Gore et cinéma amateur > Les premiers pas
En guise d’introduction
Le cinéma amateur à toujours eu une relation privilégiée avec ce genre bien particulier qu'est le cinéma gore. Pourquoi ? Bonne question !
Il n'y a pas de réponse formatée. Ceux qui n'aiment pas diront que le cinéma d'horreur et le gore en particulier sont des sous-genres qui ne nécessitent pas de grands moyens et surtout qui n'ont pas besoin d'un scénario fouillé ni d'acteurs "pro" pour faire leurs effets. Que tout se concentre sur le sang qui gicle, les chairs qui se déchirent, la bande son saturée des cris de la victime.
D'autres diront que le fantastique ou le gore reflètent souvent l'âge du réalisateur amateur, qu'il s'agit d'un cinéma de d'jeuns qui n'ont pas grand chose à dire, un cinéma immature. En somme, que c'est un cinéma facile.
Comme ils se trompent !
Le gore est un genre cinématographique viscéral, qui prend aux tripes (jeu de mot facile). Mais encore faut-il que le film soit suffisamment bien mis en scènes pour que derrière les effets chocs, transparaisse la créativité du réalisateur. Car finalement, une succession de scènes sanglantes sans queue ni tête n'ont jamais subjugué un spectateur plus de dix minutes. Et puis, avant tout, le gore c'est la possibilité de délirer à l'écran, de tenter des plans, des cadrages ou des mouvements de caméra qui ne pourraient pas trouver leur place partout.
Mais reprenons les choses au commencement.
Un peu d’histoire
Sans vouloir remonter aux calendes grecques, les premiers spectacles gore sont nés à Paris en 1897 avec l'ouverture du célèbre théâtre de la rue Chaptal : "Le Théâtre Du Grand Guignol".
Lorsque je dis ne pas vouloir remonter aux calendes grecques, c'est simplement pour ne pas avoir à parler des pièces antiques, où les meurtres sont souvent à la base ou jalonnent les grands classiques ("Œdipe Roi", "Prométhée enchaîné", "Médée"…)
J'entends des petites voix qui me susurrent désagréablement à l'oreille : "Et les combats de gladiateurs, les Chrétiens livrés aux fauves, les exécutions publiques du moyen-age ?".
Même s'il s'agit là d'événements organisés comme de véritables spectacles par les autorités de l'époque, il est impensable de faire l'amalgame entre réalité et fiction. Je ne vais pas gloser ici sur le pourquoi ou le comment qui fait que l'on puisse aimer les fictions sanguinolentes, ce n'est pas le sujet de ce dossier. Cependant, si vous êtes de ces personnes incapables de faire la différence entre les horreurs bien réelles du journal télévisé et celles créées avec un nécessaire recul par les cinéastes, alors je ne peux rien pour vous...
Revenons donc à la genèse du spectacle gore. "Le théâtre du Grand Guignol" disais-je. Inauguré en avril 1897, il donnait à voir des pièces qu'on pourrait curieusement qualifier de "sociales". Les thèmes collaient à l'actualité de l'époque, s'intéressant à la folie, la chirurgie, les tares et les vices de l'humanité, l'enfance mal traitée. L'affaire de "Jack l'éventreur", par exemple, fut pain béni pour ce genre de spectacle. Tous ces thèmes étaient traités de façon extrêmement simple, en visant un effet de terreur à grand renfort d'effets sanguinolents. Et très souvent il s'agissait de caricatures, où le comique et le grotesque partageaient l'affiche.
Comique et grotesque, ces deux genres ont toujours été fortement liés au gore jusqu'à aujourd'hui. Les exemples ne manquent pas et font partie des films cultes de l'amateur de gore : "Evil Dead II", "Street Trash", "Bad Taste", "Brain Dead", "Ré-animator"… La liste pourrait être très, très longue. Le public aime autant hurler de rire que de terreur, et de nombreux cinéastes préfèrent faire la part belle au burlesque pour dédramatiser l'action.
Mais puisque nous parlons de cinéma délaissons "Le Théâtre du Grand Guignol" pour entrer de plein pied dans le septième art.