Critique Opération Jabberwock #2 [2019]

Opération Jabberwock est un roman uchronique et fantastique de Nicolas Texier où le monde est réenchanté. C'est le deuxième volet d’un triptyque intitulé Monts et merveilles.  Dans cet univers, la magie existe, elle n'est évidemment pas l'affaire de tous ni bienvenue partout.

Nous sommes à la fin des années 30 et quelques mois après l’échec de l’Opération Sabines qui a mené nos héros notamment en Italie à la recherche d’un physicien, l’enchanteur Carroll Mac Mael Muad s’ennuie. Il a retrouvé sa fiancé, vit toujours avec son domestique et ami Julius Khool mais l’inaction le mine. Un voyage dans sa famille en Irlande va changer la donne.

Dans le vieux château familial, le jeune homme retrouve l’automate de son père nommé  Mc Key et ses nombreux livres sur les légendes arthuriennes. Les notes de ses parents qui accompagnent les ouvrages laissent penser que ces derniers étaient sur la piste de la fameuse épée du roi Arthur Excalibur et qu’ils en sont morts… Carroll décide alors de tout abandonner, enfin surtout sa fiancée car il emmène avec lui Julius et l’automate, et de partir en Amérique. C’est alors que se déclare la seconde Guerre Mondiale qui risque de mal se finir au vue des armes à feu que possède l’ennemi depuis la fin de l’Opération Sabines et que personne ne connaissait jusqu’alors….

La première étape du jeune enchanteur est Providence. Il y rencontrera un club de l’étrange, des gens fascinés par le spiritisme et l’occulte. Lors d’une virée nocturne, il découvrira que les nuits peuvent être effrayantes dans la région d’Arkham… Les références à Edgar Allan Poe et Howard Phillips Lovecraft ainsi qu’à Weird tales sont très bien amenées dans ce passage à l’ambiance horrifique et surnaturelle. Mais la côte Est est rapidement quittée pour rejoindre la cité du crime Chicago. Il y a sera question de dérober un certain ouvrage intitulée la science du monde à une famille pas commode pour trouver l’épée qui serait cachée au fin fond du Far West.

Vous l’aurez compris ce deuxième volet des trépidantes aventures du duo Carroll/ Julius vous fera voyager dans tous les Etats-Unis en vous en offrant le meilleur : le Rhode Island puritain d'Howard Phillips Lovecraft, le Chicago de Capone et le Far West des meilleurs westerns. Mais ces Etats-Unis sont chrétiens contrairement à L’Europe de Caroll qui usede magie et est restée païenne.

A Chicago, l’ambiance mafia et jazz est particulièrement réussie. Les personnages rencontrés sont bien écrits et intéressants. Julius sera d’ailleurs sous le charme de l’époustouflante Présence Beauregard (Quel nom ! Tous les noms sont extrêmement bien trouvés dans ce roman).

Dans l’Ouest sauvage, nos héros côtoieront des indiens de différentes tribus qui dans cette uchronie n’ont pas été exterminés par les colons et luttent pour leur liberté. Traditions chamaniques, attaque de train… Tout est là pour nous plonger dans un western mouvementé. En effet, les opposants à notre fine équipe sont prêts à tout pour obtenir l’épée même à exterminer des peuples entiers.

Ce roman offre à ses lecteurs un voyage passionnant sur un continent à l’histoire courte mais riche, la narration de Julius Khool est fine, érudite, drôle et moins perdue dans les flashbacks que précédemment. Le récit est tout aussi riche mais plus facile à suivre, parfois poétique mais toujours avec une ambiance étudiée.

Le personnage de l’automate est un plaisir à lire/écouter divaguer tant son langage est recherché et retranscrit son état de machine et le fait qu’il possède en lui plusieurs âmes, mais n’en dévoilons pas plus. Celui de Violette la fille de Présence, qui est ‘mi-morte’ montre une empathie pour les autres et une perception des sentiments accrue. Etrange et fascinante, elle apporte aussi beaucoup à cette histoire.

La trame autour des légendes arthuriennes est passionnante et englobe l’œuvre d’un folklore européen qui pourtant se mêle au bestiaire des monstres américains et pas seulement lovecraftien. Le mélange du voyage à travers ces territoires variés et d’un folklore celte rend ce roman palpitant et original, bref à lire !