Critique Legend #1 [2012]

« Ma mère me croit mort.

Il est clair que ce n'est pas le cas, mais je préfère ne pas la détromper. Deux fois par mois, au moins, je vois un avis de recherche à mon nom sur les jumbotrons du centre de Los Angeles. »

Legend est le premier volet d'une trilogie écrite par une auteure américaine prometteuse, Marie Lu. On prend connaissance d'un monde au destin tragique, post-apocalyptique, où les ravages des guerres interminables entre la République et les Colonies ont implosé les morales, l'éthique et l'équité. Le régime politique imposé par la belliqueuse République stigmatise une population souffreteuse, soucieuse seulement de se préserver quelques moments de « vie » entrecoupés par les exactions violentes de la police gouvernementale.

Day, un rebelle mystérieux, lutte pour simplement survivre. Il défie les autorités depuis de nombreuses années, ce qui fait de lui une légende urbaine auprès des quartiers défavorisés. Les inégalités sociales immenses, entre des nantis outrecuidants et une plèbe aux abois, sert de toile de fond à une romance sentimentale entre deux héros que tout oppose.

Si la trame manque singulièrement de relief, Marie Lu propose une plume étonnamment vive et dynamique. Les amateurs d'action et de rythme soutenu ne risquent pas de s'endormir en butant sur des passages moins toniques. De la première page à la dernière page, le roman en compte environ deux cent quatre-vingt, on s'imprègne immédiatement des péripéties vécues par les deux personnages principaux. Malgré un format plutôt tourné vers un public adolescent, chacun, si on est amateur d'univers où les codes sociétaux contemporains se sont effondrés, trouve un réel plaisir à suivre les aventures tonitruantes et hautes en couleur de ces deux adolescents surdoués. On ne ressent pas de lassitude inopportune qui gâche la saveur de cette dystopie (style littéraire qui met en avant un monde où l'humanité court vers un avenir sombre, désenchanté).

Marie Lu est une écrivaine talentueuse qui parvient aisément à embarquer le lecteur dans son épopée futuriste désabusée et immorale. On attend la suite sans crainte tant ce livre reste divertisant de bout en bout. Pas légendaire mais sans faille !

On est sur les toits depuis sept heures seulement, mais c'est à peine si je le reconnais. Il est recroquevillé au centre du sceau de la République. Sa peau s'est assombrie et ses cheveux sont collés par la sueur. Du sang séché macule une longue mèche, comme si elle avait été trempée dans une teinture noirâtre.