Le monde de Narnia: interview de Michael Flaherty
Le responsable de production nous en dit plus

Voici une interview très intéressante accordée le 4 octobre au journaliste Mark Moring par Michael Flaherty, cet homme de 37 ans et père de trois jeunes enfants, qui n'est autre que le président de Walden Media, société derrière l'adaptation de L'Armoire Magique – le deuxième volet de la Saga de C.S. Lewis, Les Chroniques de Narnia - avec Disney.
Dans cette interview, il revient sur la genèse du projet, et la sortie du film qui se rapproche de jour en jour, mais aussi sur les levers de boucliers qu’a créé dans les milieux chrétiens américains la nouvelle de la mise en chantier de l’adaptation.
Narnia : La pression devient démente
J'ai cru comprendre que la fusillade du Lycée de Columbine a eu un effet sur votre vie et votre foi, et a même joué un rôle dans la création de Walden Media.
Micheal Flaherty: Je me suis senti très déprimé après Columbine, mais j'ai été réconforté en lisant à quel point la foi de certaines des jeunes victimes était profonde, spécialement Cassie Bernall et Rachel Scott. L'une des choses que j'ai trouvé intéressante était que ces enfants aimaient les films. Le film préféré de Cassie était Braveheart et je crois que c'était aussi le cas pour Rachel. En comparaison, les films favoris des tueurs étaient du genre Tueurs Nés. J'ai décidé que je voulais trouver un moyen de faire des films meilleurs, qui pourraient élever les gens et les encourager, particulièrement pour un public de cet âge. Donc, j'ai appelé mon ancien camarade de chambre à la fac, Cary Granat, qui était directeur de Dimension Films à l'époque. Cary voulait lui aussi réaliser quelque chose de plus stimulant pour la famille. Tout cela vient de la prise de conscience que les médias influencent les coeurs et les esprits. Nous voulions trouver un moyen d'allumer quelques bougies, plutôt que de se contenter de maudire l'obscurité, et de faire quelques bons films. Comment décririez-vous ce que fait Walden Media aujourd'hui ?
Flaherty: Nous essayons d'être une voix pour les parents, les enseignants, les pasteurs, les leaders de la jeunesse, les bibliothécaires - tous les gens qui travaillent activement avec les enfants. Nous trouvons quelles sont les histoires qui vont motiver les enfants à aimer lire. Et nous avons une superbe liste : notre premier film était Holes, et nous avons fait Because of Winn-Dixie il y a quelques mois. Certains disent que Phil Anschutz est juste l'homme d'argent chez Walden. Comment décririez-vous son rôle ? Flaherty: Il est intimement impliqué. Cary et moi le voyons plusieurs fois par semaine. Quand nous l'avons rencontré pour la première fois en 2000, et qu'il a décidé qu'il voulait investir dans la compagnie, il était impliqué dans tout le processus, de l'écriture des déclarations à l'identification des possesseurs des droits. Il nous a demandé quels livres nous voudrions porter à l'écran. Nous avons parlé de L'Armoire Magique et avons appris que lui aussi voulait vraiment que ce film soit réalisé.
Quelques-uns des films de Walden, comme Holes ou Winn-Dixie ont rapporté pas mal d'argent. Mais Le tour du monde en 80 jours et I Am David ont été des désastres financiers. Est-ce que Walden peut se le permettre ?
Flaherty: Nous sommes tout à fait conscient de tout cela. C'est l'économie d'Hollywood qui dit si vous réussissez. Si deux projets sur dix marchent, nous sommes dans la moyenne. Nous sommes contents de ces films, et je pense qu'ils nous ont appris quelques grandes leçons.
Comme quoi ? Flaherty: Le tour du monde en 80 jours, par exemple, n'était pas une adaptation très fidèle, contrairement à nos autres livres. Nous avons pris quelques libertés avec le livre. Mais je n'aime pas trop parler de celui-ci.
Alors, quelles leçons avez-vous appris de Winn-Dixie et Holes ? Qu'avez-vous fait de bien avec ces films ?
Flaherty: Nous avons appris à écouter les enseignants, les bibliothécaires et les parents, parce qu'ils savent quelles histoires les enfants adorent.
Vous avez dit que vous aviez commencé à parler de Narnia en 2000. Qu'avez-vous fait à partir de là ? L'avez-vous simplement mis en attente ?
Flaherty: Pas du tout, nous l'avons plutôt mis dans nos priorités. Nous devions trouver qui avait les droits, et ça nous a pris presque toute l'année 2001 - les discussions avec Douglas Gresham et les légataires de C. S. Lewis. Phil et Douglas ont eu pas mal de grandes discussions, et je pense que Phil a vraiment gagné la confiance de Douglas sur le fait qu'il allait faire une adaptation fidèle. Ce qui n'a pas du être facile parce que les héritiers de Lewis sont assez protecteurs.
Flaherty: Très protecteurs. Et je suis reconnaissant que Douglas nous ait donné une chance, parce qu'à cette époque nous n'avions encore sorti aucun film.
Pourquoi vous être associés avec Disney pour L'Armoire Magique ?
Flaherty: Parce que le marketing et la distribution d'un tel film est une affaire énorme. Nous avons le contrôle créatif total pendant que Disney contrôle le marketing et la distribution. Il n'y a pas de meilleur studio pour faire ça et créer une grande franchise autour du film. Nous sommes extrêmement satisfaits du travail qu'ils ont fait.
Mais le choix du réalisateur et toutes les grandes décisions reviennent à Walden ?
Flaherty: Oui. Et tout était décidé avant que nous signions avec Disney.
Beaucoup de croyants boycottaient Disney depuis un moment. Et Narnia est très cher à cette audience, donc, il y a une certaine ironie dans le fait que Disney soit impliqué. Avez-vous pensé à ça avant de signer avec eux ?
Flaherty: Tout ce à quoi nous avons parlé est que nous avions besoin de faire une adaptation fidèle de ce livre. C'est notre seule prérogative. Nous voulions une garantie que nous aurions le contrôle là-dessus, et Disney a parfaitement compris. Tout le monde était d'accord sur la nécessité de rester fidèles au livre.
Donc, si les gens ont des griefs à propos du film, ils doivent se tourner vers Walden et non Disney ?
Flaherty: Absolument. Nous voulons que les parents, les pasteurs, les enseignants et les bibliothécaires soient vraiment à l'aise avec Walden. De cette manière, s'ils voient notre logo sur l'affiche d'un film, ils sauront ce à quoi s'attendre. Nous espérons qu'avec Holes et Winn-Dixie, les gens commencent à se faire une idée.
Quel est votre investissement personnel dans le film ?
Flaherty: J'ai été impliqué tôt dans le script, jusqu'à ce que tout le monde le trouve bien - et la personne clé à consulter en terme de fidélité était Douglas Gresham.
J'ai lu quelque part que les gens impliqués dans ce film ne sont plus autorisés à respirer sans la permission de Douglas Gresham. Est-ce une description fidèle de son contrôle créatif sur le film ? Flaherty: Cette citation est une mauvaise interprétation de ce qui se passe, parce que la collaboration se déroule à merveille. Je pense que la personne qui a dit ça voulait dire que personne n'a envie d'aller plus avant sur quelque chose si Douglas ne le sentait pas très bien.
Pensez-vous qu'il ressent beaucoup de pression à être la conscience de C. S. Lewis, à le représenter dans ce projet ?
Flaherty: Ce qui est incroyable dans ce projet c'est que tout le monde ressent cette pression. Tout le monde a conscience de cette monumentale responsabilité. Tout le monde sait qu'il nous faut être aussi proches de la perfection qu'il est humainement possible. C'est là que nous plaçons la barre.
Un autre de vos films Charlotte's Web sort l'an prochain. Le réalisateur raconte que les gens qui apprennent qu'il va être adapté réagissent tous en disant « Wow, c'est super ». Mais leur seconde réaction est « Ne gâchez pas tout ». S'ils disent ça à propos de Charlotte's Web, qu'est-ce qu'ils doivent dire pour Narnia ?
Flaherty: C'est encore pire, surtout venant des profs, des parents et des bibliothécaires. Ils ressentent vraiment un sentiment de propriété sur l'histoire. Donc, nous ne voulons pas décevoir tous ces gens aux niveaux artistique ou de la commercialisation.
Ressentez-vous vous vraiment que tout ça est beaucoup plus énorme ?
Flaherty: Sans aucun doute.
Parce que ce ne sont pas juste les bibliothécaires et les parents, il y a toute une culture parallèle.
Flaherty: C'est mon pasteur. Vous voyez ce que je veux dire ? C'est toute la responsabilité que j'ai. Je veux dire, c'est...Oui, la pression devient démente. Quand j'ai appris qu'ils allaient faire un film avec Le Seigneur des Anneaux, je me rappelle avoir pensé « Ne gâchez pas tout ». Mais je me suis aussi dit que si je restais pendu à toutes les notes et les titres, à chaque ligne de dialogue, je n'allais jamais pouvoir apprécier les films. Une fois que j'ai pris cette résolution, j'ai vraiment adoré les films, Peter Jackson a vraiment réussi.
Les gens doivent-ils aborder Narnia de la même manière ? Doit-on s'attacher à chaque petit détail tel que l'a écrit Lewis ou doit-on surtout être attentifs au fait que vous ayez respecté les grandes lignes ?
Flaherty: Je penche pour la dernière solution. Je ne cherche pas d'excuse, mais ce sont deux médias différents, le livre et le film. Holes et Winn-Dixie sont des adaptations très fidèles, mais il y a toujours des choses que l'on doit faire pour amener l'histoire à l'écran. C'est la même chose avec Narnia, nous n'avons pas pris 100% des dialogues du livre pour les mettre dans le script. Mais je pense que les gens sont en droit d'espérer que ce sera l'adaptation qu'ils attendent.
L'une des plus grandes préoccupations des Chrétiens est de savoir si Aslan sera réduit à un lion effrayant ou s'il demeurera ostensiblement cette figure Christique.
Flaherty: Je pense que ce qui est évident pour certaines personnes dans le livre, ne l'est pas pour d'autres. Si c'est évident pour vous dans le livre, ça le sera aussi dans le film. Je pense que c'est la réponse diplomatique officielle ! (Rires)
Qu'avez-vous appris de Peter Jackson et du Seigneur des Anneaux que vous pourriez appliquer à la franchise de Narnia ?
Flaherty: La première chose que nous avons appris de Peter est l'importance d'avoir un réalisateur visionnaire et qui a une vraie passion pour les livres. C'est ce que nous avons avec Andrew Adamson, qui a lu ces livres des millions de fois. Cela fait des années qu'il rêve et imagine la manière dont il pourrait les porter à l'écran.
Qu'est-ce que vous attendez le plus avec la sortie des films et qu'est-ce qui vous rend le plus nerveux ?
Flaherty: Ce que j'attendais le plus est déjà en train d'arriver. La semaine dernière, L'Armoire Magique était première de la liste des best-sellers du New York Times. Et Holes ainsi que Winn-Dixie étaient aussi premiers. Le but de Walden est de ramener les gens au livre, et de les amener non seulement à aimer ce livre, mais à développer un amour plus général de la lecture. Et quant à ce qui me rend le plus nerveux, je crois que j'essaye juste de suivre le conseil de Paul dans sa 4ème lettre aux Philistins et qui est de n'être anxieux à propos de rien mais de prier à propos de tout.
Pensez-vous vraiment vous en tirer avec cette réponse ? (Rires) Sérieusement, êtes-vous nerveux au sujet de box office ?
Flaherty: Maintenant que nous savons que nous allons offrir cette adaptation fantastique et fidèle, je pense que nous avons tous accepté le fait qu'après ça, les choses ne sont plus en notre contrôle. Disney mène une campagne marketing parfaite. Andrew nous a donné un film que nous trouvons parfait. Après, nous ne pouvons pas faire grand chose de plus.
Une traduction de Thys du génial site Elbakin.net


Auteur : Nicolas L.
Publié le samedi 8 octobre 2005 à 16h57
Source : Elbakin

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