Critique Blood Sabbath [1972]
Avis critique rédigé par Nicolas L. le mercredi 26 octobre 2011 à 00h35
Sorcières et hippies
A la fin des années 60, et durant toute la première moitié des années 70, le cinéma indépendant contestataire, soumis à l’influence des mouvements hippies et anticonformistes, connut une vague de productions pornographiques célébrant tout autant la révolution sexuelle que les tendances arty, fortement marquées par les éléments psychédéliques, et politiques en cours. Prenant de vitesse une censure encore peu organisée, et surtout mal définie, les créatifs de cette décennie vécurent alors une période dorée, apte à toutes les expérimentations et les alliances contre-nature, qui compose aujourd’hui les fondements du cinéma subversif. Evidemment, la plupart du temps, les films porno et érotiques (les fameux nudies) mis en boîte durant cette époque, masquant leur médiocrité (voire leur nullité) et leurs aspects putassiers par de très pratiques arguments contestataires propres à la contre-culture, n’ont pour unique intérêt qu’être les premiers stigmates d’un enthousiasmant cinéma d’exploitation qui feront le bonheur des cinéphages des années 75-80. Il n’en reste pas moins que ce cette immense fatras culturel a encouragé la naissance d’un très rafraîchissant bouillon cinématographique, apte à amuser les cinéphiles par des compositions souvent bien colorées, comme lorsqu’il se penche à jouer de l’Eros et du Thanatos.
Bien sûr, quand l’on se penche sur le sujet, force est de constater que cette filmographie n’affiche pas une grande homogénéité, notamment dans le domaine qualitatif. Quelques films pornographiques peuvent sans mal apparaître aux yeux des cinéphiles les plus salaces comme des chefs d’oeuvres du cinéma (les autres les qualifieront plutôt de classiques). On peut citer par exemple les américains L'Enfer pour miss Jones (1973), The Devil Inside Her (1975) et Hardgore (1974), trois métrages aussi intéressants par l’exploitation de leurs thématiques que par leurs séquences hards, ou les géniales et hypnotiques divagations jazz-érotiques de Jesus Franco (Vampyros Lesbos et La Comtesse Noire pour ne citer que les plus remarquables). La liste est longue. Dans la plupart de ces films de qualité, les cinéastes usent avec intelligences des caractéristiques subversives de certains éléments fantastiques, comme le vampirisme et le satanisme. Le premier n’est finalement que l’héritier direct d’une métaphore sexuelle datant de l’époque victorienne (sang, sperme, même combat, pourrait-on dire). La deuxième, qui réunit tout ce que condamne les bonnes moeurs et la morale (et donc, par réaction, que chérissent cette génération de cinéastes), n’a même pas besoin d’être justifiée.
Blood Sabbath n’appartient pas cette catégorie de films cul(te)s. Réalisé par Brianne Murphy (une réalisatrice britannique qui a effectué une grande partie de sa carrière à la télévision américaine), il fait partie de ces oeuvres rapidement torchées qui étaient projetés lors des programmes multiples des salles de cinémas spécialisés. Le scénario, qui tient de la pure satansploitation, est minimaliste, quoique le qualificatif est discutable si le compare aux scripts des films X produits aujourd’hui. On y fait la connaissance de David, un musicien errant décontracté, vétéran de la guerre du Vietnam, qui n’a pour seul bagage que sa guitare sèche. Se baladant dans des bois mexicains (si, si, ça existe !), il va faire la rencontre et tomber sous le charme d’une magnifique naïade, Yvanah. Malheureusement pour lui, cette fille est dépourvue d’âme, et ne peut donc l’aimer. David va donc tenter de remédier à la situation en infiltrant un culte satanique qui sème la terreur dans la région. Le bel étalon va alors se retrouver prisonnier de ce coven de sorcières obsédées, et devoir assouvir tous les désirs de sa reine. Messieurs, vous me direz qu’il y a pire comme situation. Vous avez raison.
Car, tout compte fait, il ne lui arrive pas grand chose de très désagréable, à ce jeune homme. A un moment, on se dit même qu’il a bien fait de ne pas écouter les conseils du vieil ermite (sacré rabat-joie, finalement!) qui vit tout près de là. Pour seuls désagréments, il ne se voit qu’infliger que quelques coulées de cire chaude, jus blanchâtre généré par des bougies cérémoniales en combustion. Par contre, l’on peut être un peu déçu par le manque de fougue de ces sorcières délurées. En effet, Blood Sabbath est loin d’afficher le même niveau de sexe que la plupart des productions érotiques de l’époque. Avec ces plans de nus féminins, ces quelques caresses saphiques et autres attitudes gentiment provocantes, le film de Brianne Murphy appartient à la banale catégorie du porno soft. Même constat en ce qui concerne l’aspect horrifique. Ces cérémonies pratiquées par des prêtresses à poil ne présentent pas grand chose d’horrifique (sauf si vous êtes du genre «phanérophobe», les années 70 ne furent pas très joyeuses pour les vendeurs de rasoirs!) et le gore est complètement absent du métrage.
En fait, l’élément qui contribue à faire de Blood Sabbath un film pas ordinaire est la présence au casting d’une certaine Dyanne Thorne. Trois ans avant de devenir célèbre en incarnant le rôle titre d’Ilsa la louve des SS, la comédienne à la poitrine généreuse y incarne ici Alotta, la reine des sorcières, leader de cette communauté de sorcières peu frileuses. On peut aussi apprécier, c’est vrai, la gentille atmosphère gothique et fantasmagorique dégagée par le métrage, bien entretenue par une réalisation usant sans retenue d’effets de lumières (des rais de lumière traversant une brume artificielle, des éclairages de nuit jouant des ombres…). Avec la présence de toutes ces adeptes nues et des quelques scènes de sexe, Blood Sabbath pourrait évoquer au final une sorte de (modeste) relecture coquine d’un film de la Hammer (la bande originale au sonorités gothiques de Les Baxter, compositeur bien connu pour travaux avec Roger Corman, n’est également pas étrangère à cette impression).
La conclusion de Nicolas L. à propos du Film : Blood Sabbath [1972]
Petite production érotique bien représentative des tendances de l’époque, Blood Sabbath s’appuie sur la mise en forme d’une ambiance gothique plutôt réussie et dans la présence de la célèbre Dyanne Thorne. Au final, même si l’on peut trouver ce film de Bryanne Murphy un peu trop sage dans le domaine de l’érotisme et de l’horreur, force est d’admettre qu’il présente un incontestable charme vintage qui en fait une curiosité.
On a aimé
- Une ambiance fantastique assez réussie
- Dyanne Thorne
- Un bon representant de la satansploitation des ‘70s
On a moins bien aimé
- Un scénario minimaliste
- Une réalisation cheap
- Un peu trop sage
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