera mise en avant, mais bien une performance d'actrice.
Le problème est que si les qualités autour de La Nuit des Alligators ne manquent pas, le tout manque cruellement de rythme. Tout comme ce bon vieux Bruce qui se fait attacher sur son siège en tournoyant, le spectateur a lui aussi parfois l'impression de tourner en rond. On aurait aimé que les victimes se montrent moins passives et surtout plus enclines à ne pas se laisser faire aussi facilement. Puis, soyons honnête, Peter Collinson n'est pas Alfred Hitchcock et hormis deux ou trois idées amusantes le réalisateur n'arrive pas à canaliser la tension à un niveau homogène, ne jouant ni avec les lieux (qui apparaissent de toute manière plutôt étroits pour un appartement sensé être luxueux) ni avec l'idée de temps (les comportements n'évoluent jamais).
La Nuit des Alligators fait partie de ses productions qui sont aujourd'hui quelque peu oubliées. S’il y a bien quelques qualités indéniables, et que ce film est intéressant à placer dans le cadre d'un hommage, avouons qu'on peut comprendre pourquoi aujourd'hui il ne figure pas dans les classiques du genre.
(Avis Richard B.)
En parallèle à cette séance, d'autres ont pu découvrir le très réussi Ghost Graduation, vous pouvez en lire notre critique ici, ou encore découvrir notre interview du réalisateur ci-dessous.
Présenté à l'Etrange Festival de l'année dernière, le premier V/H/S avait plutôt fait l'effet d'un pétard mouillé, en dépit d'un ou deux sketchs réussis (la vampire dans le motel). Produit on ne sait trop comment alors que le premier opus n'a eu aucun succès et n'a rien rapporté, V/H/S 2 a la bonne idée de pousser le bouchon un peu trop loin. Il s'agit donc toujours d'une anthologie de sketchs en found-footage (film à sketchs et found-footage : deux registres très courants dans le cinéma fantastique de ces dernières années) réalisés par des cinéastes prometteurs, la plupart ayant par ailleurs déjà œuvré sur le très inégal ABCs of Death. Mais cette fois les sketchs vont beaucoup plus loin et partent même complètement en vrille pour finir sur un mode rigolard, tout en maintenant une réelle tension. Bien plus ambitieux formellement, V/H/S 2 assume également plus son côté bis déviant et cartoonesque.
Dans Phase I Clinical Trials, un borgne se fait greffer un œil-caméra dont on adopte le point de vue. Dès lors, il se met à voir des fantômes dans sa villa. Si le pitch peut faire penser au The Eye des frères Pang, l'idée de l'œil-caméra est aussi bien exploitée que maitrisée. Avec ce sketch d'épouvante, Adam Wingard revisite ainsi le film de fantômes et de maison hantée. On se surprend à sursauter plusieurs fois, mais aussi à rire, puisque ça ne manque pas d'humour non plus (cf. la solution de la fille pour faire partir le fantôme de son oncle), pas étonnant de la part du réalisateur de You're Next, qui a actuellement la chance de sortir en salles. Ça n'a ni queue ni tête comme la plupart des sketchs de cette anthologie, mais c'est efficace et bien foutu.
GoPro + zombies ? Voilà l'idée improbable de ce court-métrage réalisé par le tandem culte du Projet Blair Witch. Leur A Ride in the Park a le mérite d'aller jusqu'au bout de son unique idée, à savoir une mini-caméra GoPro fixé sur la tête d'un randonneur qui, alors qu’il faisait du VTT en forêt, tombe sur des zombies et se fait mordre. Le spectateur adopte alors le point de vue d'un pauvre type qui se transforme en zombie et s'en va bouffer d'autres gens. Loufoque, gore et délirant, A Ride in the Park est une farce réjouissante qui ne se prend pas au sérieux mais qui réussit à aller au-delà de son caractère fauché et d'un genre épuisé, prouvant ainsi qu'il est encore possible de faire quelque chose de neuf chez les zombies. De la part des deux réalisateurs qui ont lancé l'ère du found-footage, c'est une belle surprise.
Gareth Evans (The Raid) et Timo Tjahjanto (Macabre) se mettent à deux pour nous offrir un morceau de bravoure démentiel, partant de jeunes qui réalisent un reportage au sein d'une secte satanique. Autant dire que les réalisateurs maitrisent un sacré crescendo dans la folie et le stress ; après un début tranquille, ça part totalement dans un immense n'importe quoi aux multiples fulgurances gores et glauques, jusqu'à taper dans le post-apocalyptique, le tout servi avec un humour décapant (cf. le dernier plan) et des effets spéciaux saisissants. On peut penser à la saga des [REC.] pour le mélange found-footage + possédés, mais ce Safe Haven est bien plus original. La multiplicité des caméras (et donc des personnages) permet de passer d'une horreur à l'autre en un clin d'œil et d'accumuler les plans-séquences. Esthétiquement, ça se tient, le style est ambitieux et ça reste toujours très lisible ; faut dire qu'il y a deux excellents réalisateurs aux commandes. Le gourou de la secte et le Démon sont particulièrement délirants.
Alors qu'ils se font des sales blagues entre eux, des jeunes cons sont confrontés à des extraterrestres qui veulent les kidnapper. Toujours en mode grindhouse eighties, Jason Eisener déçoit avec ce sketch brouillon et la plupart du temps illisible, hormis quelques flashs saisissants des aliens. Le réalisateur du génial Hobo With a Shotgun et de quelques courts-métrages fameux (Treevenge c'était quand même autre chose !) s'amuse ici à coller une GoPro sur un chien pour mieux le filmer en train de crever : pas spécialement drôle, surtout quand il s'agit du dernier plan. Slumber Party Alien Abduction n'est ni vraiment marrant ni vraiment effrayant, ni même stressant.
Quand au sketch qui sert de fil conducteur (dans le premier film c'était les cambrioleurs) et que réalise Simon Barrett (scénariste de You're Next, de The Guest, de Dead Birds et de Frankenfish), il n'a guère d'intérêt et ne maintient aucune tension puisqu'il est régulièrement coupé par les autres sketchs. V/H/S 2 compile donc plusieurs exercices de style plus ou moins savoureux, se révélant plus convaincant dans son ensemble (trois très bons sketchs) que ne l'était le premier film. On peut tout de même se faire la remarque que ça s'appelle V/H/S alors que c'est filmé avec des caméras numériques (GoPro, Canon 5D...), mais bon...
(Avis Jonathan C.)
Publié le samedi 7 septembre 2013 à 12h08
Fiches de l'encyclopédie de la SF en rapport avec l'article
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V/H/S
1 fiche
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Martine Beswick
12 rôles
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