Critique Hex [2017]

Black Spring est une petite ville américaine comme on en voit dans tous les téléfilms, paumée à l'orée d'une forêt, au milieu de la vallée de l'Hudson. On pourrait pourtant se croire à Derry tant la ville semble à la fois trop calme et effrayante. D'ailleurs, si vous allez à Black Spring, il vaut mieux que vous appréciez la ville car vous ne pourrez jamais en repartir...

Black Spring est hanté par une sorcière, une vieille femme décharnée aux yeux et aux lèvres cousues. Silencieuse, elle rôde, apparaît chez les gens à sa guise, et depuis plus de 300 ans. Sa menace est permanente, glaçante, et pourtant, les habitants parfois en viennent à oublier à quel point elle est dangereuse. Pour empêcher le reste du monde de découvrir la présence maléfique de cette femme, les habitants de Black Spring éloignent les familles souhaitant s'installer dans la ville, utilisent les nouvelles technologies pour suivre les mouvements de la sorcière (et oui il y a une application pour ça !) et ont confié leur secret à West Point, la fameuse académie militaire qui se situe non loin.

Né aux Pays-Bas, Thomas Olde Heuvelt place son histoire aux Etats-Unis, mais pas n'importe où : sur les restes d'un communauté de colons néerlandais, rendant "exotique" cette communauté de l'Hudson Valley. En effet, culturellement, les Néerlandais n'ont pas d'armes, un certain flegme et comme dit l'auteur, cette communauté a fini par trouver la sorcière non plus effrayante mais presque ennuyeuse, comme un élément pénible de la vie quotidienne. Traumatisé enfant par Sacrées Sorcières de Roald Dahl, il a toujours voulu écrire une histoire sur le thème de la sorcellerie. Plus tard, il découvre Stephen King, puis Clive Barker et Peter Straub qui vont l'influencer dans son écriture horrifique. Enfin, il se lance pour ce premier roman dont les droits ont déjà été acquis pour une série télévisée.

Le roman est partagé en deux parties. Dans un premier temps, le texte, parsemé de pointes d'humour plus ou moins noir, nous plonge dans la vie quotidienne des gens de Black Spring et leur cohabitation avec la sorcière. Le rythme s'accélère dans une deuxième partie de plus en plus effrayante. Le lecteur suit les habitants de cette ville étrange, en particulier, Steve et Tyler Grant, père et fils. A travers leur vie, nous rentrons nous aussi dans ce quotidien glauque et dérangeant. La famille est d'ailleurs un élément central du roman, le langage également : les jeunes emploient un vocable très différent, parfois violent et place le récit dans notre époque, rendant le texte très vivant.

Sans vous en dire plus sur l'intrigue, le roman aborde la notion de dilemme avec des choix poignants, une ambiance très particulière et pour un premier ouvrage, l'auteur peut clairement être fier de son œuvre. Stephen King lui-même a jugé le roman brillant et original. J'ai personnellement dévoré le livre en deux nuits, eu du mal à dormir tout en étant pressée de retrouver la famille Grant pour comprendre ce qu'était vraiment cette sorcière !