Critique Blue Beetle [2023]

Avis critique rédigé par Bastien L. le mardi 5 septembre 2023 à 09h00

Iron Bug

Cela fait quelques temps que j'entends parler d'une sorte d’essoufflement des films de super-héros auprès d'un public de plus en plus fatigué par toutes ces productions qui s'enchainent. Et je crois que ça y est, je me sens moi-même touché par ce phénomène... A mois que cela soit entièrement la faute de Blue Beetle...

Bien malin qui peut comprendre les stratégies de DC Comics et de sa maison-mère Warner en ce qui concerne leurs films de super-héros dans la roue du mastodonte Disney/Marvel. En tout cas, il y a une certaine envie de mettre en avant des noms un peu moins rutilant de leur catalogue car, sans faire offense à qui que se soit, Blue Beetle n'est pas le plus célèbre de leur héros. Le personnage est d'abord apparu sous sa première identité (Dan Garett) dès 1939 avant de changer en 1966 prenant les traits de Ted Kord. C'est ensuite en 2006 lors de l’événement DC Comics Infinite Crisis que le personnage renaît sous les traits du jeune américano-mexicain Jaime Reyes qui sera la version choisie pour en développer un film en 2018. Une production apparemment assez paisible comparée à d'autres héros DC si ce n'est que le film était à l’origine prévu pour sortir directement sur la plateforme de streaming HBO Max (d'où son budget « modeste » d'environ 100 millions de dollars) avant de prendre la direction des cinémas pour une sortie mondiale en août 2023. Le projet est confié à des artistes avant-tout latins n'ayant pas forcément des CV bien fournis à l'image du scénariste Gareth Dunnet-Alcocer (le thriller musclé Miss Bala) et du réalisateur porto-ricain Ángel Manuel Soto qui après quelques courts-métrages a réalisé le drame Charm City Kings en 2020. Les deux compères ont avoué s'être logiquement inspirés des comics mettant en scène le personnage mais aussi du jeu vidéo Injustice 2 afin de concocter une origin story tournée en 2022 aux Etats-Unis comme à Porto-Rico mettant en scène un casting largement d'origine d'Amérique Latine (dont l'acteur de séries Xolo Maridueña dans le rôle-titre) côtoyant la star Susan Sarandon qui incarne la principale antagoniste.

Le film débute alors que la PDG de Kord Industries Victoria Kord (Susan Sarandon) met la main sur un puissant artefact extraterrestre qui lui permettra de développer et vendre des armes surpuissantes sous formes d'armures. Cela la fait entrer en conflit avec sa nièce Jenny Kord (Bruna Marquezine) qui déplore la tournure prise par l'entreprise familiale. En parallèle, on assiste au retour du jeune diplômé en droits Jaime Reyes (Xolo Maridueña) auprès des siens dans sa ville de Palmeira City (aussi lieu du siège social de Kord Industries) au sud des Etats-Unis. Malheureusement les nouvelles ne sont pas bonnes puisque sa famille va perdre leur maison du fait de la gentrification orchestrée par Kord. D'autant plus que son père (Damián Alcázar) a récemment subi une attaque et que sa sœur (Belissa Escobero) n'aura pas les moyens de poursuivre des études. Cette dernière leur trouve néanmoins un emploi à tous les deux en tant que domestiques dans la demeure de Victoria Kord où ils assistent à une dispute avec sa nièce avant de se faire virer quand Jaime a voulu intervenir. Pour le remercier, Jenny lui dit de passer le lendemain au siège social pour qu'elle lui trouve un véritable emploi. Poussé par le besoin et son attirance pour la belle jeune femme, Jaime arrive au siège social alors que Jenny vient dérober l'artefact mettant tout le bâtiment sur le pied de guerre. Elle le confie en désespoir de cause à Jaime qui le ramène illégalement chez lui devant toute sa famille qui commence à le manipuler. Malheureusement, l'artefact à forme de scarabée va fusionner avec Jaime sous les yeux effrayés des siens le recouvrant d'une armure capable de voler et de produire des armes surpuissantes. Cette entité à la volonté propre appelée Khaji-Da (Becky G) va d'abord prendre le contrôle de Jaime tant et si bien que notre héros va vouloir s'en débarrasser. Pour cela, il lui faut retrouver Jenny qui est pourchassée par la milice privée de sa tante...

Blue Beetle est une origin story dans les règles de l'art d'où son aspect très classique qui en ressort. On pense évidemment à Spider-Man avec un jeune homme connaissant des tracas, notamment financiers, importants et qui va devenir un super-héros par accident. On assiste donc à quelques scènes qu'on a l'impression d'avoir vu tellement de fois que l'ensemble apparaît au final très routinier. Il y a évidemment des particularités qui font de Blue Beetle un film qui réussit parfois à tirer son épingle du jeu. Premièrement, il est centré sur la famille Reyes qui dès le départ sait que Jaime est un super-héros. Cela permet vraiment d'inclure cette dynamique familiale au sein du récit puisqu'ils vont accompagner Jaime dans toutes ses étapes s'avérant aussi nécessaires qu'étouffants selon les moments. Le film insiste aussi sur les origines mexicaines de la famille et ce que cela implique d'être des immigrés ou des enfants d'immigrés. Le tout en comparaison avec les Kord et leur statut de bourgeois prédateurs. Le film parle ainsi timidement de lutte des classes et du racisme au sein de la société américaine. Mais malheureusement sans grande subtilité tant le film est avant-tout un divertissement tout public. On pourra néanmoins noter une certaine originalité en ce qui concerne le bras droit de Victoria Kord, le lieutenant Carapax (Raoul Max Trujilio) au passé et au statut vraiment très intéressants qui se révèlent dans le final. Un final qui est là aussi assez original montrant que le film a quelques qualités à offrir.

Pour le reste, le film peine vraiment à convaincre à commencer par son histoire bien trop classique déjà évoquée. Mais aussi car le film veut divertir à travers l'humour et cela ne fonctionne pas du début à la fin. Dunnet-Alcocer et Soto ne viennent pas vraiment de la comédie et cela se voit. Il y a quand même de nombreux passages où on lève les yeux au ciel devant les blagues navrantes ou encore beaucoup trop téléphonées qui sont ici proposées. Que cela soit l'attitude désinvolte de la sœur, les délires paranoïaques de l'oncle (George Lopez) ou encore le passé mystérieux de la grand-mère (Adriana Barraza)... Tout est trop appuyé avec une dédramatisation constante et surtout de l'humour à base de pipi-caca, de hurlements stridents ou d'effets de mises en scènes outranciers qui ne fonctionnent pas. Le film parvient donc parfois à franchir la frontière du navrant et du gênant avec au cœur cette famille que le film veut qu'on aime mais qu'on trouve souvent ridicule... Et comme l'humour tient une place importante cela empiète sur le rythme du film qui en souffre et on a donc beaucoup de mal à s'y investir. Rajoutez à cela le fait que Jaime Reyes ne soit pas le héros le plus attachant qui soit déjà parce qu'il subit l'intrigue pendant trop de temps mais aussi pour son côté cliché à être constamment étonné de ce qui se passe du début à la fin à travers des « c'est moi qui fait ça ? » ou des « trop cool ! » à foison. On peut néanmoins se consoler avec la qualité de la production qui est ici proposée offrant un film assez ensoleillé ce qui est assez rare chez les super-héros DC. Il y a aussi quelques décors assez originaux notamment celui de la bataille finale. Enfin, la direction artistique a un aspect 80's assez plaisant que cela soit l'utilisation des couleurs vives ou le travail sur les armures.

Si Ángel Manuel Soto n'a pas vraiment à rougir de son travail de réalisateur, on ne peut pas non plus dire qu'il nous a pleinement convaincu. On sent que le Porto-ricain ne maîtrise pas le rythme et les styles de la comédie tant l'humour tombe constamment à plat. On voit néanmoins qu'il a tiré pleinement partie de ses décors réussissant toujours à dégager une certaine chaleur de beaucoup de scènes faisant ici un lien avec le thème de la famille. Il se fait aussi parfois plaisir avec des plans larges plus travaillés. Il est assez à l'aise dans les scènes d'action qui sont néanmoins peu novatrices et assez quelconques dans le paysage du blockbuster actuel. Bref, une mise en scène avant-tout fonctionnelle et classique où apparaissent de temps en temps les capacités du réalisateur. Devant sa caméra, Xolo Maridueña (Parenthood, Cobra Kai...) s'avère assez convaincant et charmant dans un rôle pourtant très cliché sachant bien alterner entre le côté naïf et la détermination, parfois tout en rage, de Jaime Reyes. A ses côtés, Bruna Marquezine (Breaking Dance...) fait habilement parler son charme tout en s'avérant convaincante en femme d'action. C'est tout de suite moins glorieux en ce qui concerne le reste de la famille Reyes qui est souvent au bord du cabotinage (notamment la sœur et l'oncle) avec seul Damián Alcázar (Le prince Caspian, Narcos...) sortant du lot dans son rôle touchant de père de famille discret mais lumineux. Enfin, Susan Sarandon (Thelma & Louise, The Lovely Bones...) nous rappelle à quel point elle est une grande actrice malgré un rôle mineur.

On vous le conseille si vous aimez Spider-Man, Iron Man, Venom...

La conclusion de à propos du Film : Blue Beetle [2023]

Auteur Bastien L.
45

Les débuts de Blue Beetle sur grand écran sont décevants. La principale faute en revient à un scénario qui s'avère trop classique, malgré quelques bonnes idées pas forcément bien exploitées, et surtout trop porté sur l'humour dans des mains créatrices qui ne semblent pas vraiment maîtriser le domaine. On a donc du mal à s'attacher au jeune héros et à sa famille d'autant plus que le reste du film peine à le sortir du lot malgré une production solide. Petit Scarabée va devoir retourner à l'entraînement...

On a aimé

  • Quelques bonnes idées
  • Une production solide
  • Les scènes d'action

On a moins bien aimé

  • L'aspect comédie raté
  • Une intrigue trop classique
  • Un héros et sa famille peu attachants

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