Critique L'orbite déchiquetée [1971]

Avis critique rédigé par Manu B. le mardi 19 décembre 2006 à 13h30

L'orbite déchiquetée

"UN
Mettez vous à ma place.
1+1
DEUX
Suite du chapitre un.
+1..."

Le monde en 2014 comme vous y étiez. New York est minée par la haine raciale entre Noirs et Blancs, les ghettos sont enclavés où la mixité dérange, voire est combattue par des groupuscules extrémistes. La Gottschalk attise cette haine, pour pouvoir écouler sa marchandise: les armes et la protection contre les armes, elle harangue les pauvres victimes de crimes pour s'armer. Dans cette ville, Flamen est un producteur d'émission qui dénonce les magouilles, Reedeth est un psychologue, Lyla Clay est une Pythonisse (une sorte d'oracle sous l'effet de drogues), Dan est son mackero, Harry Madison est enfermé dans un hôpital psychiatrique sans aucune raison et Conroy le sociologue vient faire un tour du côté de Big Apple. Destins croisés...
La tétralogie noire est une série de romans écrits par John Brunner, entre 1968 et 1974. Tous à Zanzibar, l'orbite déchiquetée, le troupeau aveugle et sur l'onde de choc sont ces quatre romans, devenus cultes aujourd'hui pour un certain nombre de lecteurs. Pourquoi cultes ? Pour les capacités d'imagination et d'anticipation de l'auteur des ces quatre romans phares des années 70. En effet, c'est dans ces romans que John Brunner imagine un futur où la surpopulation, les dérives génétiques, les hackers informatiques, et le clivage racial entre Noirs et Blancs créent des tensions incontrôlables et catastrophiques. Ces romans sont donc au fond une profonde étude sociologique du monde des années 70 et une prospective à court terme dans le futur.
L'orbite déchiquetée est le deuxième roman de cette tétralogie ambitieuse visionnaire du futur (notre présent). Il y est question d'enclaves Noires au milieu d'un pays où les Blancs sont majoritaires. Or, la haine entre ces deux cultures ne peut exister que si des injustices existent, que si les différences sont prononcées. Dès lors, les gens prennent peur, s'enferment dans leur foyer, mais aussi et surtout dans leurs préjugés. Le problème est que cette tension est parfois provoquée artificiellement par un agent extérieur dont l'intention est souvent vicieuse. C'est ce mécanisme que tente de nous montrer John Brunner. En même temps, il fait place à des réflexions sur la montée des courants irrationnels, avec notamment ces "pythonisses", et la formation de gangs comme la Gottschalk qui est la plus justement décrite.
La pègre étant de temps en temps liée au milieu des médias, c'est donc sur plusieurs niveaux que se déroule ce récit. Sur ce thème des médias et des races, on ne peut que faire un rapprochement entre ce roman et Jack Barron et l'éternité de Norman Spinrad, écrit à peu près en même temps (1969), mais dont le style, la puissance évocatrice est décuplée en comparaison avec l'orbite déchiquetée. Car entre nous, John Brunner est un auteur difficile à lire, notamment dans les premières centaines de pages, car il a tendance à mettre en scène tant de personnages différents qu'il faut parfois faire de fréquents retours en arrière pour comprendre de quoi ou qui il parle. Cette première muraille semble infranchissable pour certains lecteurs. Heureusement le lecteur patient est récompensé puisque c'est le tiers du roman que tout se réunit, rendant l'histoire enfin passionnante à lire. On regrettera que celle-ci se termine trop bien et de manière un trop alambiquée.
Un roman à lire avec courage.

La conclusion de à propos du Roman : L'orbite déchiquetée [1971]

Auteur Manu B.
80

L'orbite déchiquetée est un roman à rapprocher de Jack Barron et l'éternité puisqu'il traite lui aussi des relations entre Noirs et Blancs dans un climat extrêmement tendu. Entre dénonciation sociale et satire, John Brunner nous emmène dans un futur armé et proche, si proche...
SF British award en 1971.

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