Critique Taram et le chaudron magique [1985]

Avis critique rédigé par Bastien L. le jeudi 18 juillet 2024 à 09h00

Un Disney sans magie

Critique de la version française

Parmi les classiques de l'animation Disney en 2D, Taram et le chaudron magique fait un peu figure de vilain canard apparaissant comme étant le moins apprécié, la plus grosse catastrophe de la firme et par conséquent le moins vu...

L'histoire est connue, les années 1980 représentent la décennie la plus noire pour les films d'animation Disney avant une résurrection triomphale dans les années 1990. Cela s'explique par une production ralentie de films qui connurent des accueils très mitigés de la critique comme du public. Sans oublier une crise institutionnelle au sein des studios d'animation où la veille garde n'arrive pas (encore) à faire confiance aux jeunes pousses pourtant promises à un grand avenir. L'exemple le plus parlant est celui de Don Bluth claquant la porte en créant son propre studio avec des films réussissant ensuite à battre Disney au box-office. Bluth a par ailleurs œuvré un temps sur Taram et le chaudron magique qui connut une production compliquée. Le film est d'abord l'adaptation des premiers tomes des Chroniques de Prydian, récits de fantasy de Lloyd Alexander s'inspirant de la mythologie galloise. Les droits sont achetés au début des années 1970 et l'adaptation est d'abord travaillée par Frank Thomas et Art Stevens avant que le sujet ne soit confié à John Musker dont les premières ébauches ne plurent pas au PDG Ron Miller. Ce dernier rappelle l'artiste expérimenté Joe Hale pour servir de scénariste (ils seront au final 9 à être crédités comme tel) comme de producteur tandis que Ted Berman et Richard Rich se voient confier les postes de réalisateurs. Deux hommes de la maison Disney qui avaient réalisé ensemble Rox et Rouky sorti en 1981. La production débute ainsi en 1980 mélangeant passé et futur dans ce projet voyant se côtoyer des gloires passés de le firme aux grandes oreilles mais aussi des génies en devenir de l'animation comme John Lasseter ou Rob Minkoff pour ne citer qu'eux. On retrouve l'animation traditionnelle maison mais aussi l'apparition d'animation en images de synthèse. Le tout pour un résultat beaucoup plus sombre qu'à l'accoutumé pour du Disney. A un tel point qu'après des projections tests inquiétantes, le nouveau patron Jeffrey Katzenberg exigeant des coupes en salle de montage. Tâche qu'il exécuta lui-même en partie selon la légende. Cela ne sauva pas le métrage lors de sa sortie en 1985 affublé du qualificatif de film d'animation le plus cher jamais produit (44 millions de dollars) qui ne récolta pas même pas la moitié de sa mise...

Situé dans un univers de fantasy inspiré de l'Europe médiévale, le film met en scène la valet de ferme Taram travaillant au service de l'enchanteur Dalben. Les deux veillent sur la jeune truie Tirelire qui possède des dons de divination capables de localiser le chaudron magique. Cet objet maléfique forgé par un ancien tyran sanguinaire offre à son possesseur le pouvoir de ranimer les morts afin de les envoyer conquérir le monde. C'est exactement ce que convoite le malfaisant Prince des ténèbres qui connaît malheureusement l'existence de Tirelire. Dalben charge donc Taram de fuir avec la truie afin de la cacher des yeux du mal. Malheureusement, elle est enlevée par des dragons sur le chemin et conduite à la forteresse du Prince des ténèbres que Taram va devoir infiltrer pour sauver son amie. Une quête qui lui fera rencontrer l'étrange créature affamée et pleutre Gurki, la valeureuse princesse Eilonwy, le barde mythomane Ritournelle ainsi que bien d'autres alliés comme ennemis... Commence ainsi l'aventure de sa vie pour sauver le monde.

Taram et le chaudron magique est effectivement un film à part parmi les classiques de l'animation Disney pour plusieurs raisons. Déjà c'est le premier avoir obtenu une classification « PG » lors de sa sortie notamment car il offre une ambiance aussi sombre qu'inquiétante. Déjà, on se rapproche plus de la dark fantasy que de la high fantasy avec bons nombres de scènes se déroulant dans la forteresse cauchemardesque du Prince des ténèbres. Ce dernier a par ailleurs une allure de monstre tandis qu'il s'avère être toujours premier degré et constamment menaçant. Cette ambiance sombre est accentuée par l'absence totale des chansons qui font pourtant la renommée de Disney. De plus il y a de nombreuses scènes assez surprenantes et qui détonnent dans le monde de Mickey : autant de gros plans sur des cadavres, un héros qui saigne ou un autre littéralement coincé entre les seins d'une sorcière... Des images plutôt fortes pour un jeune public qui fait de Taram et le chaudron magique l'exception qui confirme la règle du monde enchanteur (pour ne pas dire gnan-gnan) de Disney. Le film se regarde aussi pour constater à quel point ce studio légendaire était paumé au milieu des années 1980 même si Les Aventures de Bernard et Bianca avait auparavant démontré que le studio avait un côté sombre.

Revenons donc sur le scénario qui dans un sens reste dans la tradition de bons nombres de classiques Disney à savoir une intrigue globale assez oubliable car le récit se base surtout sur des péripéties comme les rencontres que peut faire Taram. On est ici servi tant les 80 minutes s'enchaînent sur un rythme soutenu pour un héros qui semble surtout subir ce qui lui arrive seulement armé de son courage face à une armée démoniaque apparemment invincible. Néanmoins la valse des scénaristes se fait sentir avec des répétitions dans les informations données aux spectateurs comme des règles qui semblent constamment changer concernant le fonctionnement du chaudron. De même, on découvre beaucoup de personnages en peu de temps et les héros apprennent à se connaître sans temps mort rendant leurs relations parfois un peu forcées pour en faire une vraie équipe. L'ensemble n'est pas complètement raté, mais le film n'est clairement pas le mieux écrit qui soit. Il reste néanmoins divertissant pour son sens de l'aventure et l'ambiance angoissante qui s'en dégage. Quant à savoir ce qu'il souhaite nous raconter, là aussi c'est assez flou si ce n'est la très classique lutte du bien contre le mal où des gens pas forcément préparés à ça (la princesse Eilonwy semble être la seule héroïne un tant soit peu compétente) peuvent réussir à triompher s'ils travaillent ensemble.

Il a été dit que le film détonne dans la galerie des classiques Disney ce qui veut dire qu'il a une certaine part d'originalité. Il se distingue donc des deux autres classiques médiéval-fantasy à savoir La Belle au bois dormantt et Merlin l'enchanteur. Il emprunte au premier ses ambiances en termes de choix des couleurs (notamment la forteresse) tandis que la direction artistique (décors, character design, style d'animation...) est plus proche du second. Le film est ainsi assez beau et on sent quand même la patte artistique Disney derrière chaque image du long-métrage. Si ce n'est qu'on ne retrouve pas légèreté propre à la firme aux longues oreilles puisque les numéros de chants n'existent pas, que la musique d'Elmer Bernstein est très sérieuse et que l'humour est assez peu présent. Il y a bien quelques touches autour des personnages de Gurgi ou de Ritournelle qui semblent plus être des respirations que de véritables numéros comiques. On plonge ainsi non sans déplaisir dans cette ambiance sombre fait d'hommes de mains faisant plus office de soudards, une forteresse inquiétante, un méchant en forme de cauchemar et l'omniprésence de squelettes. Le tout prenant place dans une lande déserte où le désespoir est de mise à tel point que les créatures féeriques vivent cachés comme les humains ayant peur d'être transformés en grenouilles par d'affreuses sorcières... Le métrage réussit par ailleurs à bien mélanger une ambiance sombre avec un spectacle qui reste visionnable par des jeunes spectateurs qui ne seront certes pas dans la même zone de confort que d'habitude...

Taram et le chaudron magique mélange donc animation traditionnelle en 2D avec de l'animation en images de synthèse pour quelques éléments mais aussi des effets en prise en de vue réelle comme de la fumée ou de la brume... Cela se ressent par moments car les mélanges jurent un peu démontrant l'ancienneté d'effets qui en était à leurs balbutiements. Néanmoins, l'animation 2D reste toujours aussi incroyablement fluide et impressionnante démontrant une nouvelle fois le talent des équipes Disney. Que cela soit les êtres humains, le Prince des ténèbres ou les différentes créatures, on reste émerveillé par le travail accompli notamment lors des moments de bravoure comme des poursuites ou le passage chez les sorcières. Pour ce qui est de la mise en scène de Ted Berman et Richard Rich, on reste dans la plus pure tradition des films Disney : avant-tout des chefs d'orchestre chargés de coordonner le travail des animateurs tout offrant une mise en scène fonctionnelle donc efficace. Le travail est ainsi correct avec un montage qui rythme bien l'ensemble. Pour ce qui est de la version française, il faut d'abord savoir que les versions actuellement disponible reprennent le second doublage de 1998 où est évidemment présent l'inoubliable Roger Carel. L'ensemble s'avère donc très satisfaisant si ce n'est un petit problème de taille : le doubleur de Taram (Christophe Lemoine) semble faire les frais d'une erreur de casting tant on a du mal à imaginer le héros parler ainsi...

La conclusion de à propos du Film d'animation : Taram et le chaudron magique [1985]

Auteur Bastien L.
67

Taram et le chaudron magique est une œuvre à part en tous points dans la galaxie Disney. Un échec à sa sortie s'expliquant sûrement par son ambiance sombre qui nous pousse en pleine dark fantasy où la légèreté est absente. Il faut aussi avouer que le scénario n'est pas des plus convaincant... Néanmoins, on aurait tort de bouder ce film d'animation qui rend honneur aux petites mains de Disney qui démontrent leur talent. Et puis cette ambiance si particulière a parfois son charme gâce à un réel sentiment d'aventure.

On a aimé

  • La direction artistique
  • La qualité de l'animation
  • Un Disney vraiment à part

On a moins bien aimé

  • Un scénario peu convaincant
  • Des effets en images de synthèse ayant mal vieilli
  • Un Disney vraiment en dedans

Acheter le Film d'animation Taram et le chaudron magique [1985] en un clic

Nous vous proposons de comparer les prix et les versions de Taram et le chaudron magique [1985] sur Amazon, site de vente en ligne dans lequel vous pouvez avoir confiance.

Retrouvez les annonces de nos dernières critiques sur les réseaux sociaux

Sur Facebook | Sur Twitter