Auteur Autiste en SF et burlesque
Adaptation théatrale d'une oeuvre pas banale
Une compagnie strasbourgeoise présente jusqu'au 23 mai "Planète Jeumobil", la première pièce de théâtre adaptée des écrits d'un autiste aux allures d'apocalypse futuriste et ludique.
Entre science-fiction et burlesque, la mise en scène est une adaptation de "Planète Jeumobil - Fin du monde des Jeumobils" (non publié à ce jour) et de "Qui j'aurai été - Journal d'un adolescent autiste", écrits par Joffrey Bouissac, un Alsacien de 23 ans qui a été le premier autiste français à avoir écrit et publié son histoire.
Plus qu'une autobiographie, "Qui j'aurai été - Journal d'un adolescent autiste" a tenu pour lui le rôle d'une "grosse thérapie", comme il le souligne. Désireux de sortir de son monde intérieur, le monde des Jeumobils (qui renvoient à une marque de figurines articulées bien connues des enfants) qui le "rendait nerveux, le faisait crier et parler tout seul à longueur de journée", Joffrey Bouissac a écrit la fin d'un univers, sous forme de journaux mensuels.
Ces journaux, rédigés au cours de l'année 1999, ont été mis en scène par Christophe Greilsammer de la Compagnie de l'Astrolabe avec le soutien des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg et du théâtre du Maillon.
An 3.998: sur un plateau de TV, quatre journalistes en combinaisons futuristes relatent, mois après mois, la dernière année des Jeumobils.
Cataclysmes, catastrophes climatiques, épidémies ravageuses et guerre en tous genres s'enchaînent: jusqu'à leur dernier jour, les journalistes maintiennent leur ligne éditoriale en informant avec neutralité et objectivité. Ils décrivent avec une précision quasi scientifique et un détachement apparent des catastrophes étrangement réelles.
Loin de céder à la tentation de la tragédie, Christophe Greilsammer a fait le pari du burlesque et de l'ironie: "Les journalistes abordent cette fin du monde dans l'enthousiasme, avec énergie, impatients de passer à autre chose, et attentifs à ne pas rater leur sortie", explique-t-il.
Sur scène, quatre écrans de télévision superposés reproduisent en direct des images filmées sur le plateau et retravaillées à coup de couleurs saturées et de larsens, accentuant ainsi l'aspect irréel de jouets pour enfants des personnages.
Bertrand Gondouin réalise sur scène un savant mixage vidéo à partir des images prises sur le plateau et d'extraits d'émissions de chaînes de télé du monde entier également retravaillées. Une performance qui intensifie l'impression que nous voyons à travers les yeux d'un autre.
Si Joffrey Bouissac a décidé de faire disparaître cette planète et ses habitants, c'est parce qu'il se jugeait "trop grand pour y jouer". A travers ses écrits, il nous entraîne dans le monde qui était le sien avant qu'il n'entame le processus d'écriture. Cette apocalypse revêt tout à coup à ses yeux et aux nôtres la forme d'une renaissance, d'une accession à notre monde, comme s'il devenait l'auteur de ses propres jours.
Parallèlement à l'adaptation théâtrale, la création d'une résidence d'artistes au sein du service psychothérapeutique des Hôpitaux Universitaires de Strasbourg va permettre aux enfants autistes de s'ouvrir aux activités culturelles et à l'écriture, à partir d'ateliers basés sur les écrits de Joffrey Bouissac.
"Planète Jeumobil" par la Compagnie de l'Astrolabe. Jusqu'au 23 mai. Laiterie/Hall des Chars, Strasbourg.
"Qui j'aurai été, journal d'un adolescent autiste" de Joffrey Bouissac.
Editions d'Alsace, 160 pages, 12 euros (sur commande auprès d'Autisme Alsace, 1 rue de la paix, 67230 Semersheim)
Publié le jeudi 20 mai 2004 à 16h33
Source : AFP
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