Critique La Nuit des traquées [1980]

Avis critique rédigé par Nicolas L. le jeudi 7 juin 2007 à 13h22

La mémoire dans les fesses

Un jeune homme essaye de faire sortir sa copine d’un building du quartier de la Défense rempli de gens amorphes, à poil et amnésiques…
Ça c’est pour le pitch. Maintenant, l’on sait aussi à quel point ce fripon de Jean Rollin est un esthète hédoniste. Donc, l’on se doute bien que la Nuit des Traquées (rien que ce jeu de mot est plein de promesses) va être un spectacle d’un esthétisme poussé, avec pléthore d’images bien léchées - d’ailleurs, souvent, dans les films de Jeannot, il n’y pas que les images qui le sont, bien léchées. On connaît aussi son goût pour l’hémoglobine d’un rouge éclatant, digne d’un prototype de la scuderia Ferrari, et son talent pour filmer des créatures en nuisette vaporeuse bien mises en valeur par des éclairages diaphanes et calculés mettant en évidence leurs atouts féminins, et principalement leurs entrejambes.
Cependant, autant l’annoncer tout de suite, des pseudo-Vampirella érotiques marchant à deux à l’heure, bercées par les rais des nuits américaines et une musique d’ascenseur, dans la Nuit des Traquées, vous n’en trouverez pas. Mais bon, il y a quand même des choses à voir, entre deux bâillements. Ou deux ricanements, suivant l’humeur du moment.
Le film commence par une jolie paire de fesses qui fuit dans un terrain vague. Arrivée sur la route, elle est recueillie par un type si sympa qu’il l’amène chez lui pour tailler le bout d’gras. Le mec s’aperçoit alors que la paire de fesses a perdu la mémoire. Carrément. Encéphalogramme plat. Les symptômes sont si graves qu’elle en oublie tous les évènements, à peine cinq minutes après qu’ils se soient déroulés. Bon, en même temps, c’est normal, car l’on sait que les paires de fesses ne sont guère réputées pour l’infaillibilité de leur mémoire. Heureusement pour lui, le type n’a pas tout perdu dans l’affaire, car si il y a une chose que la paire de fesse n’a pas oublié, c’est le sens de l’hospitalité.

Il y a des choses qui ne s'oublient pas, comme le vélo

Le lendemain de cette nuit de rut au romantisme troublant, bien mis en valeur par la présence d’un vieux rhododendron moisi au premier plan et un éclairage de caboulot (fourni par un abat-jour de brocante), la paire de fesse se repose sur un canapé vintage. Le mec, lui, va au taf, tout heureux de cette nuit de pure convivialité. C’est alors que se pointe dans l’appartement un très malpoli couple de professeurs foldingues, deux savants qui sont selon toute évidence revendiquent la propriété de la paire de fesses.
Ils l’embarquent donc. Et l’amènent dans le quartier de la Défense, au sein d’une tour de verre. Installée dans une chambre, la paire de fesse fait la connaissance d’une congénère, un peu moins dodue mais tout aussi lobotomisée. - Qui es-tu ?, demande la première paire. - Je ne sais pas, je ne sais plus, et toi ?, répond l’autre. - Je ne sais pas, il me semble te connaître. - Ah, tu crois ? Pas moi, tu disais quoi, déjà ? - Euhh (regard dans le vide…)
Un dialogue passionnant qui dure des lustres. Puis, pour tuer le temps, les deux paires de fesses se décident à faire ce qu’elles savent le mieux ; le frotti-frotta. Ça dure encore trois plombes, mais bon, cela m’a semblé un peu moins chiant. A savoir pourquoi… Puis la paire de fesse la plus ronde entreprend de faire le tour du propriétaire. Elle va découvrir d’autres paires de fesses, des paires de tétés, des vieilles habillées (ouf), des types hagards et un infirmier lubrique. Tous sont apparemment dans le même état de débilité foudroyante (sauf l’infirmier, lui, il est seulement con).
On s'connait?

Ainsi, pendant que notre amie continue de visiter l’immeuble à la vitesse d’une tortue asthmatique, l’infirmier lubrique perd la vie pour avoir osé mettre sa queue dans une paire de fesses récalcitrante et sa copine de chambrée commet une erreur fatale en voulant vérifier si des ciseaux sont aptes à servir de jumelles (ah, cette fameuse curiosité des paires de fesses, toujours à vouloir s’enfiler quelque chose).
Puis, arrive le copain dans la tour. Il récupère son bien et ensemble entreprennent de fuir le quartier. Ils courent aussi vite que le permet le cadreur septuagénaire de Jean Rollin. On se croirait presque dans du Bruckheimer, mais situé dans espace temps bien éloigné du nôtre. Les deux savants et leurs sbires se lancent à leur trousse. Inutile de préciser qu’ils sont tout aussi « rapides », même les tirs d’armes à feu semblent filmés au ralenti. A mon avis, les Wachowki avaient dû voir ce film quand ils ont eu l’idée du bullet time qui a fait le succès de Matrix. Par contre, Jean Rollin est encore plus fort que les frangins, car chez lui, il n’y a aucun trucage ! Ce mec a un don pour réduire le fil du temps.
c'est ce qui s'appelle avoir un regard aiguisé

Bref, malgré leurs efforts, les poursuivants rattrapent les fuyards. Alors, dans une séquence dégageant une tension dramatique quasi insoutenable, les méchants entreprennent de fournir à la paire de fesses une multitude de nouveaux trous de balles. N’en pouvant plus, sous le regard désespéré de son amant, succombe la paire de fesses. Triste fin. Snif…
La paire de fesses, c’est Brigitte Lahaie, une actrice porno au sommet de son « art » dans les années 80. C’est durant cette période qu’elle s’essaye d’ailleurs au cinéma traditionnel. Heureusement pour nous, elle laissera vite tomber, puis acceptera de finir dignement son humide carrière en animatrice radio pour émissions coquines. A coté d’elle, que des inconnus, ou presque, qui jouent avec tellement de naturel que j’ai cru un moment avoir des problèmes de son sur mon téléviseur. Et au dessus de tout ça, il y a Jean Rollin, un homme que beaucoup considère comme un icône du genre fantastique français et qui est même porté aux nues par nombre de critiques anglo-saxons. Vous ne m’enlèverez pas à l’idée qu’il y a quelque chose de tordu là dessous…

La conclusion de à propos du Film : La Nuit des traquées [1980]

Auteur Nicolas L.
30

La Nuit des Traquées est un nouveau film « psyculogique » de Jean Rollin. Beaucoup plus cul que psy d’ailleurs, et de plus fortement chiant. En fait, si l’on enlève les scènes de baise (très molles au demeurant, j’ai connu la Brigitte plus motivée), il reste à ce nanar un ou deux effets horrifiques et de longues errances de filles à poil (dans tous les sens du terme, n’oublions pas que nous sommes à la fin des années 70 et les gonzesses y sont de véritables jardins zoologiques, on pourrait y élever des ouistitis) dans des couloirs aussi gais qu’une salle d’attente de l’ANPE. Mais bon, il y a quelques petits trucs qui rattrapent un peu le désastre, notamment une photographie parfois pertinente et des dialogues absurdes involontairement hilarants. En plus, c’est un Rollin sans vampires. ALORS, Rien que ça, c’est un évènement…

On a aimé

  • Photographie soignée
  • Si vous êtes fortement opposé à la politique de déboisement
  • Dialogues involontairement hilarants

On a moins bien aimé

  • Scénario à deux balles
  • Rythme pachydermique
  • Jeu d’acteur affligeant
  • Finalement peu polisson

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