Critique Battle Royale 2 : Requiem #2 [2003]
Avis critique rédigé par Bastien L. le mardi 23 juillet 2019 à 09h00
You won't fool the children of the revolution...
Sorti fin 2001 chez nous, le premier Battle Royale avait été beaucoup une drôle de claque, un déferlement de violence avec ce côté barré typiquement japonais. Une œuvre culte pour qui donna lieu à une suite en 2003 bien moins connue...
Battle Royale 2 : Requiem reprend les mêmes personnes pour diriger le projet c'est à dire Kinji Fukasaku et son fils Kenta. Les deux furent producteurs sur le premier opus, comme sur le second, en même temps que le père fut le réalisateur d'un scénario écrit par son fils adaptant l'œuvre de Koushun Takami. Les mêmes rôles sont repris pour le second opus mais le début du tournage est endeuillé par la décès de Kinji Fukasaku alors âgé de plus de 70 ans et ayant eu une carrière bien remplie depuis le années 1970 avec de nombreux polars et films d'époques ainsi que quelques films de SF (Bataille au-delà des étoiles, Les évadés de l'espace, Virus...) et dont Battle Royale fut la dernière grande œuvre. Son fils reprend ainsi les rênes d'un projet véritablement pensé comme une suite même s'il est loin d'avoir l'expérience pour un projet d'une telle envergure.
Le film se déroule trois ans après la fin de Battle Royale alors que les deux survivants Shuya Nahanara (Tatsuya Fujiwara) et Noriko Nakagawa (Aki Maeda) ont rejoint le groupe terroristes des Wild Seven qui veulent lutter pour les enfants contre l'oppression des adultes. Ils sont ainsi responsables d'attentats très meurtriers contre le Japon. Le gouvernement japonais découvre leur localisation sur une île et décide d'initier le programme Battle Royale II. Refusant la déclaration de guerre de Wild Seven, les autorités décident de sélectionner une nouvelle classe turbulente pour les envoyer combattre des adolescents comme eux. La classe sélectionnée n'a pas d'autre choix que de collaborer pour attaquer l'île et tuer Shuya. Comme pour le premier opus, le professeur principal (Riki Takeuchi dans un rôle homonyme) chapeaute les opérations dans une classe où se trouve l'adolescent paumé Takuma Aio (Shugo Oshinari), la douce Nao Asakura (Ayane Sakai) et la discrète Shiori Kitano (Ai Maeda), fille du professeur principal du premier opus (Takeshi Kitano) bien décidée à retrouver les assassins de son père. Des adolescents déterminés et désespérés se lancent donc à l'assaut d'adolescents terroristes devenus impitoyables...
Le scénario est finalement à l'image du film : intéressant sur de nombreux points mais bien trop bordélique pour être véritablement bon. On imagine évidemment que le décès de Kinji Fukasaku a du rendre la production du film comme son tournage bien compliqué. En l'état, le scénario prend trop souvent l'aspect d'un remake avec des situations semblant reprendre complètement celles du premier opus. Certes les variantes arrivent vite et cela semble voulu pour nous surprendre au bout d'une heure de métrage. Mais pas assez afin d'éviter ce sentiment de lassitude face à ce qu'on prend pour la paresse scénaristique. Pour ce qui est de sa progression, le film accuse aussi quelques problèmes de rythme au bout d'une heure avec une tension qui retombe complètement et une mauvaise gestion de cet entre-deux avant la bataille finale. On s'attache ici beaucoup moins aux personnages qui ont une espérance de vie limitée. Le ton dramatique résolument exagéré des adolescents offrait un contraste comique intéressant à la violence omniprésente dans le premier opus mais cela ne fonctionne plus ici car le film veut raconter autre chose.
Kinji Fukasaku fait parti d'une génération de Japonais traumatisés par la Seconde Guerre mondiale avec en ligne de mire les bombardements nucléaires américains. Sur les deux films Battle Royale, il souhaitait mettre en scène l'absurdité des conflits et de la guerre tandis que le second opus se comprend plus dans le contexte du monde post-attentats du 11 septembre et invasions de l'Afghanistant puis de l'Irak. On peut tiquer devant le début complètement improbable du scénario (cette histoire de collégiens/lycéens censés combattre une armée de terroristes) mais on peut comprendre la volonté de montrer à quel point les guerres sont absurdes. Un propos intéressant qui s'accompagne d'un véritable pamphlet non seulement antimilitariste mais aussi contre les États-Unis et leur statut de gendarme du monde... Néanmoins, l'histoire encore une fois bordélique n'aide pas vraiment car ces idées se noient un peu avec le reste. Et puis il est toujours compliqué de délivrer un message contre la guerre et la violence quand l'intérêt du film est de mettre en scène une violence et des fusillades assez jouissives... Enfin, la fin du film pourra passer pour couillue (même si très naïve) ou complément absconse... C'est selon.
Dans les faits, Battle Royale 2 : Requiem part vraiment dans tous les sens à tous les niveaux et s'éloigne fortement de l'esprit de classe du premier opus. De même, le film est un parfait exemple pour ceux ayant quelques difficultés avec les productions nippones en accumulant les clichés généralement pointés du doigt comme une exagération à outrance des personnages, des flash-backs/moments d'émotion aux moments les plus impromptus et un scénario peu claire voire confus... L'esthétique globale du film souffle le chaud comme le froid avec une guerre d'adolescents ressemblant parfois à une partie de paintball avec des vrais armes dans des décors faits en matériaux de récupération ou des ruines. Là encore, c'est un peu quitte ou double pour apprécier un tel décor. L'ensemble fait en tout cas moins réel que le premier film. Les effets spéciaux sont satisfaisants quand il s'agit de montrer des blessures et mises à mort toujours impressionnantes et très violentes ou quand les explosions s'enchaînent. Néanmoins, ils s'avèrent clairement grossiers (même pour 2003) quand des images de synthèse sont utilisées pour des flammes, les balles qui fusent (on dirait des lasers...) ou les impacts de balle. On sent que la production a eu plus de moyens mais, encore une fois, le manque de cohérence ressort.
Malgré ce qui est dit, on sent que Battle Royale 2 : Requiem est plus un film de Fukasaku fils que de Fukasaku père, ce qui est logique vu que le second est décédé au tout début des prises de vues. Son fils le remplace dans un tournage qui a dû s'avérer franchement délicat, on peut le comprendre. Il s'en sort vraiment bien dans les scènes d'actions notamment quand la classe tente de débarquer et de prendre position sur l'île des terroristes. L'action y est survoltée, assez bien chorégraphiée avec l'utilisation de la shaky cam propre au style du paternel. Le montage nerveux est ainsi dans le ton. En revanche, les scènes plus posées et la direction d'acteur ne semblent pas être maîtrisées par Kenta Fukasaku tant les premières sont poussives et que la seconde est trop inégale. Le vrai point noir est l’interprétation outrageuse de Riki Takeuchi (la saga Dead or Alive de Takashi Miike) qui cabotine un maximum sans réussir à se raprocher de l'excellence de Takeshi Kitano dans le premier opus. Les jeunes acteurs sont ainsi assez inégaux et certains déçoivent comme Shugo Oshinari (Tomie: Re-Birth...) devenant ici la nouvelle star masculine mais qui n'arrive pas à se départir de son regard ahuri tout au long du film. Deux personnages qui sont l'exemple même que le film peut passer pour un nanar aux yeux de certains... On retrouve en revanche avec plus de plaisir le héros du premier film, Tatsuya Fujiwara (Kamen gakuen, Battle Royale...) qui réussit à allier une froide détermination et l'innocence qui était la sienne avant les événements qu'il a vécu. Chez les nouveaux, seule Ai Maeda (Godzilla, Mothra and King Ghidorah: Giant Monsters All-Out Attack...) se distingue en fille de Kitano dans un mélange de personnage taciturne et implacable.
La conclusion de Bastien L. à propos du Film : Battle Royale 2 : Requiem #2 [2003]
Battle Royale 2 : Requiem est un film trop inégal donc inévitablement moyen voire raté pour beaucoup. Il dispose de tellement de bonnes idées mais s'avère finalement trop bordélique que cela soit dans son scénario, dans les thèmes abordés où la réalisation. Un film qui part littéralement dans tous les sens avec un jeune réalisateur n'ayant pas réussi à bien maîtriser un projet qu'il a dû finaliser. On préfère finalement se dire que le véritable film testament du grand Kinji Fukasaku reste Battle Royale, premier du nom.
On a aimé
- Le concept du film
- Des scènes d'action bien troussées
- De bonnes prestations de la part de jeunes acteurs
On a moins bien aimé
- Trop bordélique avec le sentiment que le jeune réalisateur a été dépassé par son projet
- Scénario très confus et parfois discutable
- Riki Takeuchi en roue libre
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