Dernier jour au PIFFF
Horror Stories, Silent Hill : Révélation et cloture du festival
Pour la dernière journée du PIFFF de 2012, deux films hors compétition : un film à sketchs horrifiques made in Corée du Sud, et en guise de cloture l'attendu Silent Hill : Revelation de Michael J. Bassett, présent à cette avant-première.
Deuxième film à sketchs coréen de la programmation du PIFFF après Doomsday Book, Horror Stories est, comme son titre l'indique, plus porté sur l'horreur et l'épouvante, là ou Doomsday Book était résolument plus SF. Dans tous les cas, la satire sociale prédomine. En guise de fil conducteur, une jeune étudiante capturée par un serial-killer est forcée de lui raconter des histoires effrayantes pour qu'il s'endorme (parce qu'il ne s'endort que quand il a « le sang glacé »). C'est un peu la structure des 1001 nuits mais version horreur à la coréenne, par 5 réalisateurs coréens peu connus chez nous (les deux réalisateurs de Exhausted, le coréalisateur de Memento Mori, le réalisateur d'Epitaph, la réalisatrice de Modern Family...).
La première histoire s'intitule N'ouvre pas la porte. Deux enfants attendent leur mère chez eux, lorsqu'un livreur défiguré fait irruption dans l'appartement. Évoquant à la fois le home invasion movie et le film de fantômes japonais, ce premier segment est d'une redoutable efficacité, grâce à la mise en scène et aux effets sonores, mais il se perd dans son dénouement au message social complètement gratuit, alors que ça aurait pu se terminer sur une réflexion sur la peur.
Le deuxième segment, Horror Flight, s'apparente à un Turbulences à 30 000 pieds (souvenez-vous, cette série B friquée des années 90, avec Ray Liotta en psychopathe traquant une hôtesse de l'air dans un avion) mais à la sauce coréenne, donc avec un fantôme dans les parages. Grotesque et pas très effrayant, ça tourne vite en rond (même le film avec Ray Liotta était plus nerveux).
Dans le troisième sketch, deux soeurs se jalousent un prétendant qui s'avère être un gros psychopathe. Tapant dans l'horreur culinaire (donc : cannibalisme), un peu comme le Nouvelle Cuisine de Fruit Chan, ce segment devient rapidement un imbroglio certes tordu mais ni vraiment drôle ni vraiment effrayant. Sans grand intérêt.
Le dernier segment, Ambulance, frappe encore à la porte de ces infectés décidément très prisés (d'ailleurs il y en avait aussi dans Doomsday Book), mais cette fois en huit-clos dans une ambulance, ce qui apporte une originalité bienvenue. Les réalisateurs jouent avec les doutes et construisent un intense crescendo dans la folie, opposant paranoïa, rationalité et instinct maternel. Tendu, nerveux et bien foutu.
Comme toujours dans l'exercice, le résultat est inégal, mais on retiendra donc surtout le premier et le dernier segment, remarquant au passage que chacun des sketchs abuse des « scènes de rêves » prémonitoires (c'est fou le nombre de personnages qui se réveillent en sursaut, dans ce film). Jonathan C.
Enfin, à 20h a eu lieu la cérémonie de clôture du 2ème Paris International Fantastic Film Festival (PIFFF), au cinéma Gaumont Opéra Capucines. Le jury de la compétition internationale, composé des réalisateurs français Nicolas Boukhrief, Xavier Gens, Pascal Laugier, Julien Carbon et Laurent Courtiaud a décidé de décerner le PRIX DU JURY DE LA COMPÉTITION INTERNATIONALE au film THE BODY (EL CUERPO) de Oriol Paulo (notre avis ici). En parallèle, le jury tenait à saluer le travail du jeune réalisateur péruvien de 23 ans, Adrian Saba, avec une Mention Spéciale à THE CLEANER (EL LIMPIADOR) qui les a impressionnés (notre avis ici). Le meilleur court-métrage international est revenu au fascinant Exit de Daniel Zimbler.
Pour le reste ce fut un véritable triomphe pour NOSTALGIC Z de Carl Bouteiller qui remporta le GRAND PRIX DU COURT-MÉTRAGE FRANÇAIS, jury composé d’Anaïs Bertrand (productrice), Eddy Brière (photographe), Rodolphe Chabrier (superviseur des effets spéciaux chez Mac Guff) et Abel Ferry (réalisateur) puis le PRIX SPÉCIAL CINÉ+ FRISSON (achat par la chaîne pour une diffusion sur ses antennes) et enfin le Prix du Public. Le jury a souhaité saluer l’audace du réalisateur Corentin Quiniou pour Food elle qui a osé se lancer dans un court-métrage expérimental.
Citadel de Ciaran Foy a reçu quant à lui le prix - très mérité - du public.
Mad Movies avec l'association Paris Ciné Fantastique, organisatrice du PIFFF, présidée par Gérard Cohen, tirent un bilan très positif de cette seconde édition, dont les entrées ont doublé par rapport à l'année dernière : 9 000 spectateurs.
Les membres du jury de la compétition internationale ont souhaité remercier le public d’être si nombreux et assidu aux séances du festival. Selon eux, aller en salles voir des films fantastiques sur grand écran constitue aujourd’hui un acte militant. Ils ont donc invité le public à venir toujours plus nombreux aux prochaines éditions du PIFFF. Quant à nous, nous remercions l'accueil que nous avons reçu de l'équipe presse constituée de Blanche Aurore Duault, Nathalie Iund et Roxane de Quirini.
Maintenant, il est temps pour nous de dévoiler "nos chouchous du festival", et à quel film nous aurions bien donné un prix.
Le prix de Richard B. : Mon prix revient à Citadel qui est en tout point une réussite. Pour le reste, j'aimerais moi aussi saluer The Cleaner, et j'aurais aimé voir Universal Soldier 4 : Day of Reckoning en compétition officiel tant celui-ci se présente comme une très belle réussite.
Le prix de Jonathan C. : Mon favori dans la compétition officielle est Citadel, mais j'ai eu un coup de coeur aussi pour Crave. Hors compétition, Universal Soldier 4 : Day of Reckoning s'impose pour ma part comme l'un des meilleurs films de la programmation, dans laquelle j'ai aussi beaucoup apprécié John Dies at the End, Here Comes the Devil, The Flying Swords of Dragon Gate 3D, In Their Skin et The Cleaner.
Après la cérémonie de cloture, la remise des prix et la projection des deux excellents courts métrages primés fut projeté Silent Hill : Revelation, que son réalisateur Michael J. Bassett est venu présenter en compagnie de Samuel Hadida et de nombreuses infirmières zombifiées :
La séquence des morts-vivants dans le très sympa Solomon Kane pouvait laisser entendre que Michael J. Bassett (Wilderness, La Tranchée) serait un réalisateur parfait pour adapter du Silent Hill. Et bien en fait, non. Peut-être parce que le cinéaste est trop attaché au bis. Son Silent Hill : Revelation est en tous cas un sacré bordel. Adaptant particulièrement le Silent Hill 3 sur Playstation 2 (on y retrouve la même héroïne, les décors du centre commercial, de l'asile ou du parc d'attraction, un point de départ semblable, certaines scènes comme le duel sur le manège ou les infirmières immobiles...) tout en s'imposant (difficilement) comme une suite direct au film de Christophe Gans, Michael J. Bassett se paume dans un scénario tout simplement débile et inintéressant au possible (ceux qui râlaient sur le délire de la secte dans le premier film vont s'en donner à cœur joie ici), délaissant toute la dimension psychanalytique et métaphysique (oui oui) des jeux vidéo pour un film d'épouvante sans queue ni tête dont la préoccupation principale est d'essayer de faire peur avec des jump-scares à foison et un mixage sonore à faire exploser les enceintes (c'est comme le Morniiiiing Liiiiiive : t'es obligé de sursauter même si ça fait pas peur).
Mais le réalisateur se montre incapable de générer la moindre tension (ou juste quelques secondes, avec les infirmières) et d'immerger son spectateur dans les ténèbres (dans lesquels on ne reste jamais assez longtemps pour en être imprégné), ce que Christophe Gans parvenait pourtant à faire dans son film certes imparfait mais un minimum fidèle aux jeux de Konami. Ici, les ténèbres apparaissent et disparaissent toutes les cinq minutes, on finit par s'en foutre complètement, et les scènes dans les ténèbres sont trop propres, trop visibles (dans le film de Gans, ces séquences étaient nettement plus crades, sombres et malsaines) ; l'obscurité était probablement ce qu'il y avait de plus terrifiant dans les jeux, mais elle n'est jamais prise en compte dans ce Silent Hill : Revelation (preuve qu'ils n'ont rien compris à ce qu'ils adaptaient en film), qui reprend certes les décors sordides conçus par Konami mais n'en fait absolument rien. Il y a bien quelques beaux plans calqués sur ceux du jeu vidéo lorsque l'héroïne ère dans la ville brumeuse (comme l'avait déjà fait Christophe Gans), mais ça n'amène rien de particulier (c'est juste pour le clin d'œil). L'un des thèmes musicaux de Silent Hill 2 est reprit, ça fait plaisir mais pour le reste la musique ne provoque pas grand-chose (rien à voir avec le travail d'Akira Yamaoka sur les jeux)...
En revanche, Michael J. Bassett aime les monstres et en livre ici une belle galerie, imaginée par Patrick Tatopoulos sous forte inspiration Clive Barker (qui, à la base, était déjà une grosse influence des jeux vidéo). C'est ici un pur film de monstres, ça se termine d'ailleurs sur un combat très Z entre deux d'entre eux, dont le célèbre Pyramid Head, bien plus marquant dans le Silent Hill de Christophe Gans et surtout dans Silent Hill 2. Les freaks sont assez glauques mais ils auraient gagnés à être moins montrés sous toutes les coutures et moins en CGI (le monstre de mannequins en devient ringard). Les effets spéciaux sont plutôt réussis (surtout pour une petite production de 20 millions de dollars, soit 30 millions de moins que le film de Christophe Gans !), l'utilisation de la 3D est très attractive et assez fun (pas mal d'effets rigolos et saisissants), une poignée de plans spectaculaires font leur effet (notamment avec Alessa) et la mise en scène ne manque pas d'idées (le coté bis du cinéaste), mais la structure narrative est inexistante et il manque un point de vue affirmé sur l'univers Silent Hill, ici juste survolé. Le plan final est sympa.
Mais je crois que le plus choquant pour une telle production, c'est de voir des acteurs aussi mauvais déclamer des dialogues aussi nazes ; les spectateurs en ricanaient dans la salle (le « Parce que je suis un des Fils de L'Ordre ! » restera un grand moment de rigolade). L'actrice, une sosie de Michelle Williams, ressemble beaucoup à la Heather de Silent Hill 3 mais son personnage est fadasse et trop plaintif (cela dit son discours de présentation devant ses camarades de classe est marrant). Kit Harington (Jon Snow dans Le Trône de fer) est juste pitoyable. Je préfère, par respect, ne pas évoquer les prestations de Deborah Kara Unger (plus convaincante dans le premier film), Martin Donovan (le personnage du détective fait plus long feu dans le jeu), Carrie-Anne Moss (la pauvre...) et de Malcolm McDowell (le pauvre...). Même Sean Bean a l'air de s'emmerder, ce qui était déjà le cas dans le film de Christophe Gans (on sent clairement qu'il a pas envie d'être là mais qu'il a signé).
Bref, Silent Hill : Revelation est une sacrée déception pour ceux qui, comme moi, vénèrent les jeux vidéo de Konami et avaient aimé les précédents films de Michael J. Bassett (ainsi que l'adaptation de Christophe Gans). En tant que série B friquée, c'est tout juste sympa, mais en tant que Silent Hill c'est nul. Critique complète très prochainement.
Jonathan C.
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Publié le lundi 26 novembre 2012 à 21h11
Fiches de l'encyclopédie du fantastique en rapport avec l'article
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Silent Hill
18 fiches
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Michael J. Bassett
7 rôles
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