Critique Dayal de Castaka: Le Premier Ancêtre #1 [2007]
Avis critique rédigé par Lucie M. le mardi 1 mai 2007 à 12h20
Mes ancêtres, ces barbares !
Quand on ne connaît pas l’univers des Méta-Barons, ainsi que celui de L’Incal, nous pouvons être légèrement impressionné lorsque nous entamons notre lecture de cette pré-quelle a La Caste des Méta-Barons. Et bien il ne faut pas puisque Le Premier Ancêtre peut se lire indépendamment et il peut même donner envie de lire la Caste des Méta-Barons. Je peux même en témoigner puisque j’ai toujours eu envie de m’attaquer cet univers créé par Jodorowsky mais je n’ai jamais eu l’impulsion favorable. Avec la lecture du premier tome de la série Daya de Castaka et bien cette envie de découverte a été la plus forte et j’ai enfin commencé la Caste des Méta-Barons. J’ai pu ainsi profité de la sortie des intégrales compact/pocket à 9€99 des Humanos, une nouvelle collection spécialement créée pour rééditer en pocket les séries phares des Humanos dont le premier tome réunissait les trois premiers tomes de La Caste des Méta-Barons. Un pure régal je vous dis pas ! Si je vous le dis, je me suis régalée même si le format de ces compacts/pocket peut rebuter les fans de BDs.
Mais revenons-en à ce premier tome de la série Daya de Castaka qui débute au moment où Bérard de Castaka initie son gendre Othon Von Salza sur l’histoire de cette grande famille pour qu’il puisse lui transmettre la marque des Castaka. Vous pouvez vous reporter au premier tome de La Caste des Méta-Barons, Othon Le Trisaïeul, est vous verrez la coupure qu’a utilisé Jodorowsky pour placer ce début d’histoire. C’est évidemment bien réalisé et même si ce n’est plus Juan Gimenez au dessin, son remplaçant Das Pastoras assure comme une bête. D’ailleurs, leur coup de crayon se ressemble légèrement sauf que celui de Pastoras est plus brut. Das Pastoras est également connu pour sa série Les Hérésiarques dont le second tome vient de paraître chez les Humanos. Son dessin est très proche de ce que pourrait être un tableau réalisé par Bosch ! Particulièrement, dans Les Hérésiarques où beaucoup de démons monstrueux évoluent dans un mysticisme ambiant. La ressemblance se situe également dans la distinction du crayonné que l’on peut facilement distinguer. En clair, on distingue clairement que le dessinateur n’est pas passé sur un PC et que les planches se rapprochent plus d’un tableau de maître que d’une planche dessinée numériquement.
Nous voilà donc sur Ahour-La-Naine à une époque reculée où deux clans s’affrontent férocement. Au sud, les Amakura pourvus d’étendards rouges et au nord, les Castaka pourvus d’étendards blancs. Cet affrontement dure depuis des siècles et les deux clans ethniques se font la guerre avec rage en respectant leur propre code de l’honneur. Des codes de l’honneur qui bannissent les armes technologiques. Mais la folie de ces hommes ira loin jusqu’au jour où la reine Oriela, du clan Castaka, sera enlevée puis violée par le souverain des Amakura. De cet acte barbare naîtra Daya. Celui-ci sera le seul mâle pouvant encore enfanter les femmes de Ahour-La-Naine puisque dans leur folie belliqueuse un acte incommensurable fera de tous les hommes de cette planète des êtres stériles. Néanmoins, Dayal sera traité comme un animal, un étalon à partir de ces 13 ans qui aura pour mission de rétablir la natalité de Ahour-La-Naine ! Une grande responsabilité qui ne lui voudra pas le remerciement de son pseudo roi adoptif. Daya sera congédié par les siens et vivra en reclus. Jusqu’au jour où il rencontrera l’amour et sera bien obligé de défendre ces deux filles jumelles contre les sbires du Techno-Pape qui viendront envahir Ahour-La-Naine. La famille de Daya s’enfuira dans l’espace et…là je ne peux vous en dire plus puisqu’il faudra que le second tome sorte !
Le Premier Ancêtre retrace les origines des Méta-Barons, ces guerriers ultimes, ces guerriers androïdes dont l’arbre généalogique-rime avec parricide. Une histoire familiale digne d’une des tragédies grecques de Sophocle avec son lot de meurtres ineffables et de luttes intestines complexes où la technologie sera constamment une sorte de menace représentée par l’Empire du Techno-Pape. On remarquera également un grand changement dans la trame scénaristique de Jodorowsky puisqu’aucun humour ne viendra se placer dans l’histoire. Celle-ci sera dramatique du début à la fin. Point de place à des petites vannes par-ci par-là ou a des dialogues marrants allégeant le scénario. Que dalle ! Une immersion complète dans une histoire brutale. C’est effectivement très réussi et grâce au coup de crayon de Das Pastoras le côté barbare et tragique de l’histoire ressort encore plus. Comme je le disais plus haut Gimenez n’est plus là et Das Pastoras le remplace très bien. Pastoras excelle dans la représentation des visages durs et brutaux des divers protagonistes et leur confit un physique très aborigène. D’ailleurs, point de donzelles graciles aux visages émaciés et harmonieux. Les femmes ont presque le même faciès dur et grossier que les hommes. Les scènes de bataille sont grandioses et sanglantes comme les doubles pages 13 et 14 où l’on voit les deux clans ethniques s’affronter avec hargne. C’est de la folie ! Cette représentation est à l’exemple d’une toile de maître et je ne le répéterais jamais assez.
La conclusion de Lucie M. à propos de la Bande Dessinée : Dayal de Castaka: Le Premier Ancêtre #1 [2007]
Le Premier Ancêtre entame une nouvelle extension de l’univers de L’Incal très riche créé par Jodorowsky et la série Daya de Castaka y vient se greffer avec faste. Dans la même veine que certains écrits de Sophocle, le scénario de Jodorowsky emportera le lecteur dans les méandres d’un arbre généalogique hors du commun et où des événements tragiques y viendront se greffer tels des hyènes excitées par l’odeur du sang. Comparaison outrancière, je l’avoue, mais qui reste assez proche de l’ambiance qui règne dans cet album puisque point de trace d’humour dans Le Premier Ancêtre, le tout reste très sérieux et nous sommes conquis par le ton que prend le récit des origines des Méta-Barons. De plus, le dessin de Das Pastoras renforce ce côté brutal et dur du récit puisque même si celui-ci reste assez proche de celui de Gimenez, de par leur confection, la vision primitive que fait véhiculer le tracé de Pastoras exalte le scénario dramatique d’un Jodorowsky plus qu’en forme !
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