Critique L'enchâssement [1974]

"Chris Sole s'habillait rapidement. Eileen l'avait déjà appelé une première fois. La seconde fois, le facteur venait de passer..."
Dans un institut, Chris Sole entreprend de donner une autre forme d'apprentissage au langage pour l'adapter spécialement à des d'enfants qui semblent hors réalité. Pendant ce temps, en Amazonie, Pierre Darriand est au milieu de la tribu des Xemahoa, où une langue sacrée enchâssée ne peut être comprise que sous l'influence d'une drogue locale. Sole reçoit la visite d'un américain qui lui demande de venir dans le Nevada où un événement majeur vient de se passer...
L'idée de départ est ce langage que l'on enseigne à des enfants en difficulté, pour ne pas dire anormaux ou autiste, quant à l'appréhension du monde extérieur. Chris Sole est un expert du langage qui par le truchement d'une structure enchâssée, va parvenir à communiquer avec ces enfants. Cette théorie de l'enchâssement a été proposée en 1956 par Chomsky. Cette structure du langage qui peut être illustrée par les poupées russes permet un autre niveau de compréhension. Peut-être plus rapide mais surtout compréhensible par une autre forme de réflexion. C'est une structure que ni vous ni ne sommes habitués à utiliser, mais que l'on a parfaitement adapté au langage informatique (interpréteurs, compilateurs et autres langages structurés habituels). Si l'on prend l'instruction simple: IF ENDIF, elle enceint un bloc d'instruction, et si l'on y insère une autre instruction conditionnelle IF ENDIF, l'enchâssement est dès lors très visuel. On a la même chose pour du BEGIN END, du WHILE DO etc etc. En fait, certaines formes de mémorisation visuelles ont cette structure d'enchâssement. Exemple: si je veux mémoriser les mots souris, chat, moisissure, fromage. Je visualise le chat qui mange la souris qui mange le fromage sur lequel il y de la moisissure. Facile à retenir. D'où le fait que notre esprit est déjà à un certain niveau capable d'appréhender cette façon de penser.
C'est sur cette base que ce roman intrigue, intéresse le lecteur. Puis la même chose se produit à des milliers de kilomètres de là, dans une tribu qui arrive au même résultat grâce à une drogue. Et puis Ian Watson se disperse, il fait intervenir une race d'extra-terrestres en route pour une quête insensée et mystique dont les résultats de la tribu des Xemahoa pourraient être la clé.
Non pas que ce roman soit inintéressant, bien au contraire, car l'enchâssement est une formidable idée de base, mais c'est développement de l'histoire qui plonge le lecteur dans le flou le plus total. La difficulté de lier chaque situation indépendante à un tout manque d'une certaine cohésion. Et ce qui aurait dû être fait pour que le roman soit une totale réussite, c'est de faire de la structure même du roman un enchâssement, ce que je n'ai pas lu. C'est donc bien ce manque d'ambition et de cohérence qui m'a déçu. Ian Watson aurait dû aller plus au fond des choses.
Ceci étant dit, les scènes se déroulant dans l'institut et dans la tribu m'ont passionné. C'est plutôt bien écrit et le lecteur se demande jusqu'où cela va le mener. La partie ET m'a semblé au contraire très éloignée et manquant le de liant avec le reste du roman.
Avis mitigé, pour ma part.