Critique Les geoles du diable [2009]
Avis critique rédigé par Nicolas L. le jeudi 11 mars 2010 à 18h27
The Revenge of Voodoo Dolls
Pour avoir été embarquée dans une sombre histoire de braquage de magasin qui a finalement mal tournée, la jolie Eva se retrouve condamnée à six mois de détention dans un établissement d’état disciplinaire. Elle va alors découvrir à ses dépends que la vie n’y est pas vraiment rose, notamment lorsque l’on a pour codétenues des garces sadiques et comme gardiens de sales pervers. Et comme, de plus, la directrice, une vieille peau aigrie, ne vaut guère mieux…
Tiens, cela faisait longtemps que je n’avais pas vu un WIP (Women in prison, ou film de prison de femmes, pour les anglophobes). Il faut dire que ce genre bien bis (contenant souvent des éléments de nazisploitation, de nunsploitation ou de film de Jungle), qui connut ses moments de gloire dans les années 70, est aujourd’hui tombé en désuétude. Dans ces années là (en fait, de la fin des années 60 au milieu des années 80), il ne se passait pas un mois sans qu’un film de genre exposant des nanas à demi - ou entièrement - dénudées subissant mille sévices n’apparaisse sur les écrans et bon nombre de réalisateurs connus, comme Jesus Franco ou Bruno Mattei se sont pliés à cet exercice ancêtre du pornogore. Les cinéphiles se souviennent surement de 99 Women, Barbed Wire Dolls, Sadomania, Caged Heat, SS Experiment Camp, Ilsa, Femmes en cage, etc.
Destiné à un public adulte, ces films bis pouvaient aller très loin dans le trash et le bondage, voire dans la pornographie. Du moins, si l’on se base sur les critères de jugement de l’époque. Il est certain que, comparés à Saw, la série Oz ou Porn of the Dead, ces métrages apparaissent aujourd’hui comme bien inoffensifs. Certains n’en conservent pas moins cette atmosphère de souillure très efficace, à laquelle on peut désormais rajouter un évident charme kitch.
Au préalable, on peut alors penser qu'en réalisant Les geôles du Diable, Charles Band désirait rendre hommage à un genre pratiquement disparu (ou plutôt métamorphosé). En poursuivant dans ce raisonnement, l’on est même en lieu de s’attendre à un film violent et riche en démonstrations saphiques. De plus, comme l’on sait que Charles Band hésite rarement à glisser des séquences bizarres bourrées de symboles sexuels, de l’humour tordu et du fantastique dans ces films, on pourrait même se préparer à visionner un spectacle fauché et débile, certes, mais sacrément jouissif. Au final la déception n’en est donc que plus grande, car Les geôles du Diable n’effraieraient même pas une Girl Scout de la GSUSA.
Le scénario (écrit par Charles Band) récupère la légende – originaire d’Amérique Centrale - des poupées anti-soucis. Placez ces petites statuettes sous votre oreiller et le lendemain matin, à votre réveil, tout votre stress et vos contrariétés auront disparu. Mais pour Eva, cela ne va pas se passer tout à fait comme cela. Les petites poupées – qui lui ont été offertes par sa fille – vont se glisser dans sa tête en passant par son oreille et changer son tempérament. D’une jeune fille un peu timide, elle va se transformer en une furie à l'esprit cynique, dotée d’une force prodigieuse et d’une incroyable résistance à la douleur. Le script ne précise même pas par quel moyen la petit fille à pu se procurer des artefacts vaudous aussi fonctionnels.
Eva va donc se transformer, psychologiquement, mais aussi physiquement. Elle va commencer à présenter un teint maladif et un disgracieux bouton turgescent va apparaître sur son front. Un bouton qui va grossir, grossir, jusqu'à en exploser. Puis, alors que l’on s’apprête à en voir jaillir, comme dans Aux portes de l'au-delà, une serpentine glande pinéale aux connotations phalliques, voilà que l’on voit percer une ridicule petite tête de squelette aux yeux enflammés et aux maxillaires mécaniques. Adoptant alors un comportement agressif et vulgaire, Eva va alors utiliser ses pouvoirs pour filer la raclée à ses tortionnaires, tout en protégeant une fille introvertie qu'elle a pris en affection.
La réalisation, sans être exceptionnelle, reste correcte. Charles Band est un vieux briscard et il est évident qu'il sait placer sa caméra de manière convenable. Il est de plus bien aidé par un score assez intense de Richard Band. Le problème est qu'à coté de cela l'on doit subir les effets soporifiques d'un rythme victime d'un montage mollasson et d'un script anorexique pratiquement sans surprise (le seul passage vraiment très amusant est celui où l'on découvre la véritable "nature" du gardien pervers). Et si ce n'était que ça! En effet, on est surtout déçu par la relative pudeur affichée par un métrage aux effets gores inexistants et faisant preuve d'une retenue excessive dans les scènes de viol et de tortures - qui s'achèvent systématiquement par de simples cris hors cadre. Quand aux plans de nudité intégrale, on en voit en tout et pour tout qu'un seul - une fugace sortie de douche. Frustrant.
Au niveau de l'interprétation, force est d'admettre que la comédienne Jessica Morris (plutôt mignonne d'ailleurs) s'en sort assez bien. Elle ne parvient jamais a rendre son personnage terrifiant mais il faut dire qu'elle n'est pas aidé par des ridicules lignes de dialogue. Malheureusement, elle est bien la seule à assurer correctement sa tâche. Tous les autres "acteurs" affichent une en effet une calamiteuse qualité de jeu. Certains, comme Deb Snyder (dans le rôle de la directrice) surjouent tellement qu'ils en deviennent grotesques, d'autres débitent leurs répliques sans retranscrire aucune émotion. Il en ressort une sorte d'ambiance Z non assumée, mariant personnages figés aux comportements mécaniques et protagonistes sadiques en démonstrations free style.
La conclusion de Nicolas L. à propos du Film (Direct to Vidéo) : Les geoles du diable [2009]
Les geôles du diable de film est un film balançant entre le nanar désopilant et la bouse ennuyeuse. Quelques passages, hélas assez rares, sont en effet hilarants de par la nullité affichée par le scénario et les comédiens, d'autres finissent par devenir terriblement ennuyeux car manquant singulièrement de piment. En fait, en poussant un peu plus l'aspect gore, craspec ou fripon de son film, Charles Band aurait pu parvenir à nous offrir une amusante série Z. Hélas, pour lui comme pour nous, il s'est abstenu de le faire. Bref, si vous désirez vraiment découvrir le WIP, je vous conseillerai plutôt d'orienter votre choix vers les grands classiques du genre, comme Sadomania ou Caged Heat.
On a aimé
- Quelques passages amusants
- Le score de Richard Band
- Une réalisation correcte
On a moins bien aimé
- Un scénario inepte
- Un rythme soporifique
- Interprétation calamiteuse
- Un film bien trop sage
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