Critique La légende de Lucy Keyes [2007]

Avis critique rédigé par Nicolas L. le vendredi 10 octobre 2008 à 14h23

Chez les fantômes, rien de nouveau...

Les films de fantômes ne sont en général guère surprenants. On y trouve les habituels éléments « spectraux » qui se manifestent dans des maisons, des bois, des navires, etc. En général, ces entités ectoplasmiques manifestent régulièrement l’expression d’un mécontentement, soit suite à la profanation d’un terrain sacré, ou l’absence de sacralisation d’un défunt (en général assassiné). Et leur problème principal est qu’ils éprouvent des difficultés dans les rapports sociaux avec les vivants, soit ils s’avèrent être super-timides, soit ils cassent tout sans expliquer leurs motivations… ce qui, avouons-le, les rend très antipathiques.
La Légende de Lucy Keyes, qui prend ses véritables racines dans le folklore des colons d’Amérique de Pennsylvanie suit à la lettre ces principes. Si l’on décortique un peu le bestiau, on se rend compte que le film de John Stimpson est de structure « bicolore » ; dans le fond, il se rapproche du mythe de l’Emmuré Vivant alors que la forme colle plus aux films de poltergeist. Les détails du script, aux, nous proposent d’accompagner une famille venant de subir un fort traumatisme avec la perte d’un enfant (élément narratif d’ailleurs récurent dans ce type de métrages) qui s’installe dans une vieille ferme depuis longtemps inhabitée. Le chef de famille, Guy, a en effet déniché un boulot d’ingénieur dans la région et est chargé par la municipalité d’installer un réseau d’éoliennes.


C’est à ce moment que se mettent en place les différentes pièces de ce puzzle fantastique pour enfant de moins de dix ans (au regard du faible nombre de pièces) ; un terrain d’aménagement que certains citoyens aux regards obliques veulent empêcher ; un voisin complètement psycho qui nourrit ses cochons avec des coquilles d’huitres ; une spéculation immobilière un peu louche ; une mère de famille non encore remise de la perte d’un enfant (apparemment, elle ne suit d’ailleurs pas de traitement psychologique) ; et enfin, une sombre histoire d’enfant disparue, il y a 250 ans, et d’une mère morte de chagrin. Tous ces éléments sont alors assemblés de manière très conventionnelle (c’est le moins que l’on puisse dire, on se croirait dans un épisode des Feux de l’amour au niveau des innovations) par John Stimpson, mais il ne parvient cependant pas à occulter les nombreuses incohérences qui plombent le récit (dont une particulièrement dérangeante car elle a un rapport direct avec l’énigme).
La famille Cooley va donc avoir à faire face, non seulement aux fantômes qui hantent les bois voisins, mais aussi à l’antagonisme d’une partie de la population locale. Le film se concentre d’ailleurs plus sur ce second aspect, du moins durant la première heure. Comme dans tous ces types de thrillers « atmosphériques », on a alors affaire à un déballage de dialogues pleins de sous-entendus entre des interlocuteurs plongés dans des attitudes pleines d’atermoiements vraiment peu réalistes. Et ça, c’est particulièrement agaçant. Par exemple, lorsqu’une villageoise échange avec Jeanne Cooley des propos emplis de mystères, elle ne lui demande pas des éclaircissements, non, elle se casse… Moi, je ne sais pas, si je sens que l’on menace la vie de mes enfants (c’est ce que Jeanne Cooley croit), j’exige quelques explications… Non ?

Les manifestations surnaturelles se multiplient durant la dernière demi-heure, nous enlevant un doute : La légende de Lucy Keyes est bien un film fantastique. A partir de ce moment, les méchants vont révéler leurs vrais visages et, sans toutefois changer de rythme, le métrage va prendre une orientation plus horrifique. Cela se passe plus ou moins naturellement, au gré des séquences. Par exemple, la scène de l’intrusion du spectre de Martha Keyes dans la chambre de la jeune Lucy (oups, purée, désolé, j’ai gaffé, vous avez pigé la moitié de l’intrigue avant d’avoir vu le film) Cooley arrive un peu comme un cheveu sur la soupe et impose une ambiance très « graphique » qui ne se reproduira guère. De même que certains passages dans lesquels certains protagonistes ont des attitudes allant à l’envers de leurs intérêts, juste pour coller à l’aspect « résurgence légendaire ». Mais dans l’ensemble, rien de scandaleux ni de ridicule.
Du coté de l’interprétation, j’ai eu le plaisir de voir à l’écran Julie Delpy, la plus frenchie des actrices américaines (ou l’inverse), une comédienne de caractère que j’apprécie. Elle s’en sort très bien, sans trop en faire, et elle parvient sans grand mal à entrer dans la peau de cette mère de famille éprouvée, en évitant tout effet pathos qui aurait cassé le profil de Jeanne Cooley. A coté d’elle, Justin Theroux est un peu fade, mais vu qu’il est chargé d’interpréter le dindon de la farce, finalement son air crédule colle bien au personnage. Plus étonnante est la performance de Brooke Adams, une désormais sexagénaire devenue assez rare sur les écrans. C’est la première fois que je la vois dans un rôle antipathique et, mis à part le fait qu’elle se voit infligé un doublage catastrophique en VF, elle s’en assez bien avec un personnage pourtant assez bancal dans sa construction. Quand aux seconds rôles, on retiendra la charismatique performance de Mark Boone Junior dans la peau d’un fermier crade et acariâtre.

La conclusion de à propos du Film : La légende de Lucy Keyes [2007]

Auteur Nicolas L.
45

Avec ses allures de téléfilm pour soirées M6, Le légende de Lucy Keyes ne casse pas trois pattes à un canard. Le métrage de John Stimpson n’en est pas pour autant mauvais, il manque juste d’originalité pour se démarquer du lot de ghosts movies que l’on mate en boucle à la télévision. L’interprétation est convenable, l’intrigue se laisse suivre. Bref, une œuvre à réserver pour les dimanches après-midi pluvieux.

On a aimé

  • Une intrigue qui se laisse suivre
  • Une interprétation correcte

On a moins bien aimé

  • Un scénario manquant d'originalité
  • Une réalisation académique et datée
  • Quelques incohérences
  • Vraiment pas effrayant, ni horrible, ni même angoissant

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