Philip K. Dick : Le génie halluciné ! > Paranoïa, phobies et folie familiale

1955/1964

Depuis les années 30, BERKELEY est la capitale « rouge » des USA. De nombreux communistes vivent dans la ville. Dick grandi dans ce milieu mais n'adhère absolument pas à l'idéologie, contrairement à Kléo. En 1955, deux agents du FBI se présentent à la porte du couple et se montrent soupçonneux. Ils veulent que Dick espionne sa propre épouse. Le couple prend tout d'abord l'affaire à la rigolade. Mais cela marque à jamais l'écrivain qui va glisser doucement dans la paranoïa. L'année suivante paraît son roman L'Oeil dans le ciel, qui donne une excellente photographie de son état d'esprit de l'époque. Insidieusement, une nouvelle phobie germe dans son esprit : et si la réalité n'était pas ce qu'elle semble être réellement. Nombre de ses nouvelles traitent ce sujet. Mais ce ne sont pas seulement des histoires imaginaires, plutôt une sorte d'exorcisme à ses propres peurs. Dans la veine on peut citer Le temps désarticulé, un de ses Chefs- d’œuvre.
Philip et Kléo se mettent à rêver de la campagne. Ils achètent alors une petite maison à POINT REYES STATION, non loin de BERKELEY. C'est là-bas que Dick fait la connaissance d'une de ses voisines : Anne Rubenstein. A peine plus âgée que lui, c'est une femme à fort caractère. Veuve, elle élève seule ses trois filles. Elle devient sa maîtresse. Quelques mois plus tard Kléo consent au divorce. Philip vît avec Anne une grande passion. Ils se marient le 15 avril 1959. Pour son épouse Dick change de mode de vie et se met à travailler le jour. Il élève comme siennes les filles de sa femme. Le 25 février 1960 naît Laura, premier enfant de Dick. A la même époque Philip se passionne pour le Yi-King, méthode divinatoire Chinoise. Toute la famille est initiée et chaque décision est soumise à l'oracle. Il loue un cabanon isolé pour pouvoir écrire sans gêne et se met au travail. Commence alors l'écriture d'un autre de ses Chefs-d'œuvre : Le Maître du Haut Château. Il écrit ce livre tout empreint du Yi-King où il imagine la civilisation si le IIIème Reich avait gagné la guerre. Ce livre est le premier grand succès de sa carrière, il obtient le prix Hugo, la plus grande récompense que puisse obtenir un auteur de science-fiction.
En 1963 Dick se lance dans un nouveau jeu : ses connaissances en psychiatrie l'incitent à rechercher chez toutes les personnes de son entourage de quelles phobies elles peuvent souffrir. Il en tire un nouveau roman : le clan de la lune alphane, où il dresse avec un souci parodique d'exhaustivité, le tableau clinique de toutes les maladies mentales.
Malgré le succès du Maître du Haut Château L'écrivain à besoin d'argent. Il s'ensuit une période frénétique. Les amphétamines lui permettent d'écrire, à plein régime, un roman en quelques semaines. En deux ans, il en a publié une dizaine, mais il paye son dopage par des périodes de dépression atroces. Son épouse lui apparaît comme une ennemie. Dick réussit même à la faire interner deux semaines par son psychiatre, car il pense qu'elle veut l'assassiner. A son retour de l'hôpital elle est mise sous psychotropes puissants, la transformant pratiquement en zombie.
En novembre 1963, Dick a une hallucination terrible : levant les yeux il aperçoit dans le ciel un terrible visage métallique le regardant. Il explique lui-même son aventure : « Un jour comme je marchais tranquillement sur la petite route menant à ma cabane, en me faisant une fête de ces huit heures d'écriture dans l'isolement le plus complet, j'ai levé les yeux vers le ciel et j'ai vu un visage... et il n'était pas humain. C'était la face du mal absolu... Gigantesque, il emplissait un quart du ciel. Il arborait des fentes aveugles à la place des yeux ; il était tout en métal, il était cruel et, pire que tout : il était Dieu ». Il se précipite chez son psychiatre puis chez un prêtre. En rentrant chez lui il annonce à sa femme qu'il veut être baptisé. Toute la famille se convertit. Il écrit à cette époque Le Dieu venu du Centaure, roman en phase avec sa situation.