Critique Assassination Nation [2018]
Avis critique rédigé par Vincent L. le lundi 15 avril 2019 à 08h00
Les sorcières de Salem...
Critique après la projection du film lors de l'édition 2019 du BIFFF.
Les différences de distributeurs d'un pays à l'autre engendrent parfois des calendriers étranges dans les sorties cinéma. En témoigne les différences notables qui peuvent exister entre les sorties françaises et belges, alors que l'on pourrait a priori imaginer que ces deux pays francophones frontaliers bénéficieraient de "tirs groupés", c'est à dire de films sortant simultanément sur les deux territoires. Ça n'est pourtant pas toujours le cas, et on s'en rend compte chaque année lorsque sont diffusées au BIFFF des "avant-premières belge" qui s'avèrent être des "après-premières françaises". Assassination Nation est de ceux là puisque le film de Sam Levinson est sorti voici plus de quatre mois dans l'héxagone. Étant donné que je l'avais raté, ce hasard de programmation a plutôt bien fait mes affaires puisqu'il m'a permis de voir ce film en salle. Et franchement, ça aurait été dommage de rater ça !
Deuxième film de Sam Levinson après le très oubliable Another Happy Day, Assassination Nation est une grosse claque, un film intense, glauque, intelligent et bourré d'idées du début à la fin. Situé quelque part entre Bully de Larry Clark et Spring Breakers d'Harmony Korine, il dresse le portrait sans concession de la génération Instagram via un parti-pris extrêmement malin : un remake - ou tout du moins une relecture - du mythique procès des sorcières de Salem. On va donc suivre le parcours de quatre jeunes filles qui vont subir la vindicte populaire de toute une ville à la suite d'une accusation infondée de piratage informatique. Le scénario reprend intrinsèquement toutes les composantes de l'histoire originale, mais les réinvente constamment pour livrer un regard sans concession sur la société actuelle, celle des adolescents comme celles de leurs parents puritains et déconnectés.
Les choses n'étaient pourtant pas gagnées d'avance pour Sam Levinson tant le premier quart du film laisse assez dubitatif. Pendant vingt bonnes minutes, on se demande si ce qui nous est montré relève du génie ou de la grosse arnaque. Entre effets de styles (le film s'ouvre par exemple sur sa propre bande-annonce qui nous vend morts, alcool, drogues, sexe, homophobie, transphobie, nationalisme, racisme, sexisme, obscénités, torture, etc.), montage épileptique et split screens tout à fait cosmétiques, Assassination Nation semble paré des plus beaux atours du film creux. Il n'en est rien puisque passé cette exposition - qui, rétrospectivement, a du sens - le film dévoile ses cartes et assène son propos au spectateur à coup de massue. Si l'on pourra pointer ici et là certaines faiblesses scénaristiques (deux des quatre héroïnes font tout de même office de figurantes, certaines histoire sont évacuées trop vite, le final est un peu facile), le tout s'avère globalement convaicant de bout en bout.
La mise en scène est en effet à l'image de la société telle que nous la présente Sam Levinson : rose, sucrée, hystérique, bordélique, et finalement presque un peu trop grotesque. Il y en a partout, tout le temps, et l'on est constamment stimulé de toute part. Assassination Nation est d'une intensité rare, de celle qui prend aux tripes et qui fait réfléchir après coup. Et la chose est d'autant plus appréciable que le film se refuse à tout manichéisme, les quatre héroïnes n'étant pas de blanches princesses face à une société méchantes qui leur en veut. Les choses sont en teintes de gris, ce qui ne rend le long-métrage que plus passionnant. Le tout étant traversé de fulgurances de mise en scène (notamment un plan séquence en mode home invasion remarquable), on ressort d'Assassination Nation lessivé, retourné.
La conclusion de Vincent L. à propos du Film : Assassination Nation [2018]
Si American Nightmare avait assumé son concept subversif, il aurait ressemblé à Assassination Nation. Portrait au vitriol d'une génération et de tout un pan de la société américaine, le film de Sam Levinson s'impose comme l'un des plus pertinent que l'on ait pu voir sur le sujet, n'épargnant rien au spectateur sans jamais sombrer dans le mauvais goût involontaire. Un film ambitieux, unique, bourré d'idées, à découvrir de toute urgence !
On a aimé
- Un scénario malin doté d'un vrai fond critique,
- Une mise en scène qui met en valeur le propos,
- Une esthétique flashy qui sied parfaitement à l'ensemble,
- Un casting parfait, sans fausse note.
On a moins bien aimé
- Quelques petites faiblesses dans le scénario.
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