Critique Angel [1999]

A force d'enchaîner les saisons, une série a normalement réussi à se constituer une base de fans, des irréductibles qui seront toujours présents devant le poste et qu'on va fidéliser le plus possible à l'image de la saison 4 de Angel.

Diffusée entre octobre 2002 et mai 2003, la quatrième saison de Angel, spni-off de Buffy contre les Vampires qui connaissait en parallèle sa septième et dernière saison, connaît quelques chamboulements en interne. Les deux créateurs de la série sont en effet de moins en moins impliqués. David Greenwalt est parti créer la série Miracles ne gardant qu'un rôle de producteur consultant. Quant à Joss Whedon, il se concentre plus sur la fin de Buffy tout en démarrant une nouvelle série, Firefly. Il est néanmoins présent pour superviser l'ensemble tout en scénarisant et réalisant un épisode (le 6). Si les deux hommes avaient laissé la série dans les mains de Tim Minear pour sa saison 3, ce dernier part aussi s'occuper de Firefly revenant juste le temps du dernier épisode qu'il scénarise et réalise tout en ayant un rôle de supervision. Au début de la saison 4, c'est David Simkins qui devient showrunner mais il est remplacé au bout de trois mois à cause de l'inévitable « différent créatif ». Le poste échoit donc à Jeffrey Bell qui s'est fait un nom en tant que scénariste sur la série X-Files. Côté casting principal, l'équipe reste la même tout en accueillant d'abord le jeune Vincent Kartheiser arrivé en fin de saison dernière tandis que Andy Hallett intègre enfin le générique après avoir été un acteur récurrent depuis la seconde saison. Il faut aussi noter que cette saison semble avoir été marquée par le comportement toxique de Joss Whedon envers Charisma Carpenter notamment au sujet de sa grossesse finalement intégrée dans l'histoire mais lui coûtant sa place dans la série...

La saison ne démarre pas sous les meilleurs auspices pour les héros puisque le gentil vampire Angel (David Boreanaz) gît enfermé au fond du Pacifique à cause des machinations de son fils Connor (Vincent Kartheiser) ayant grandi dans une dimension infernale. Il reste pourtant aux côtés de Fred (Amy Acker) et Gunn (J. August Richards) afin de lutter contre les vampires et autres démons à Los Angels. D'autant plus que Cordelia (Charisma Carpenter) est aussi portée disparue car ses amis ne savent pas qu'on lui a accordé le rang d'être suprême. Néanmoins, l'ancien allié considéré comme un traître, Wesley (Alexis Denisof) réussit à retrouver Angel et le libérer. Il va enfin pouvoir rétablir la vérité au sujet de Connor tout en essayant de se rapprocher de lui. L'équipe reconstituée va se mettre à chercher Cordelia mais aussi à rapatrier le démon Lorne (Andy Hallett) parti faire carrière à Las Vegas. C'est à ce moment là que Cordelia réapparaît malheureusement complètement amnésique même si elle sa présence semble annoncer l'arrivée d'une bête (Vladimir Kulich) démoniaque surpuissante capable de plonger Los Angeles dans une apocalypse...

Ce qui est marquant en premier lieu dans cette quatrième saison c'est que la série change de structure en abandonnant l'idée d'un « monstre de la semaine » avec un fil rouge qui était surtout en arrière-plan avant de devenir plus conséquant dans les derniers épisodes. Le récit est ici plus feuilletonnesque puisque du début à la fin, on suit tout ce qui à trait à la reformation de l'équipe, le retour de Cordelia et la menace qui l'accompagne. Si les « grands méchants » de la saison s'enchaînent, ils restent néanmoins liés par la même histoire. Il existe quand même des intrigues secondaires notamment celle assez sympathique autour de Gwen (Alexa Davalos), voleuse aux pouvoirs électriques (épisodes 2,9 et 16). Néanmoins cette volonté de raconter une histoire au long cours apporte du positif comme du négatif. Déjà, la série semble vouloir absolument s'adresser aux fans qui suivent la série depuis le début permettant de ne pas perdre de temps et d'aller souvent à l'essentiel. Cela permet aussi de rendre plus consistants les enjeux entre les personnages allant dans le dramatique. Mais ce qui fait le plus plaisir, c'est que la série s'accorde enfin ce qu'on attendait tous : le retour de Angelus (ep. 11 à 15) à savoir Angel sans son âme. Un arc qui entre directement dans les meilleurs moments de la série. Le négatif étant que les néophytes vont se perdre et qu'on sent que le nombre important de scénaristes empêche de proposer une longue intrigue bien ficelée sur 22 épisodes.

Alors certes, la série Angel est dans le domaine du fantastique mais il va falloir en avaler des couleuvres pour accepter le nombre de facilités de scénario et de deus ex machina qui pullulent surtout dans les derniers épisodes. Mais ce qu'on regrette le plus, ce sont des histoires qui manquent un peu de profondeur, loin de ce que la série avait réussi à faire sur ses premières saisons en abordant des thèmes assez mature. Il faut finalement attendre l'arrivée de la dernière méchante (Gina Torres) pour enfin aborder de réels sous-textes (ép. 17 à 21). En effet, la fin de la saison propose d'abord une charge importante contre les sectes pouvant asservir des esprits rendus faibles tout en étant capables de grandes violences. Ensuite, la série porte la réflexion sur le libre-arbitre qui peut s'avérer dispensable si cela permet d'apporter une paix mondiale quel qu’en soit le prix... De bonnes idées intégrées à des récits mélangeant épouvante, horreur, action, humour et mélodramatique. Le tout servi dans une série à qui se déguste comme de la junk-food, on sait que ce n'est clairement pas ce qui se fait mieux, mais cela nous contente sans trop d'exigence. Notons par ailleurs que, contrairement à la saison 3, la série renoue avec Buffy contre les Vampires voyant notamment le retour de Faith (Eliza Dushku, ép. 13 à 15) et Willow (Alyson Hannigan, ép. 15).

On ne va pas se mentir, la série accuse ses 20 ans malgré la qualité de sa production. Cela se ressent surtout dans les effets spéciaux numériques qui jurent pas mal aujourd'hui. Mais on reste néanmoins toujours aussi agréablement surpris par la qualité des effets de maquillage qui fonctionnent magistralement. Les vampires, démons et autres monstres sont toujours aussi bien faits nourrissant notre faim de fantastique. Comme pour les saisons précédentes, on ne regarde clairement pas Angel pour la qualité de ses réalisations où des réalisateurs de série assez anonymes se relaient. On peut néanmoins reconnaître que l'épisode 6 écrit et réalisé par Joss Whedon est un des meilleurs. Au rayon des anecdotes, on peut citer que Sean Astin a réalisé l'épisode 11. Pour ce qui est des acteurs, David Boreanaz et Charisma Carpenter sont toujours aussi limités même si le premier est tellement meilleur en Angelus et que la seconde n'a pas été aidée par sa grossesse et le calvaire qu'elle semblait vivre. Amy Acker, J. August Richards et Vincent Kartheiser font le job tandis que Alexis Denisof s'avère bien plus convaincant avec un personnage plus sérieux et torturé gardant une bienveillance au fond du regard. Tandis que Andy Hallett reste toujours aussi charmant et rafraîchissant dans ses interventions.