Critique Jusqu'en enfer [2009]
Avis critique rédigé par Vincent L. le vendredi 29 mai 2009 à 11h15
Retour aux sources pour Sam Raimi
Après avoir passé près de dix ans de sa vie sur les adaptations cinématographiques des aventures de l'homme-araignée, dont le troisième volet, bien plus faible, n'avait pas su faire l'unanimité, il semblait compréhensible que Sam Raimi sorte quelque peu du circuit hollywooodien pour pouvoir recharger ses batteries et reprendre du poil de la bête. Mais là où d'autres profitent de tels breaks pour s'isoler du reste du monde ou partir pour de longues et lointaines vacances bien méritées, il semblerait que Raimi ait eu quant à lui besoin de revenir à un cinéma de dimension plus humaine, de retourner aux sources de sa carrière en mettant simplement en scène un petit film d'horreur bien regressif façon Evil Dead II.
Et ce ne sont clairement pas ses fans de la première heure qui ont été déçu de ce choix ! Voir l'un des maîtres incontestés du genre revenir à ses premières amours, voilà qui annonçait d'ores et déjà un spectacle rejouissant, sorte de revival aussi bref que jouissif d'une époque aujourd'hui revolue. C'est ainsi que l'équipe de L'armée des ténèbres (Sam et Ivan Raimi au scénario, Robert G. Tapert à la production) s'est réunie pour accoucher d'un nouveau script prétexte à une nouvelle "farce" horrifique, utilisant tous les clichés inhérents à ce cinéma de genre pour mieux pouvoir s'en moquer. Néanmoins, loin de n'être qu'une nouvelle comédie potache à la Scary Movie, le film des frères Raimi traduit ce faisant un vrai respect et démontre un véritable amour pour ce type de cinéma trop souvent brocardé.
Pourtant, Jusqu'en enfer n'arrive jamais à se hisser à la hauteur des précédentes oeuvres de son réalisateur, ne se posant ainsi que comme un élément mineur dans sa filmographie aujourd'hui très riche. Probablement conscient d'avoir fait le tour de ce qu'il pouvait faire dans ce genre cinématographique, Sam Raimi s'en était allé vers un autre cinéma, plus sérieux - plus respectable ou plus adulte diront certains - pour lequel il a réalisé quelques pièces maîtresses (Un plan simple notamment). Son retour dans le cinéma de genre confirme cette impression en ce qu'il ne réinvente jamais quoique ce soit - chose qu'il avait réussi à faire dans les premiers Evil Dead - mais ne se contente que de reprendre des ficelles déjà pré-faites et de les réintroduire dans un nouveau-long métrage.
Ainsi, si sa réalisation est techniquement irréprochable, à mi-chemin entre la comédie d'horreur burlesque et le film de peur, Sam Raimi ne se contente ici que de livrer un hommage au cinéma bis, mais surtout à son propre cinéma. De nombreux clins d'oeil foisonnent, on pense beaucoup à Evil Dead ou à Mort sur le grill, mais il n'est jamais vraiment bon qu'un cinéaste commence à s'autoréférencer, cette technique signifiant très généralement que ce dernier n'a plus forcément grand chose à dire. S'il n'y a donc aucun semblant d'inventivité qui ressort de Jusqu'en enfer, il semble cependant judicieux de replacer le film dans son contexte : il apparaît ainsi de manière assez flagrante que Sam Raimi n'a voulu retourner dans ce genre que pour se faire plaisir, sans pour autant avoir derrière la tête de véritables velléités artistiques.
Néanmoins, si cette absence réelle d'inventivité n'aurait pas du être à ce point génante, elle s'en trouve quelque peu accentuée par la qualité navrante du script du film. Si Sam et Ivan Raimi ont repris la formule de Evil Dead - une histoire bateau qui accumule les pires clichés du genre - ils ont cette fois poussé la chose encore plus loin en accouchant d'un scénario vraiment nul. Si Sam Raimi n'avait pas été aux commandes, Jusqu'en enfer n'aurait ainsi pas seulement été un mauvais film, il aurait été un vrai nanar à peine digne de passer en seconde partie de soirée sur NRJ12 ! Ce dernier possédant cependant une structure correcte au niveau du cheminement de l'histoire - ce qui lui évite de n'être qu'une succession de scènes chocs à peine reliées les unes aux autres - il fait accuser au film un semblant de chutes de rythme pendant les passages où l'histoire avance ; semblant simplement, car il ne s'agit pas réellement de cela, mais simplement du fait que l'on se fiche royalement de ce qui nous est raconté.
Enfin, il est tout de même à noter que le film est vraiment drôle et réserve de belles et grandes scènes très burlesques. Toutefois, deux types d'humour cohabitent dans Jusqu'en enfer. Le premier s'apparente à ce qui avait été mis en place dans le premier Evil Dead, c'est à dire une utilisation à outrance des pires clichés du genre qui ferait passer le film pour un sombre étron auprès d'un public non initié (l'héroïne va dans un cimetière, c'est tout de suite un cimetière gothique et un orage se déclenche alors qu'il faisait beau quelques plans auparavant) ; mais, un peu comme si Sam Raimi avait peur que le public ne comprenne pas ce second degré, il injecte systématiquement à la suite un humour plus gras, à la Evil Dead II, toujours aussi drôle, mais, avouons le, nettement moins pertinent.
La conclusion de Vincent L. à propos du Film : Jusqu'en enfer [2009]
Avec Jusqu'en enfer, Sam Raimi s'est payé une virée rafraichissante dans le cinéma d'horreur de sa jeunesse ! Si l'on pourra repprocher au film son manque flagrant de créativité - mais en était-ce vraiment le but ? - les plus vieux retrouveront avec plaisir le cinéma régressif du maître et resteront admiratif de la facilité avec laquelle ce dernier sait passer de la comédie burlesque au film qui fait peur.
On a aimé
- Une réalisation techniquement remarquable,
- Quelques scènes d'anthologie,
- Vraiment drôle,
- Belle photographie.
On a moins bien aimé
- N'invente strictement rien,
- Scénario vraiment nul.
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