Critique Les Canaux du Mitan [2020]

Ambiance Barnum pour le nouveau roman de la Bibliothèque voltaïque, collection des Moutons électriques : les Canaux du Mitan est un récit d’Alex Nikolavitch (Mythes et super-héros)  un peu hors du temps, une fiction hantée de magies inconnues alternant lumières et ténèbres. 

Le Mitan est une immense plaine couturée de canaux, un territoire immense partagée en plusieurs régions mais dont le cœur reste sauvage et moins connu. Ces milliers de canaux ont été construits il y a des temps immémoriaux, peut-être par les ancêtres de Chokchaws et désormais les colons parcourent ces canaux en péniche tirée par des chevaux.

Gabriel vit dans un village du Mitan, Salvi, il n’en est jamais parti et s’ennuie. Un jour débarque dans la petite ville l’équipage d’un bateau-carnaval. Fasciné par le spectacle qu’il voit, il tente sa chance et demande à partir avec les bateleurs. Le charismatique capitaine loyal l’accepte comme mousse. Le jeune homme commence sa vie à bord et se découvre une nouvelle famille. Mais plus il s’enfonce dans le cœur du mitan, plus les mystères qui baignent les lieux deviennent sombres.

Les années ont passé et Suzanne n’a jamais oublié la disparition de son ami d’enfance Gabriel. Ellee a aussi quitté salvi pour devenir prévôte. Elle enquête désormais sur des crimes et après des recherches aux archives et sur le terrain, elle finira elle-aussi pour atteindre le cœur du Mitan.

Le Mitan est un univers étrange et mystérieux, effrayant mais empli de magie. Au fil de l’eau et du point de vue de différents personnages, le lecteur découvre les secrets du lieu. Le mitant du Mitan est évidemment le point culminant et la tension y sera à son comble.

Les personnages de cette tranche de vie du Mitan sont tous attachants, en particulier l’équipage hétéroclyte de freaks du bateau carnaval. Auguste le vieux clown, Mi-portion, Hercule ou encore Rosie la tatouée nous accompagne tout au long d’un périple qui verra Gabriel gamin sans histoire devenir adulte et prend sa vraie place à bord, une place qui implique un terrible fardeau. Le personnage de Suzanne est particulièrement bien écrit autant en terme de caractère que de place dans cette société qui est mal à l’aise face à une femme prévôte. De même, les chokchaws sont inquiétants tant qu’on n’en croise pas vraiment pour se révéler ensuite un peuple comme les autres mais avec ses coutumes et traditions. Le personnage qui l’aa le plus ému reste le capitaine loyal vieillissant, l’évolution de ce charismatique leader permet de saisir le temps qui passe et montre la cruauté parfois du destin.

Alors que les pièces du puzzle s'assemblent petit à petit, au fur et à mesure des récits des différents personnages, le lecteur comprend la réalité sombre du Mitan, mélange de Far west exotique et d’univers social et politique à la Steinbeck. Sous couvert de mystères et de magie, le roman aborde sous la plume efficace d’Alex Nikolavitch, des thématiques sociales actuelles et la question de la modernité. De la gunpowder fantasy subtile pour une virée à bord de ce bateau fabuleux.