Critique Le guérisseur de cathédrales [1977]
Avis critique rédigé par Manu B. le mercredi 8 novembre 2006 à 07h34
Un roman bien étrange
"Son père avait soigné les poteries avant lui. Aussi guérissait-il n'importe quelle céramique réchappée du passé, le temps d'avant la guerre où les objets n'étaient pas encore tous faits de plastique..."
La Terre est moribonde. Le travail y est difficile, non pas au sens physique du terme, mais les gens s'y ennuient. A mourir. Joe Farnwright est un guérisseur de poteries; les vases, céramiques et autres n'ont aucun secret pour lui, une aptitude héritée de son père. Sauf qu'aujourd'hui il n'y a plus de travail pour lui. Cela fait sept mois qu'il n'a plus réparé un de ces antiques ornements. Le doute puis la dépression s'est emparée de lui, d'autant plus que sa compagne s'est séparée de lui il y a peu. Ne reste que le Jeu, un jeu où il faut découvrir le sens d'une définition à partir d'une traduction bancale. Un jeu stupide qui occupe. Tout cela va être balayé dans une bourrasque lorsqu'il reçoit ce message pour une étrange commande...
Ecrit en 1969, dans la période faste de Philip K. Dick (Blade runner, Ubik, Au bout du labyrinthe), ce roman a aussi été écrit pendant les années noires du romancier; sa femme vient de le quitter, les critiques fusent et le succès n'est pas vraiment au rendez-vous. L'auteur est en plein doute. Le monde semble être ligué contre lui, et ressemble à un calvaire quotidien. Ceci peut expliquer comment est venu l'idée de ce roman se déroulant dans un monde tyrannique, un monde découlant du ressenti de l'auteur. Ce Joe est bien évidemment Philip, un Joe dont l'ex-femme est à l'image de la sienne: calculatrice mais dont il recherche tout de même les conseils lorsqu'il a une décision à prendre. C'est une autre mauvaise dépendance, avec les amphétamines.
Or il va devoir trouver le chemin de la rédemption, ou plutôt de son aboutissement ultime, grâce à ce message venu des étoiles. Comme dans le dieu venu du centaure, la réponse vient probablement de là-bas, sauf qu'ici au contraire, il s'agit d'un salut: le héros va pouvoir enfin s'accomplir et retrouver confiance en lui. Nul mal ne va venir de l'au-delà, mais il en provient une entité omnipotente, une déité, un Faust d'un autre genre. Voilà un thème qui n'est pas nouveau puisqu'il est partie intégrante de nombreux romans de Philip K. Dick.
La différence tient dans le lien hautement autobiographique entre l'oeuvre et son auteur, entre la créature et son créateur. Ce lien, ténu au début de l'oeuvre de l'écrivain, va aller croissant, comme on l'aura lu dans son ultime trilogie divine (Radio libre albemuth, SIVA, l'invasion divine et la transmigration de Timothy Archer) plus tard, où ses interrogations sur sa Foi trouveront une réponse à ses yeux. D'ailleurs, les conversations théologiques sont déjà bien plus présentes ici, à l'instar du dieu venu du centaure. La différence tient dans le ton du roman: le guérisseur de cathédrales est extrêmement pessimiste, on y devine facilement l'état dépressif de l'auteur lors de son écriture. Les passages se déroulant dans les abysses sont d'une grande noirceur, dont la scène où le héros rencontre son cadavre -il sait alors que son sort est scellé-. Tout indique qu'il n'y a aucun échappatoire à cette fin proche, le livre des Kalentes ayant inéluctablement choisi pour lui. Dick est dos au mur. Saura-t-il remonter la pente ?
Peut-être P. K. Dick aura exorcisé ses démons et aura t-il pu remonter la pente grâce à ce roman ? Toujours est-il qu'il a par la suite écrit d'autres romans beaucoup plus optimistes. Quoique...
La conclusion de Manu B. à propos du Roman : Le guérisseur de cathédrales [1977]
Le Guérisseur de cathédrales est un roman méconnu et troublant, typique des univers de Philip K. Dick mais empreint d'une grande tristesse et d'une grande détresse. A découvrir.
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