Critique Les Nuits rouges du bourreau de jade [2011]
Avis critique rédigé par Vincent L. le mercredi 20 avril 2011 à 10h20
Un grand potentiel gaché...
Français d'origine, Julien Carbon et Laurent Courtiaud ont fait leur premières armes au sein de l'industrie cinématographique de Hong-Kong en scénarisant Running Out of Time, pour Johnnie To, et Black Mask 2, pour Tsui Hark. Commencer une carrière en travaillant avec deux légendes du cinéma chinois, voilà de quoi attirer les projecteurs sur soi, et ce d'autant plus lorsque l'on passe derrière la caméra pour signer un premier long-métrage. C'est donc avec une certaine curiosité que nous avons découvert Les nuits rouges du bourreau de jade, intrigué de savoir ce que les deux réalisateurs avaient pu retenir et assimiler de leur collaboration avec deux maîtres ; la chose était d'autant plus singulière que le film bénéficiait d'une affiche surprenante, avec un titre à rallonge possédant un petit je ne sais quoi de très intrigant (et plus attractif que le très bateau Red Nights destiné à l'exportation), et réunissant au sein d'un même film deux actrices aussi fondamentalement différentes que Frédérique Bel et Carrie Ng.
Et, dans un premier temps, il fut agréable constater que le duo Carbon/Courtiaud nous offraient un objet étrange, curieux et envoutant, à l'image de la séquence d'ouverture du film. Mettant en scène la troublante Carrie Ng, le long-métrage s'installait dans une ambiance suave, feutrée et bourrée d'une électricité sensuelle impeccablement rentranscrite à l'écran, certes pour aboutir à une scène de torture que l'on sentait venir de loin, mais ne possédant, dans son traitement, rien de vulgaire, et évitant les clichés et les dérives que l'on va si souvent trouver dans les Saw-like. S'appuyant sur une image superbe, des décors formidablement bien mis en avant, et sur une machinerie sado-maso au potentiel esthétisant tout simplement incroyable, le film séduit immédiatement, et fait entrer les spectateur plus que volontier dans ces Nuits rouges du bourreau de jade, alléchés par cette mise en bouche au combien réussie. Et pourtant, par la suite, le film ne va cesser de décevoir, et ne réussira jamais concrétiser ces premières promesses.
N'y allons pas par quatre chemins, la majeure partie de cet échec repose entièrement sur les épaules de Frédérique Bel, qui détruit un nombre conséquent de passages du film à cause d'un jeu d'actrice tout simplement catastrophique ; et elle n'est pas seulement fade et insipide, elle est juste fausse du début à la fin, provoquant chez le spectateur un sentiment allant de l'agacement à l'hilarité (au détour de certaines scènes devenues grotesques à cause de cette monstrueuse erreur de casting). Le fait est que Bel possède un personnage vraiment difficile à interpréter, qui, d'une part, sert de pilier à une grande partie du long métrage, et, d'autre part, est partie prenante d'une conclusion aussi surprenante que difficile à appréhender. Pour que la chose fonctionne correctement, il aurait fallu dans ce même rôle une comédienne beaucoup plus solide, qui puisse accompagner le spectateur vers les diverses surprises qui émaillent le script, sans constamment lui taper sur les nerfs.
Dans le même ordre d'idée, gageons qu'il aurait également fallu choisir une comédienne vraiment charismatique, et ce d'autant plus lorsque le film repose un grande partie sur un duel avec Carrie Ng. Là, autant dire que ces faces-à-faces sombrent à chaque fois dans le ridicule involontaire, parfois à la limite de la parodie, car avouons le, la confrontation Frédérique Bel/Carrie Ng se rapproche plus d'un duel Arnold Schwarzenegger/Sim que d'un face à face Robert De Niro/Al Pacino. Cette scène où Frédérique Bel menace Carrie Ng en imitant un pistolet, qui est un peu l'apogée de la déchéance de l'actrice dans Les nuits rouges du bourreau de jade, est à la fois fois ridicule et complètement affligeante. Avouons le, si l'on a mal pour elle, on souffre surtout pour les deux réalisateurs, qui se défoncent visiblement pour mettre en place une ambiance solide, laquelle est irrémédiablement détruite dès que la comédienne apparaît à l'écran.
Ceci dit, même avec une actrice solide dans ce rôle, renconnaissons que le film n'aurait de toute façon pas été extraordinaire (au mieux quand même assez sympathique). C'est un peu un paradoxe pour un film de scénariste, mais au final, il apparaît que l'autre maillon faible des Nuits rouge du bourreau de jade se trouve dans son histoire. Le long-métrage, ainsi, a tendance à s'éparpiller dans énormément de directions, tout en offrant à chacune d'elles un traitement assez lacunaire ; on a ainsi, pêle-mêle, dans ce scénario, du polar, du giallo, de la torture, un poison millénaire, le tout mettant en relation diverses factions opposées agissant pour des motifs plus ou moins convaincants. Cela donne certes au film une certaine richesse, mais que l'on sent tout de même mal maîtrisée : les divers pièces du puzzles sont traitées de manière très partielles, les personnages sonnent creux, et l'épilogue du film semble arriver comme un cheveu sur la soupe, sans réelle autre justification que d'offrir au spectateur une nouvelle belle scène.
Parce qu'en effet, Les nuits rouges du bourreau de jade bénéficie globalement d'une esthétique remarquable. Pour un premier long-métrage, Julien Carbon et Laurent Courtiaud font preuve d'un sens visuel plus qu'agréable, qui permet à leur film d'être un plaisir visuel de chaque instant. Il y a ainsi toujours quelque chose à voir dans leur long-métrage, que ce soit dans les séquences les plus marquantes (les scènes de torture et le final, notamment, en sont les deux points d'orgue), dans leur façon de filmer Hong-Kong (on sent très clairement que c'est une ville qu'ils aiment et qu'ils connaissent), dans leur propension à développer une atmosphère sensuelle sans jamais sombrer dans le graveleux, ou dans cette manière qu'ils ont de magnifier Carrie Ng à chacune de ses apparitions. Si l'on pourra leur repprocher quelques soucis de rythme dans leur mise en scène - la structure du scénario n'aidant pas forcément à ce niveau - les deux réalisateurs réussissent, formellement parlant, un passage très convaincant derrière la caméra.
La conclusion de Vincent L. à propos du Film : Les Nuits rouges du bourreau de jade [2011]
Au final, Les nuit rouge du bourreau de jade est un premier film certes maladroit, mais dont l'échec global peut en grande partie être imputé à la prestation tout simplement catastrophique de Frédérique Bel. Avec une comédienne vraiment talentueuse dans ce rôle difficile, le long-métrage aurait clairement été éminement plus sympathique. Tel quel, la confrontation de l'actrice avec la géniale Carrie Ng s'apparente plus à de la parodie involontaire, le film sombrant dans le ridicule au détour de certaines scènes à cause de cette erreur de casting monumentale. Dommage, parce qu'en dépit d'un script perfectible, Julien Carbon et Laurent Courtiaud ont fait preuve d'un travail esthétique remarquable, et parviennent à inscrire leur film dans une ambiance somme toute assez plaisante.
On a aimé
- Une esthétique intéressante,
- Deux séquences de torture sympathiques,
- Une méchante très charismatique.
On a moins bien aimé
- Frédérique Bel, juste catastrophique,
- Quelques séquences vraiment ridicules,
- Une histoire difficile à appréhender,
- Un scénario qui s'éparpille,
- Des personnages creux,
- Des soucis de rythme.
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