Joe Dante, le Gremlins d'Hollywood > Les années 2000

Les Looney Tunes pasent à l'action



La petite histoire : Ce début de siècle est très loin d'être prolifique pour le réalisateur mais, paradoxalement, avec recul, c'est à ce moment que beaucoup se mirent à reconnaître son talent d'auteur, en particulier grâce à sa participation à la série « Masters of Horror ». Cependant, avant d'arriver à cette fameuse série, il nous faut revenir à l'après « Small Soldiers », une période qui fut très dure pour le réalisateur. De 1998 à 2001, nous ne pouvons pas dire que Joe Dante travaille beaucoup, c’est même une période assez difficile, car l'échec de « Small Soldiers » lui coûte assez cher. Le réalisateur de Gremlins doit donc de nouveau se tourner vers la télévision pour tourner et réaliser 2 épisodes de la série « Night Visions » ; l'un intitulé « Quiet Please (épisode 6) » et l'autre « The Occupant (épisode 12) ». En 2003, il réalise un court métrage en 3D « Haunted Lighthouse » avec tout de même un beau casting puisque nous y retrouvons deux des acteurs de « Retour vers le futur » : Lea Thompson et Christopher Lloyd. La même année Joe Dante peut de nouveau réaliser un long métrage grâce aux « Looney Tunes passent à l'action ». Si on aurait pu croire que le réalisateur se s’était assagi afin de se remettre dans les bons souliers des producteurs, on constate qu’il n’en est rien. Pourtant, tout est là pour faire de cette aventure un gros succès : d'un côté, on y retrouve 2 icônes : Daffy Duck et Bugs Bunny, mais aussi des acteurs « banquables » avec Brendan Fraser (propulsés par « la momie ») et Jenna Elfman connue du public pour sa série « Dharma & Greg ». Rajoutez à cela un Timothy Dalton rejouant les espions. Dans « les Looney Tunes passent à l'action », Daffy Duck en a assez de servir de faire-valoir à Bugs Bunny. Raz les plumes de subir les pires avanies pendant que son éternel rival se contente de grignoter une carotte, de lancer "Quoi de neuf, docteur?" et de rafler les suffrages du public. Coup de chance, Warner Bros en a également plus qu'assez du palmipède râleur, que les sondages de popularité condamnent clairement aux oubliettes. La vice-présidente Comédie, Kate Houghton, blonde piquante et totalement dénuée d'humour, met donc fin au contrat de Daffy. Mais Daffy n'a, bien sûr, aucune envie d'abandonner les Frères Warner, ni son vieil antagonisme avec Bugs. Tout ce qu'il veut, c'est être reconnu à sa juste valeur. En attendant, désormais sans domicile, il décide de suivre le jeune DJ Drake, qu'il a rencontré dans les studios Warner et qui cherche à retrouver son père kidnappé par des malfaiteurs. Les petits détails du film : « les Looney Tunes passent à l'action », regorge de détails aussi incroyables qu'irrériventieux. Comme si Joe Dante n'avait pas retenu les leçons de son expérience sur « Small Soldiers ». Il ne diminue en rien son appétit vorace pour glisser des points de vues et continue ses hommages, que seuls quelques un pourront saisir. Plus que tout il signe ici son suicide professionnel avec dès les 5 premières minutes du film, une attaque directe face au système hollywoodien (certes avec humour), mettant en avant des frères Warner, entourés de mauvais conseillé, cherchant avant tout les bénéfices par rapport à des statistiques plutôt qu'une quelconque recherche d'idée créative.
 



Corman réalisateur d'un "Blockbuster" Hollywoodien !? ^^

« les Looney Tunes passent à l'action » est un film impossible à juger à la première lecture. C’est à force de visionnages et d'analyses que l'on repère toutes les petites subtilités qui y sont glissées par le réalisateur. Comment ne pas sourire lorsque Joe Dante met en scène un Roger Corman réalisant un Batman pour le compte de la Warner Bros ; comment ne pas rire devant un Timothy Dalton cabotin parodiant son rôle de James Bond. De même qu'il est très difficile de ne pas crier au génie devant l'incroyable scène se déroulant au Louvre, au cours de laquelle Daffy et Bunny se transforment à mesure qu'ils passent de tableau en tableau, s’imprégnant à chaque fois du style de la toile. Cependant, la scène la plus « Dantesque » est certainement la séquence se déroulant dans la zone « 52 ». Dans cette séquence de cinq minutes on y retrouve tout le côté cinéphile du réalisateur qui, lors d'un plan-séquence, nous dévoile l'Alien des « survivants de l'infini », Robby de « planète interdite », « L'Homme de la Planète X », « les Daleks (contre Dr Who) » ou enfin les cerveaux de « l'Attaque des Cerveaux mutants ». Un vrai bonheur montrant que Dante apprécie toujours autant d’instruire les plus jeunes en leur montrant des vieux films de SF. À noter que dans la même séquence Dante n'oublie pas pour autant d’y glisser « Marvin » le martien « Toon » de la Warner et de faire hommage à l'acteur Kevin McCarthy pour son rôle dans « L'invasion des profanateurs de sépultures ». Ainsi à travers de multiples références, Dante montre ce que le cinéma dégage de meilleurs… mais aussi le côté le plus sombre de cette industrie.
 



La Zone "52" un très bel hommage aux films de jeunesse de Dante

Côté casting on retrouve donc indirectement Kevin McCarthy, mais aussi directement lors de courtes séquences Robert Picardo et Dick Miller indéniable fidèle qui aiment à continuer à apparaître dans les films du réalisateur. À noter que ce film est tristement la dernière collaboration entre Joe Dante et le compositeur Jerry Goldsmith, ce dernier nous ayant quitté en juillet 2004. L'après Looney Tunes … Une fois encore, le public ne suit pas la démarche d’un Joe Dante qui désirait offrir plus qu'un film « pop corn ». Ainsi, après l'échec de « Small Soldiers » autant dire que le réalisateur est définitivement sur la liste noire des producteurs. Joe Dante ne fait plus rien jusqu'en 2006 ou il travaille sur un segment de « Trapped Ashes » au côté de Sean S. Cunningham, John Gaeta, Monte Hellman et Ken Russell. Vient enfin la reconnaissance avec les « Masters of Horror ». Mick Garris lui proposant de signer l'un des 13 épisodes. Bien que possédant un budget réduit, Joe Dante a en retour le droit à une totale liberté dans le choix de la mise en scène et du script. Dante accepte et porte son choix sur la nouvelle de Dale Bailey : Death & Suffrage. Réadaptée en scénario par Sam Hamm, elle donne un épisode qui s'intitule « Homecoming ».
 



images de l'épisode « Homecoming » de la série « Masters of horror ».

Tout le monde semble d'accord sur le fait que « Homecoming » est l'un - sinon le meilleur - épisode de la série. Magistralement mis en scène, d'une incroyable intelligence, « Homecoming » montre tout le potentiel d'un Dante remonté et bien décidé à montrer ce dont il est capable. A la fois proche d’un film de zombie et de Small Soldiers, il transforme ceux qui, au premier abord, auraient pu être des méchants en gentils. Joe Dante n’en oublie pas pour autant de glisser des références cinématographiques – comme ce plan où l'on peut voir sur des pierres tombales les noms de George A. Romero, Jacques Tourneur et Jean Yarbrough. Par contre, cette fois, seul Robert Picardo fera partie du casting de Dante.


 



L'année suivante, Dante signe un nouvel épisode des « Masters of Horror » avec « The Screwfly Solution ». Adapté d'une nouvelle d’Alice Sheldon, le récit se veut moins percutant que « Homecoming ». La faute à une durée trop courte par rapport à l’ampleur du sujet, mais il ne demeure pas moins que l'épisode est l'un des meilleurs épisodes de la seconde saison.



images de l'épisode « The Screwfly Solution » de la série « Masters of horror ».

Joe Dante, après ce come-back, ne retrouve pas pour autant un retour vers le grand écran et il doit cosigner un téléfilm (« The Greatest Show ») et un épisode de « CSI: NY (Boo (saison 4 épisode 6)) ». Pourtant, l'année 2009 devrait marquer le grand retour au cinéma du réalisateur avec « The Hole », dont le tournage devrait débuter d'ici très peu de temps. Le réalisateur a également travaillé un moment sur un projet intitulé « Bat Out of Hell » , mais pour l'instant, il semblerait que celui-ci ait pris un coup dans l'aile. Pour ce que l'on sait de « The Hole », c'est que ce dernier raconte l'histoire de deux frères qui découvrent dans la cave d'une maison, un trou semblant ne pas avoir de fond. En fait, ce trou mènerait à faire apparaître les pires cauchemars. D'un certain point de vue on peut que ce réjouir de voir Joe Dante rattaché à ce type de projet, qui plus est annoncé en 3D.