Critique Une Sirène à Paris [2020]

Avis critique rédigé par Bastien L. le mercredi 25 septembre 2024 à 09h00

La Petite Sirène

On le sait, le cinéma français a beaucoup de mal à pleinement embrasser le genre fantastique. Il est pourtant souvent là mais trop souvent comme étant accessoire car noyé sous les deux genres très populaires que sont les comédies ou les drames à l'image d'Une Sirène à Paris.

Cela fait environ 20 ans que Mathias Malzieu s'est fait connaître du grand public d'abord en tant que membre fondateur du groupe de rock français Dionysos avant de devenir écrivain. Il écrit notamment La mécanique du cœur en 2005 qu'il adapte ensuite au cinéma en 2014, avec le titre Jack et la mécanique du cœur, sous forme d'un film d'animation qu'il co-réalise tout en donnant sa voix au personnage principal. Le résultat fut un film très sympathique qui malheureusement ne laissa pas une grande trace dans les mémoires. Mathias Malzieu décide néanmoins de poursuivre sa volonté d'adapter ses propres œuvres au cinéma, ce qu'il fait donc avec Une Sirène à Paris. Il s'agit une nouvelle fois d'un roman, éponyme, dont l'idée germa en 2016 lors des crues que Paris connut avec la Seine. Il imagina ainsi l'arrivée d'une sirène dans la capitale dans un livre qui parut en 2019. L'adaptation en prise de vues réelles s'enchaîna rapidement puisque le film fut tourné dans la seconde moitié de l'année 2019 entre Paris et la Macédoine du Nord. Malzieu se chargea seul de la mise en scène entouré d'acteurs expérimentés tels que Nicolas Duvauchelle, Rossy de Palma, Tcheky Karyo ou Romane Bohringer entourant la jeune Marilyn Lima incarnant la sirène. Produit par différentes sociétés, le film fut distribué par EuropaCorp en France et par Sony à l'international pour une sortie très compliquée puisque programmée en mars 2020 juste avant le premier gros confinement suite à la pandémie du Covid-19. Une sortie a été retentée trois mois plus tard mais l’œuvre resta assez inaperçue étant même assez oubliée quelques années après. Une situation que le film ne doit malheureusement pas seulement à cause de son contexte de sortie.

Se déroulant de nos jours, Une Sirène à Paris nous présente Gaspard (Nicolas Duvauchelle) qui est un chanteur et fils du propriétaire (Tcheky Karyo) de la péniche, le Flower Burger. Ce restaurant cache en son sein une sorte de club où se produisent différents artistes dont Gaspard qui reste un doux-rêveur voulant à tout prix conserver l'esprit du mouvement artistique des Surprisiers qui ont fondé ce lieu. Alors que d'étranges disparitions ont lieu autour de la péniche avec des hommes s'enfonçant volontairement dans la Seine, Gaspard apprend que son père va vendre le lieu car il a du mal à rentrer dans ses frais. C'est après une dispute que Gaspard découvre une sirène (Marilyn Lima) inanimée et blessée qu'il décide d'amener aux urgences. Alors qu'il tente de la faire admettre, un urgentiste (Alexis Michalik) est attirée par la sirène qui lui fait entendre son chant ayant malheureusement le pouvoir de littéralement lui faire exploser le cœur d'extase. L'homme va succomber dans les bras de sa femme Milena (Romane Bohringer), elle aussi urgentiste, tandis que Gaspard ramène la sirène chez lui par dépit. Il va donc l'installer dans son bain et la soigner tandis que cette dernière va tenter de le briser avec son chant. Néanmoins, Gaspard a eu tellement de fois le cœur brisé qu'il reste insensible. Il va donc devoir gérer cette créature étrange tout en évitant les questions de voisine Rossy (Rossy de Palma) aussi bienveillante qu'envahissante tandis que Milena se lance à la poursuite de ce qui a tué l'homme de sa vie...

Le principal problème d'Une Sirène à Paris est qu'il s'agit d'un film très inégal dans tous les compartiments. A commencer par un scénario dont il faut vite accepter qu'il s'agit d'un conte fantastique où la logique est à mettre de côté. Alors ce n'est généralement pas un problème en soi sauf que ce manque de logique peut parfois nous sortir du film car on peut avoir du mal à comprendre certains enchaînements comme trouver quelques péripéties un peu forcées. Pour ce qui est de la structure du scénario, il faut savoir que Mathias Malzieu cite deux principales influences : Edward aux mains d'argent de Tim Burton ainsi que E.T. de Steven Spielberg ce qui transparaît assez franchement à l'écran. On a bien ce mélange d'amour impossible avec une être inadaptée dans un monde assez réaliste comme le fait qu'il faudra la rendre à son monde d'origine. Lula est ainsi la créature étrange aussi dangereuse qu'envoûtante que notre héros va devoir protéger tout en en tombant amoureux. Le problème étant qu'on ne ressent jamais réellement la menace qui pèse sur Lula car seule Milena est à sa poursuite alors que la presse semble connaître son existence... De fait, toute la sous-intrigue autour de Milena a du mal à se justifier pleinement dans l'histoire d'amour impossible entre Gaspard et Lula qui offre par ailleurs ses plus beaux moments au film.

Une Sirène à Paris est indubitablement un film de Mathias Malzieu car on y retrouve cette idée d'amour impossible et de cœur brisé déjà au cœur de Jack et la mécanique du cœur. L'écrivain plonge une nouvelle fois le fantastique au sein de sentiments purement humains et universels avec une ode à l'amour envers qui il ne faut jamais perdre espoir malgré les dangers qu'il représente. Cela s'accompagne aussi d'une poésie du quotidien où la bizarrerie peut surgir des endroits les plus quelconques. Malzieu tisse ainsi un univers à la croisé de Boris Vian comme de Tim Burton qui fonctionne très bien par moments avec quelques passages poétiques assez captivants lors des surprises de Gaspard pour rendre heureuse Lula. Il y a même quelques passages utilisant des décors et des matières que ne renierait pas Michel Gondry. Il reste donc dommage que cette ambiance rêveuse ne soit pas plus constante dans le film qui s'oblige à rester terre-à-terre via la quête de Milena. On aurait aussi aimé en savoir plus sur les Suprisiers nés pendant l'Occupation ou sur l'univers des sirènes... Malheureusement, le fantastique reste trop timide car Malzieu voulait plus faire un film réaliste avec une sirène... On peut néanmoins retenir la photographie jouant plutôt bien sur les ambiances aurore/crépuscule ainsi que sur la musique efficace afin de démontrer la bonne tenue artistique du film.

Comme dit plus haut, le film est inégal jusque dans sa réalisation. En effet, Mathias Malzieu maîtrise parfaitement les moments poétiques du film, les ambiances romantiques suspendues dans le temps fonctionnent très bien comme les passages musicaux ou la découverte de l'appartement très particulier de Gaspard. Malheureusement, Malzieu s'autorise parfois quelques effets de style assez grotesques qui peinent à convaincre comme des ralentis, des pauses dans l'action ou un montage trop haché... On le sent aussi moins à l'aise sur les scènes d'exposition ou celle plus dramatiques comme sur l'humour qui manque un peu de panache. On peut aussi constater qu'il n'est pas le meilleur directeur d'acteurs qui soit. Pas grand chose à dire sur Nicolas Duvauchelle (A l'intérieur, Comme des frères...) qui reste fidèle à lui-même pour incarner un homme assez mystérieux s'ouvrant peu à peu tout en démontrant qu'il est capable de comédie comme de fantaisie dans un genre de rôle qu'on lui offre peu. Face à lui, Marilyn Lima (Bang Gang, Skam...) souffle le chaud et le froid ayant du mal à rendre son personnage de sirène inquiétant ou mystérieux en étant assez plate. Elle se révèle plus convaincante dans les sentiments positifs de son personnage dont elle gère bien la gestuelle en étant constamment en costume. Par ailleurs, cette transformation en sirène est plutôt réussie même si le film reste avare en plan d'ensemble à ce niveau. Enfin, le métrage peut compter sur la qualité d'acteurs de Tcheky Karyo (Blueberry, l'expérience secrète, Kaamelott...) charismatique en père fantasque et aimant, de Rossy de Palma (Action mutante, Jack et la mécanique du cœur...) parfaite en voisine un brin cinglée à la verve captivante et de Romane Bohringer (Kamikaze, Le petit Poucet...) en femme meurtrie comme revancharde.

La conclusion de à propos du Film : Une Sirène à Paris [2020]

Auteur Bastien L.
60

Une Sirène à Paris est un conte fantastique qui n'arrive pas à pleinement convaincre. On est pourtant assez enchanté de l'univers proposé par Mathias Malzieu, sorte de fusion entre Boris Vian et Tim Burton, offrant de beaux moments poétiques à travers cet amour impossible entre une sirène et un homme au cœur brisé. Néanmoins, le scénario n'arrive pas à tenir la distance et la réalisation, comme les interprétations sont trop inégales.

On a aimé

  • L'univers de Mathias Malzieu
  • De beaux moments poétiques
  • La qualité de la production

On a moins bien aimé

  • Un scénario qui hésite trop entre réaliste et fantastique
  • Des effets de style peu convaincants
  • Des comédiens inégaux

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