Critique Kaamelott - Premier Volet #1 [2021]

En tant que fan, Kaamelott - Premier Volet est un film que l'on veut tellement adorer comme une sorte d'épiphanie sur grand écran de l'univers créé par Alexandre Astier. Malheureusement l'appréciation est un plat qui se mange sans sauce...

Pour rappel, Kaamelott est à l’origine une série TV inspirée des Légendes arthuriennes créée par Alexandre Astier diffusée sur M6 entre 2005 et 2009. Divisée en 6 saisons la série avait évolué entre un programme court de moins de 5 minutes par épisode à deux dernières saisons bien plus ambitieuses avec des épisodes de quasiment une heure. La dernière saison en 2009 avait laissé ses fans dans une grande attente puisque le roi Arthur avait quitté son royaume le laissant aux mains du traître Lancelot bien décidé à mettre en place une dictature traquant les alliés de de son ancien roi. Alexandre Astier ne cacha jamais son ambition de raconter la suite des aventures des chevaliers de la Table Ronde dans une trilogie au cinéma. Un projet qui se fit attendre à cause de conflits entre les ayant droits de la licence, d'autres projets accaparant Astier (comme ses films d’animation Astérix) ou encore la recherche compliquée de financements. Le film se tourne finalement en 2019 principalement en France (mais aussi en Oman) avec un budget confortable de plus de 15 millions d'euros produit par Regular Production associé à M6 qui assure la distribution. Comme à son habitude, Alexandre Astier scénarise, produit et réalise le film tout en en composant la musique. Le film devait sortir à l'été 2020 mais fut repoussé d'un an suite à la pandémie mondiale de Covid. La sortie durant l'été 2021 fut un triomphe classant le film 3ème au box-office français durant une année extrêmement difficile pour les cinémas. De quoi espérer l'arrivée de suites bien plus rapidement...

Le film se déroule dix ans après les événements de la série. Le Royaume de Logres est aux mains du tyrannique Lancelot du Lac (Thomas Cousseau) qui a pris le pouvoir après l'exil de l'ancien roi Arthur (Alexandre Astier). Lancelot a mis en place une dictature faisant la chasse aux anciens alliés d'Arthur lui étant restés fidèles. Mais ce qui le tracasse le plus c'est un retour éventuel de son ancien roi. Pour cela, il a totalement écrasé le royaume de taxes afin de payer des mercenaires Saxons. Ces derniers, menés par Horsa (Sting), en profitent pour agrandir leur influence tout en voulant acquérir des territoires. En parallèle, certains anciens chevaliers de la Table Ronde veulent mener une sorte de Résistance malheureusement peu efficace à l'image de Perceval (Franck Pitiot) et Karadoc (Jean-Christophe Hembert) oeuvrant dans un réseau souterrain. En parralèle, un chasseur de primes (Guillaume Gallienne) met la main sur le marchand d'esclaves Venec (Loïc Varraut) qui avait aidé le roi lors de son exil. Cette nouvelle piste va ainsi relancer la recherche d'Arthur qui semble pourtant tout faire pour qu'on l'oubli. Une situation que ses alliés comme ses ennemis ne peuvent accepter.

Autant crever l’abcès, le scénario de Kaamelott - Premier Volet souffre d'un réel problème de narration. Un problème se rapprochant un peu de celui du Réveil de la Force en 2015. Comment raconter dans un même film l'évolution d'un univers sur de nombreuses années tout en ayant une aventure bien centrée sur ses personnages ? Alexandre Astier tente du mieux qu'il peut pour concilier les deux mais cela ne fonctionne pas complètement. On a réellement du mal à comprendre la dictature de Lancelot et l'évolution du royaume de Logres ni comment fonctionne concrètement la Résistance. L'objectif semble surtout être de bien nous faire comprendre le camp des différents personnages. Astier souhaite aussi raconter la prise de conscience d'Arthur pour qu'il puisse reprendre la lutte en même temps que son trône. La bonne idée est souvent de faire découvrir à Arthur en même temps qu'aux spectateurs l'état de son royaume. Même si son revirement est amené par petites touches, il apparaît parfois forcé à l'image de ses différentes rencontres avec des personnages bien connus de la série. Le mélange entre l'état des lieux et l'évolution de son héros a du mal à prendre harmonieusement dans ce scénario. C'est avec une certaine ironie qu'on se dit qu'Alexandre Astier aurait pu bénéficier d'une saison supplémentaire pour pouvoir tout raconter correctement... De plus, il y a aussi de nombreux flash-backs sur la jeunesse d'Arthur au sein des légions romaines dont on peine à comprendre l'intérêt... Au moins on se dit que les bases sont suffisamment posées pour la suite que l'on attend évidement.

Malgré les griefs évoqués plus haut, il faut quand même avouer que Kaamelott est un film plaisant. Un divertissement efficace qui réussit souvent à nous faire sourire tant par son humour que parce qu'on est simplement contents de retrouver cet univers et ces personnages. Le côté fan servive fonctionne à plein régime tant Alexandre Astier a réussi à restituer l'ADN de sa série sur grand écran. Il a créé tant de personnages cultes qu'on est réellement heureux de retrouver, outre Arthur et Lancelot, Guenièvre (Anne Girouard), Léodagan (Lionnel Astier), Dame Séli (Joelle Sevilla), Karadoc, Perceval, Kadoc (Brice Fournier), Merlin (Jacques Chambon), Dagonet (Antoine De Caunes), Le Roi Loth (François Rollin) ou encore Mevanwi (Caroline Ferrus)... Et bien d'autres plus secondaires voire tertiaires même si on doit reconnaître que certains font une apparition un peu forcée n'apportant pas grand chose au récit telle que la Dame du Lac (Audrey Fleurot) par exemple. On prend néanmoins plaisir à redécouvrir ces personnages tant aimés en voyant ce qu'ils sont devenus. L'humour est aussi très efficace à commencer par la direction artistique complètement loufoque en ce qui concerne les costumes. Certains sont vraiment hilarants pouvant parfois servir le récit comme le « nouveau » roi Lancelot dans un costume littéralement trop grand pour lui. Mais ce qui fait la qualité de la saga reste évidement l'excellence des dialogues à commencer par les pitreries de Perceval et Karadoc et d'autres où le comique de situation fonctionne admirablement. Citons notamment la scène de la prison d'une efficacité redoutable grâce au rythme des dialogues mais aussi leur musicalité sans oublier l'interprétation des comédiens. Kaamelott - Premier Volet étant avant-tout une comédie, le film réussit à nous faire rire, souvent.

L'objectif d'Alexandre Astier était aussi de casser le cadre contraignant de la télévision afin d'offrir une aventure plus ambitieuse sur grand écran. Et on est rapidement frappé par cette envie dans un premier tiers qui multiplie les lieux et les ambiances passant de la mer au désert puis aux plaines enneigées du Royaume de Logres. Cela permet au film d'avoir un côté épique vraiment plaisant. Astier s'est fait plaisir tissant de belles images où l'immensité du cadre écrase ses personnages. C'est plus dans les quelques scènes d'action que l'on est déçu montrant un Astier bien moins à l'aise dans ce registre. Enfin, on sent quand même le manque de moyens dans beaucoup de passages avec des décors manquant cruellement de vie notamment un château de Kaamelott globalement décevant. Comme il a été dit, c'est au niveau de la comédie pure que Astier démontre des réels talents de metteur en scène comme de directeur d'acteurs. On retrouve avec plaisir le rythme et l’efficacité de cet humour si particulier rendant la saga si originale au sein de l'humour français. Il faut dire que le réalisateur sait utiliser les comédiens sous ses ordres à commencer par lui-même montrant bien le côté renfermé et désabusé de son personnage pourtant capable de laisser éclater sa colère. On se régale évidemment quand on retrouve la connerie crasse de Franck Pitiot et Jean-Christophe Hembert tellement parfaits pour jouer les bouffons Perceval et Karadoc. On apprécie aussi les gueulantes toutes en verbe de Joelle Sevilla en Dame Séli où le côté pince-sans-rire désabusé de Lionnel Astier en Léodagan. Sans oublier le mélange de fragilité et de force que Anne Girouard insuffle en Guenièvre. Les petits nouveaux comme Guillaume Gallienne ou Clovis Cornillac s'intègrent parfaitement et les habitués Christian Clavier, Antoine De Caunes ou encore François Rollin sont toujours aussi efficaces. Au final on citera un Alain Chabat réellement excellent en Duc d'Aquitaine pas si ingénu que cela...