Critique Roi du matin, reine du jour [2009]
Avis critique rédigé par Manu B. le lundi 8 décembre 2008 à 13h45
Craigdarragh
"J'aimerais que revienne le temps où nous étions
Toi et moi maintes choses, ô mon bel Apollon!
Ecailles miroitantes, plumage scientillant,
Deux noisetiers dressés sur le bord d'un torrent
Dans lequel nos fruits tombent, quand l'automne est venu,
Une truite ou un cerf, voire un cygne sauvage,
Un aigle qui glatit au-dessus des alpages..."
En 1913, en Irlande, la quiétude qui habite la maison des Desmonds se trouble. Emily est une adolescente qui se sent prisonnière de la pension pour jeunes filles qu'elle fréquente et confie ses états d'âme à son journal intime pendant que son père, astronome, vient d'identifier un phénomène inhabituel relatif à la comète de Bell. Malheureusement, les maux à l'âme de la jeune fille ne trouvent aucune place dans le projet de son père, occupé à construire un édifice de communication avec la comète qu’il suppose artificielle. Le fossé de l'incompréhension se creuse lorsque la jeune fille croise des êtres surnaturels dans les bois environnant le domaine familial...
Paru Outre-Manche il y a déjà dix-sept ans, on peut se demander pourquoi il n'a jamais été traduit en France. Ce petit bijou l'est enfin dans la collection Lunes d'encre des éditions Denoël.
Ian Mc Donald est connu depuis ses premiers romans, remarqués dès leur sortie, dont desolation road, qui a raflé le prix Locus du premier roman en 1988. La même année voit paraître état de rêve, dont fait partie la nouvelle roi du matin, reine d'un jour, novellisée trois ans plus tard. Il a reçu de nombreux prix dont le British Science Fiction Award pour ses nouvelles et pour ses romans River of Gods en 2004 et Brasyl en 2007. Ian Mc Donald est considéré par beaucoup comme un écrivain talentueux.
Ce roman est un fix-up de trois novellas (et d'un court intermède) dont le fil rouge est Emily Desmond, un lien fort et pourtant ténu qui situe le lecteur dans la région de Dublin, baignant dans le folklore Celte et les traditions païennes.
L'auteur use et abuse judicieusement des contes locaux tout en misant sur des figures et références historiques. Ainsi, William Butler Yeats entre en scène dans la première partie, tandis que la seconde et la troisième parties s'inspirent des récits de James Joyce ou bien Samuel Becket (dont la fameuse pièce En attendant Goddo), qui leur donne une touche d'authenticité. Le gros travail de l'auteur a été de s'appliquer à coller le style à l'époque. La première partie, se situant en 1913, est, par exemple, uniquement constituée par des extraits du journal intime d'Emily, de lettres de son père et de correspondances épiscopales entre de tierces parties, dans le style aristocratique d'héritage Victorien, à comparer avec le langage de charretier de Jessica dans la seconde partie (dont l'essentiel se situe dans les années trente), et au langage moderne (fin 1989, a priori) d'Enye de la dernière partie.
McDonald s'adapte sans la moindre difficulté à l'époque et aux moeurs de ses personnages. C'est en quelque sorte un voyage temporel, spatial (restreint) et social, dans lequel nous invite l'auteur britannique.
Ce voyage affecte non seulement les protagonistes principaux (Emily, Jessica et Enye) mais aussi les personnages fantastiques qui les accompagnent, ceux de l'autre monde - celui qu'Emily appelle Outremonde -. La part de fantasy faisant partie intégrante de l'imagination de l'héroïne, le contexte merveilleux des manifestations féériques s'adapte à l'époque de cette même héroïne. Ainsi, Emily et son esprit romantique voit des fées et des créatures mythologiques, Jessica et son esprit plus pragmatique voit des choses plus réalistes et Enye voit des guerriers monstrueux. Il y a comme... réduction du champ des probabilités quantiques selon l'observatrice. Chacune crée son propre univers, selon son histoire et sa sensibilité.
Ce roman n'est, en fin de compte, peut-être pas de la fantasy.
Même sans tenir compte des questions de fond, le roman est passionnant, parce que les histoires le sont, parce que les héroïnes le sont, parce que l'auteur alterne les styles avec dextérité et parce que l'atmosphère y est particulièrement bien rendue (on passe de celle du labyrinthe de Pan à celle des mangas). Il était temps qu'un tel texte soit traduit chez nous.
La conclusion de Manu B. à propos du Roman : Roi du matin, reine du jour [2009]
Ian McDonald est un vrai conteur, dont le talent rejaillit merveilleusement à travers cette fable Irlandaise. Construite sur les folklores Celtes et le paganisme, elle est surtout conduite avec brio. Une oeuvre à lire de toute urgence.
Prix Philip K. Dick 1992
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