Tout sur le prochain Mythic Games !
L'interview de Léonidas Vesperini
Nous étions au FIJ de Cannes fin février et nous avons eu l'opportunité d'interroger Léonidas Vespérini sur le futur projet de Mythic Games ! Il s'agit d'une adaptation du célèbre personnage de Robert E. Howard Solomon Kane. Ca vous intéresse ? Voici de quoi en apprendre un peu plus...
SFU : Bonjour Léonidas, pour les lecteurs qui ne te connaissent pas, peux-tu te présenter en quelques mots et présenter Mythic Games ?
Léonidas Vespérini : Je m'appelle Léonidas Vesperini, je suis un des deux associés de Mythic Games et ça fait un moment que je suis dans le milieu du jeu. J'ai été journaliste pendant très longtemps dans différents magazines comme Ravage, Lotus Noir, Mana Rouge ou encore Manga Kids. Depuis maintenant trois ans, je suis éditeur avec Mythic Games qui édite des jeux de société avec figurines qui sont lancés sur Kickstarter. Le dernier en date est Joan of Arc. C'est un jeu de figurines centré sur la Guerre de Cent ans, Jeanne d'Arc étant évidemment le personnage le plus connu de cette époque, mais il n'y a pas qu'elle. Il y a plein d'histoires, des mythes et légendes auxquels les gens croyaient à l'époque ce qui fait un mélange historique et fantastique. On a lancé ce jeu l'an dernier sur Kickstarter, il a rencontré beaucoup de succès. Et là, tout récemment, juste pour ce salon de Cannes où nous sommes en train de discuter, nous avons annoncé notre prochain projet qui va être lancé sur Kickstarter et nous sommes très impatients d'en dévoiler plus. C'est quelque chose sur lequel on a beaucoup travaillé et ce jeu c'est Solomon Kane.
SFU : Solomon Kane, comme le personnage de Robert E. Howard, le père de Conan ?
Léonidas Vespérini : Exactement, c'est ce personnage qui est une sorte d'archétype que tout le monde connaît sans forcément le nommer. C'est l'archétype du chasseur de sorcières, ce personnage habillé en noir, puritain, qui a une rapière, un mousquet et qui affronte les créatures du mal et punit les hommes, les criminels. Il fait le bien, en tous cas il en est persuadé, parce qu'il est un petit peu fou. Il est extrême, fanatique : un Punisher avant l'heure mais dans un XVIème siècle gothique, mystérieux. Ses aventures mélangent un aspect à la Tim Burton (Sleepy Hollow) et des histoires beaucoup plus capes et d'épées. C'est un aventurier qui voyage sur tous les continents, traquant le mal dès qu'il pense l'avoir découvert et où qu'il se trouve. C'est un personnage errant, un vagabond qui apparaît quand le mal est là, qui punit et qui s'en va. Il est très intéressant, il a été maintes fois copié, il a inspiré beaucoup de gens dans la culture populaire ou dans l'édition de jeu. Par exemple le répurgateur dans Warhammer est totalement inspiré de Solomon Kane. Même dans les films, quand ils veulent représenter cet archétype, souvent, ils habillent le personnage comme lui, comme dans le film Van Helsing.
SFU : En effet, le personnage de Van Helsing dans l’œuvre Dracula de Bram Stoker est un vieux professeur, un docteur et dans le film Van Helsing de Stephen Sommers, c'est Solomon Kane.
Léonidas Vespérini : Exactement, alors que Bram Stoker ne l'a pas du tout décrit comme ça, ils ont choisi la représentation de Howard qui était un auteur précurseur, étonnamment moderne pour quelqu'un qui a écrit dans les années 20-30. Il a écrit très jeune et son style reste tout à fait lisible aujourd'hui. Il est très axé vers l'aventure. Il était très ami avec Lovecraft, mais les personnages de Lovecraft sont tous des victimes, ils souffrent, ils subissent les événements alors que les personnages de Howard sont des héros. Ils prennent les choses en main, ce sont des héros au sens large du terme. Ils sont peut-être plus modernes.
SFU : Solomon Kane a inspiré le jeu de rôle il y a plusieurs années déjà avec Torg et le monde d'Auroch, le monde des horreurs victoriennes avec des chasseurs de monstres et de sorcières. Il a été à la base d'un jeu de rôle plus récent avec un jeu Solomon Kane chez Pinnacle avec le système Savage World aux Etats-Unis mais qui n'a pas vraiment eu de suivi de gamme et puis surtout qui n'a pas bénéficié d'une traduction française. Du coup, on est impatient de savoir, Solomon Kane, le jeu de société avec figurines chez Mythic games, ça va être quoi ?
Léonidas Vespérini : Alors, chaque fois que nous faisons un nouveau jeu, nous changeons de concept. Le premier, Mythic Battle est un jeu d'affrontement et de combos dans un univers qui évoque des choses aux gens. Il faut qu'ils aient des références, qu'ils puissent se renseigner sur l'univers du jeu avant, ce qui fait que quand le jeu arrive, les gens sont prêts. On veut que chaque nouveau jeu soit différent et complète le plaisir de jeu du précédent. On ne va jamais refaire un jeu qui soit une nouvelle version du premier ou un jeu proche, on souhaite des jeux complémentaires dans le plaisir qu'il procure. Le deuxième est Joan of Arc. Là, on a changé d'échelle, on a des figurines plus petites, on est sur l'échelle légendaire (16 mm) ce qui permet d'avoir plus de figurines sur une table normale et une vraie différence quand on utilise des monstres et des bâtiments. Ces bâtiments sont immersifs et on peut les visiter. Quand on met des monstres, il y a une vraie différence d'échelle. Cette fois, c'est notre premier jeu coopératif et très narratif. Il va vraiment raconter une histoire, on va reprendre les nouvelles d'Howard et on va les vivre à travers l’expérience des joueurs.
SFU : Dans le jeu, comment cela se passe ?
Léonidas Vespérini : Le mal, les ténèbres sont joués par une intelligence artificielle. L'histoire est partagée en chapitres, et à la fin de chaque chapitre, l'histoire va prendre un sens, une direction en fonction des choix des joueurs. Les joueurs interprètent les quatre vertus cardinales. Ce sont des forces invisibles qui représentent l'idéologie chrétienne. Solomon Kane est très croyant, un WASP pur et dur et donc il se raccroche à certaines forces. Ces quatre vertus cardinales sont très différentes les unes des autres. Elles vont influencer le personnage dans un sens ou dans l'autre et c'est aux joueurs de choisir ce qu'il vaut mieux faire dans la situation proposée dans le jeu. Ces quatre vertus sont le courage, la prudence, la tempérance et la justice. Les joueurs ne seront pas toujours d'accord entre eux. Ces vertus ont des pouvoirs spéciaux et sont représentées par une figurine qui ne sera pas tout le temps sur le plateau de jeu. Elles sont invisibles aux personnages, les protagonistes de l'histoire ne les voient pas. Il y a aussi des forces du mal, des ténèbres qui seront également sur le jeu et qui seront contrôlées par l'IA. Donc le jeu est une succession de scènes parfois jouées avec des figurines, parfois discutées entre les joueurs. Les joueurs vont essayer de coopérer au mieux pour faire progresser l'histoire.le système de jeu est fait pour que ce soit le mal qui gagne. C'est aux joueurs de bien se coordonner pour réussir à triompher.
SFU : C'est donc un jeu qui va être difficile. Il y a un vrai enjeu, un vrai défi et en même temps, c’est une nouvelle forme de jeu, car ce n'est, d'après ta description ni totalement du jeu de figurines ni totalement du jeu de rôle
Léonidas Vespérini : C'est exactement ça, c'est vraiment entre les deux. On est autour d'une table et on va être plongé dans une histoire et à la fin ce dont on se souviendra c est l'histoire qui a été racontée : soit Solomon Kane aura réussi à vaincre le mal et tous les joueurs ont gagné, soit Solomon Kane échoue à la fin et tous les joueurs ont perdu.
SFU : Sur la campagne kickstarter qui se prépare, on va avoir un nombre de scénarios qui peuvent se débloquer, vous avez déjà prévu des paliers ? Comment allez-vous gérer cela ?
Léonidas Vespérini : On va partir sur un nombre minimum d'histoires que l'on prépare et que l'on est sûr de faire, et on en rajoutera peut-être certaines dans les strech goals et d'autres dans des extensions, plus thématiques. Les grosses campagnes seront donc plutôt des extensions et les petites histoires courtes seront peut-être des strech goals. Chaque histoire sera divisée en un certain nombre d'actes. Les histoires courtes feront un acte de dix chapitres. Ça peut encore changer mais normalement chaque histoire c'est dix chapitres contenant quatre ou cinq scènes. Certaines scènes sont représentées par un plateau et des figurines, d'autres sont représentés par de la narration : un texte à lire et des décisions à prendre par rapport au texte. Donc dans chaque histoire en un acte, il y a plusieurs mini scénarios à jouer. Lorsqu'il y a plusieurs actes, une fois qu'on a fini l'acte, on reprend l'histoire où on l'en était et on commence l'acte suivant, puis le troisième... Et on est alors vraiment dans un jeu en campagne.
SFU : Chacune des dix histoires est une mini campagne en elle-même ?
Léonidas Vespérini : Oui dans la boite de base, on imagine faire une histoire en un acte, une en deux actes et une dernière histoire en trois actes, soit six actes. A 4 ou 5 scénarios par actes, ça fait déjà pas mal dans la boite de base. Si on ajoute ensuite les strech goals qui seront des histoires en un acte.
SFU : Y-a-t-il une date pour que les joueurs commencent à économiser ?
Léonidas Vespérini : Oui, il y a une date : c'est juin. On n'a pas encore le jour exact, le jeu sera magnifique !
SFU : J'ai les affiches et les visuels sous les yeux et en effet, c'est prometteur !
Léonidas Vespérini : Un seul artiste a travaillé sur tout ce projet. On va essayer d'avoir le plus grand nombre d'illustrations jamais proposées dans un jeu de plateau. Rien que ça et de ce niveau là !
SFU : Un artbook peut-être ?
Léonidas Vespérini : Pas forcément car le livre d'aventures sera très illustré. Quand on joue une histoire et qu'on arrive dans une scène, on pourra se référer à l'illustration, ce qui aide à l'immersion. Même les chapitres d'une histoire seront posés en tas de cartes et le dos de ces cartes mis côte à côte formera une scène. Ça va être très joli !
SFU : Ça peut sembler être du détail pour un joueur mais c’est ce qui fait le charme d'un bon jeu. Aujourd'hui on est sur plus de 3 500 sorties jeux de plateau rien que pour le festival d'Essen qui est la référence annuelle. Pour les kickstarters, on sait qu'on est sur des gammes de prix supérieures aux jeux moyens en boutique donc ce qui fait le charme de ces kickstarters, c'est la qualité esthétique : la qualité du matériel et le côté cadeau de noël quand on les déballe et le fait que ce soit magnifique. Et là, pour ce que j'en vois pour l'instant, je suis conquise.
Léonidas Vespérini : Merci beaucoup, c'est ce qu'on veut faire, on veut que ce soit un très très bel objet et certains pourraient l'acheter même seulement pour la beauté des figurines, les amateurs de l'histoire vont être contents de voir comment Solomon Kane et les autres personnages des histoires sont représentés : le loup, la reine des vampires... On a une certaine expertise en sculpture et en production de figurines et chaque fois, on essaie d'aller un petit peu plus loin. Et sur ce jeu, aussi, on est allé plus loin puisque on propose des figurines qui sont pratiquement des figurines de collection : elles sont assez grandes avec du 35 mm, elles ont un socle texturé, les armes sont dans un plastique plus dur qui ne tord pas, elles seront toutes en multiparties et vont beaucoup occuper l'espace. Ca va vraiment être un beau produit, très agréable à l’œil, très immersif.
SFU : Concernant les quatre vertus cardinales, peux-tu nous préciser ce à quoi ça peut ressembler en figurines ?
Léonidas Vespérini : On va reprendre la représentation des vertus cardinales de cette époque : sous la forme de femmes fantomatiques avec des objets qui correspondent à la vertu cardinale associée. Il y a le miroir, la balance, toutes sortes d'objets et on va reprendre l'iconographie de l'époque. Elles seront invisibles aux yeux de Solomon Kane. Quand on les fera intervenir sur le plateau, elles pourront aider le personnage principal ou d'autres et le booster dans leur spécialité : pour le courage ce sera l'aspect combat, et pour la justice ce sera plus dans l'interaction et les discussions avec les gens : les scénarios et les mini scénarios ne seront pas uniquement du combat, vaincre l'adversaire. Il y aura de l'action mais aussi de temps en temps de la négociation. est-ce qu'il faut plutôt résoudre cette situation par combat ou par la discussion ? Les joueurs pourront décider et chaque joueur sera responsable d'un des quatre compteurs de Solomon Kane : un va gérer sa force, un autre le niveau de danger...
SFU : Pour les lecteurs qui n'ont jamais lu Solomon Kane, a-t-il été envisagé lors de la négociation des droits, de rééditer l'intégrale des nouvelles ? En France, on les trouve chez Bragelonne actuellement, mais la réédition a quelques années et je ne sais pas sa disponibilité en librairie.
Léonidas Vespérini : Justement, je sais que Bragelonne a l'an dernier réédité dix compilations les plus marquantes de la littérature fantastique dont Solomon Kane. J'invite vraiment les gens à le lire, ça se lit très facilement et c'est un classique qu'il faut connaître. Ça fait partie des références geeks.
SFU : Pour les fans d'Howard, Patrice Louinet est la référence et a écrit notamment une biographie de l'auteur. L'avez-vous contacté ?
Léonidas Vespérini : Oui, il participe à l'élaboration du jeu.
SFU : Donc le spécialiste d'Howard en France travaille avec vous, les fans n'ont pas à s'inquiéter, le personnage sera respecté !
Léonidas Vespérini : Absolument, c'est notre consultant et à chaque fois qu'on donne des scènes ou des dessins à faire, on part de ce que lui en dit. cela permet d'avoir des descriptions qui reviennent à Howard, d'avoir ses précisions sur ce qu'est le personnage t ce qu'il n'est pas, ce que sont ou ne sont pas les ennemis et les personnes que Solomon Kane rencontrent. C'est Patrice Louinet par exemple qui nous dit, ce n'est pas dit dans la nouvelle, que le loup est le double maléfique de Solomon Kane, son doppleganger, sa nemesis, ce qui a de mal en lui et qui le pousse à être violent. Souvent cette dualité se retrouve parmi les personnages dans les nouvelles. Patrice Louinet nous offre une vision très juste.
SFU : L'intérêt de ce personnage d'Howard est vraiment le fait d'être à la fois le héros mais aussi parfois le méchant par ses actes. A jouer, vous pensez surprendre les gens ?
Léonidas Vespérini : Oui, cette ambiguïté permanente le rend intéressant. Il n est pas aseptisé, gentil, il tue. Il reste un héros cependant la fin justifie les moyens.
SFU : Dernière question pour les collectionneurs et les figurinistes, y-aura du décor ?
Léonidas Vespérini : Contrairement à ce que l'on avait fait sur Jeanne d'Arc où on avait en effet beaucoup de décors parce que l'échelle le permettait, on aura surtout des éléments de décors parfois une potence, une vierge de fer, des trucs un petit peu sympathique pour mettre dans l'ambiance ou pour que ce soit un des objectifs du scénario symbolisés. On n'aura pas de gros décors mais beaucoup de plateaux magnifiques très immersifs sur lesquels on posera les figurines.
SFU : Merci beaucoup Léonidas pour ces informations et les visuels qui nous donnent ici déjà très envie de jouer à Solomon Kane. Stay tuned pour ne pas passer à côté de ce kickstarter !
Léonidas Vespérini : Merci beaucoup.
Pour finir, Léonidas Vasperini nous a partagé ce teaser qui devrait achever de vous convaincre !
Publié le jeudi 8 mars 2018 à 09h00
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Solomon Kane
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