Critique Waterworld [1995]
Avis critique rédigé par Nicolas L. le mercredi 4 avril 2007 à 15h56
Quand Mad Max boit la tasse
Sur Waterworld, un monde recouvert par les Océans, la population humaine est regroupée en communauté au sein des atolls, des îles artificielles assurant la protection et la subsistance de ses habitants.
La distance entre chacun de ces atolls est considérable, et le navigateur peut voir passer de nombreux jours avant de toucher un nouveau port. Mais cela ne veut pas dire qu’il ne rencontra personne. Ils peut par exemple croiser la route d’un drifter, une sorte de marin solitaire au navire chargé de marchandises. La rencontre se résoudra de manière amicale (en théorie), avec un échange de biens sous forme de troc. Il serait bien plus dangereux, par contre, qu’il tombe par hasard sur un raid de Smockers, des flibustiers de haute mer, amateurs de cigarettes, et qui, depuis quelques temps, se font particulièrement vindicatifs dans leur quête du Dryland ; un continent mystique.
Puis, il y aussi ces rumeurs concernant l’existence d’un gigantesque bateau taillé pour la course, que l’on dit piloté par autre chose qu’un homme ; une créature surnommée le Mariner…
Il est des hommes et des artistes qui, quoiqu’ils fassent, en bien ou en mal, gardent sans faillir l’affection de leurs contemporains ou de leur public. Qu’ils accumulent gamelles et contre-performances importent peu, ils conservent de façon inéluctable un considérable capital de sympathie. Kevin Costner fait partie de ces gens là. Sa carrière de comédien a beau être presque terminée depuis près de 15 ans, cet acteur de formation baptiste, aux racines amérindienne, continue d’attirer l’admiration et le respect de tous, ainsi que le sourire des filles. Il ne faut certainement pas chercher la raison dans les quelques éphémères réussites (la dernière en date est un somptueux Open Range, un très grand western) qui ont jalonné une carrière plus que moyenne, mais bien ailleurs… peut-être dans cet air placide, dans cette attitude qui respire l’honnêteté, devant et en dehors des caméra…
Prenons Waterworld, par exemple. Tous s’accordent à dire que le film est foireux. Mais personne ne remet en cause la responsabilité de Kevin Costner. Il parait tellement sincère dans son rôle de mutant version Homme de l’Atlantide (rappelez-vous, la série rigolote avec Patrick Duffy en homme-poisson) qu’à aucun moment l’on en vient à douter de sa crédibilité et de son intégrité artistique. Pourtant, sur le film, il était partout ou presque, à la production, à la tête de la distribution, et il a même terminé avec une casquette (ou plutôt un masque de plongée dans ce cas précis) de réalisateur. Non, à l’époque (et encore aujourd’hui), critique et audience ont cherché ailleurs l’explication de ce naufrage financier et artistique. Dans la violence d’un ouragan imprévu, dans les caprices d’un Dennis Hopper accroc à la bouteille, dans l’entrejambe trop généreuse d’une Jeanne Tripplehorn, dans l’incompétence d’un Kevin Reynolds… Bref, tout le monde en a pris pour son grade, sauf Kevin Costner.
Pourtant, ce film contient à l’évidence tous les éléments des fondements humanistes chers à notre ami. A commencer par l’élément messianique, celui que l’on retrouve dans Danse avec les Loups, The Postman, Le Prince des Voleurs, Open Range et autres For Love of the Game. La thématique « seul contre tous et sauveur universel malgré lui », Kevin Costner, il adore ça. On ne lui en voudra pas, cette valeur évangélique est carrément imbriquée dans la culture américaine. Et d’ailleurs, parfois, cela peut donner de sympathiques œuvres à la morale bienfaisante. Mais avec Kevin Costner aux commandes, le résultat est souvent très en deçà des espérances que l’on aurait pu y placer. Je pense que la faute en revient essentiellement à son goût pour tenter de ménager la chèvre et le chou. Car, comme dans Postman, le gros défaut de Waterworld vient du manque de prise de position et de vindicte dans son écriture et dabs son traitement. Cette tentative de transformer l’univers sombre, nihiliste et rempli d’humour noir de Mad Max 2 en une comédie quasi estampillée Disney ne pouvait mener que dans le mur. L’intention de dédramatiser l’univers post-apocalyptique de George Miller pour en faire un spectacle familial était louable, mais pour le coup, le mysticisme feutré et la philosophie « retour aux Ages Sombres » du script prennent sacrément l’eau…
Et la crédibilité du personnage principal est également très ébranlée. Kevin Costner veut faire le gros méchant, mais il est plus proche d’un Bisounours que du Capitaine Crochet. Il finit même dans la peau du parfait boy scout et en véritable genteman n’abusant pas des filles se baladant à poil sur son bateau (alors qu’il n’a pas tiré un coup depuis des mois, hormis avec des baleines). Quand aux méchants, dirigés par un Dennis Hopper qui cabotine à l’extrême, ils sont traités avec beaucoup trop de légèreté. Leurs exactions, au lieu de nous faire rire jaune (comme ce fut le cas avec la bande du Humungous de Mad Max 2), nous amusent de la même manière que le font les méchants d’un Goonies ou d’un Pirates des Caraïbes. C’est dire…
Vous me direz, cela n’est pas un problème en soi, un film d’aventures n’est pas mauvais tout simplement parce qu’il n’est pas assez grave ou adulte (je re-cite pour l’occasion les amusants Pirates des Caraïbes). C’est vrai, mais pas dans le cas de Waterworld qui est construit sur un scénario qui est un copié-collé de celui de Mad Max 2 (l’eau remplaçant la poussière) et qui était sensé attirer le même type d’audience. Le fait d’aseptiser la teneur dramatique de l’original a complètement décontenancé les spectateurs qui ne retrouvaient plus la « gniak » et même la méchanceté du film de George Miller. Du coup, les effets comiques, comme ces accoutrements incongrus et ces looks zarbis repris ici - et qui cherchaient dans Mad Max a travaillé le climax par des relâchés de pression – prennent une tournure ridicule (comme le professeur maboul avec sa petit éolienne sur la tête…), le spectateur n’ayant guère besoin de bulle d’oxygène.
On en vient à se demander si Waterworld, au final, n’est pas un sympathique film pour enfants. C’est possible à l’attitude assez amusée de mon fils de 11 ans qui l’a vu pour la première fois hier soir en DVD. Car il faut dire que l’aspect spectaculaire du film est assez bien travaillé. La sensation de griserie due à la vitesse des navires est nettement moins impressionnante que lors des poursuites de Mad Max 2 (sur les étendues océanes, l’œil a du mal à se créer des repères fixes, accroches nécessaires à la perception du mouvement), mais pour le reste, il n’y a pas grand-chose à critiquer. Ça mitraille, ça pétarade et ça explose à tout va.
Le rôle important donné à la petite chipie contribue également à séduire le public le plus jeune. Ainsi que de nombreuses détails scénaristiques stupides (comme la corde « élastique », le poirier bonzaï, le tatouage inexplicablement hermétique, les jets-skis submergés, le « scaphandre bricolé », etc…), un aspect quasi cartoonesque, susceptible de faire grincer des dents le spectateur adulte, mais qui risque fort de faire rire ou sursauter les enfants. Mais sincèrement, je ne crois pas que Kevin Costner, en montant ce projet, envisageait les choses de cet oeil; car une telle vision est loin d’être à la hauteur de l’investissement consacré, en hommes et en moyens. Le problème majeur, c’est que peu importe de la manière dont on aborde le cas Waterworld, on en revient à une même conclusion très shakespearienne : beaucoup de bruit pour rien… ou en tout cas, pour pas grand-chose de mémorable.
La conclusion de Nicolas L. à propos du Film : Waterworld [1995]
Waterworld fut un naufrage financier. Pour le portefeuille des investisseurs - dont Kevin Costner faisait partie - ce fut même un gouffre presque aussi profond que la fosse du Japon. Ce film a aussi marqué aussi la fin de l’amitié entre les deux Kevin, l’un ayant servi de bouclier à l’autre sous la pluie de quolibets des critiques. Hors, 12 ans plus tard, que reste-t-il de tout ça ? Un petit film d’aventure, pas déplaisant, guère trépidant, un peu amusant, mais guère honteux. Finalement, dans le domaine du cinéma comme ailleurs, le temps finit par lisser même les vagues des mers les plus houleuses. Un petit film surimi, pas dégueu avec beaucoup de mayonnaise…
On a aimé
- Film spectaculaire
- Ambiance bon enfant
- Quelques gags amusants
On a moins bien aimé
- Si loin, si proche de Mad Max
- Manque de punch
- Méchants guère terrifiants
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