Semaine Acheron : interview de Nicolas Henry, concepteur du jeu
Jour 4 de notre focus consacré au jeu de rôle Acheron
Du 8 au 14 novembre, Scifi-Universe.com vous propose une semaine consacré au jeu de rôle Acheron, qui sera disponible à la vente à la fin du mois. Interview, visuels, informations diverses, on va décortiquer le jeu en détail pendant ces sept jours !
Quatrième jour de notre semaine thématique consacrée au jeu de rôle Acheron avec, aujourd'hui, une interview complète du concepteur du jeu, Nicolas Henry.
Vincent L. : Pour commencer, pouvez-vous vous présenter ?
Nicolas Henry : Je m'appelle Nicolas Henry, j'ai 28 ans, toutes mes dents et je suis l'auteur d'Achéron. Dans le civil j'ai exercé la profession de journaliste pendant un temps, et aujourd'hui je suis éducateur scolaire, ce qui prouve bien que dans le social, on engage n'importe qui... Je souffre du syndrome rôlistique aigu depuis que j'ai dix ans à peu près, ce qui fait....tout ça, à quelque mois d'intervalle... Niveau hobby, je suis un voyageur impénitent, ce qui m'a beaucoup aidé, indirectement pour la conception de mes jeux : d'une part, les voyages en train et bus pourris de Pékin à Saïgon, ça laisse du temps pour écrire des âneries, d'autre part, un paysage différent par jour, ça aère le cerveau...
Vincent L. : Pouvez-vous nous présenter Acheron ?
Nicolas Henry : J'ai toujours été assez mauvais à ce genre d'exercice, mais ça fait partie du jeu... Achéron, c'est avant tout un jeu d'ambiance se déroulant durant la seconde moitié du XIXème siècle, qui flirte dangereusement avec les enquêtes de Conan Doyle, le fantastique du XIXème de Poe et Maupassant et la noirceur victorienne de Dickens. Les joueurs vont y incarner des personnages entraînés malgré eux dans des séries d'évènements extraordinaires qu'ils devront d'élucider, en s'appuyant sur leurs Convictions respectives. Les Initiés, versés dans les arts occultes utiliseront sans doute leurs dons exceptionnels pour en savoir plus, les Sceptiques, à l'esprit cartésien bien trempé se baseront sur leurs connaissances scientifiques pour donner une explication rationnelle à leur résultat d'enquête, quant aux Indécis, à l'esprit plus ouvert, ils pourront bénéficier d'une des valeurs les plus précieuses de toute : leur propre libre arbitre. Le principe d'Achéron est en effet d'alterner les scénarios purement fantastiques avec des enquêtes policières plus traditionnelles pour laisser constamment planer le doute.
Le jeu part du principe qu'il existe une dimension parallèle, l'Acheron, dans laquelle sont retenues tous les fantasmes, les peurs et les angoisses les plus effrayants que l'Homme aient jamais imaginés: les âmes et les créatures prisonnières de ce monde peuvent être ramenés sur le plan terrestre grâce à l'énergie psychique des êtres humains. Plus les hommes croient en quelque chose, plus des brèches peuvent apparaître entre le monde réel et l'Achéron. C'est une des raisons pour laquelle le psychisme et la folie jouent un rôle crucial au cours du jeu, car ce sont littéralement les peurs les plus primaires des personnages qui risquent de prendre forme sous leurs yeux. Pour éviter de sombrer dans la folie, un système d'Addiction permettra de développer ses travers pour éviter d'avoir à faire face à sa propre démence. Les Convictions du personnage (La Foi, la Détermination et le Scepticisme) lui permettront également de maintenir son équilibre mental face aux horreurs qu'il va affronter.
Vincent L. : Quelque-part, l'époque de jeu, le concept des scénarios fantastiques/policier et les types de personnages Sceptiques/Initiés ramènent un peu au jeu de rôle Maléfices. Es-tu d'accord avec ce parallèle ? Quelles sont les points communs/différence entre les deux jeux ?
Nicolas Henry : Je dois avouer, à ma grande honte, que je n'ai jamais joué à Maléfice mais je m'étais intéressé au jeu il y a très longtemps, quand il existait encore sous sa version de 1985. C'est une remarque que j'ai eu de plusieurs amis rôlistes auxquels j'ai présenté succinctement le jeu et la comparaison est légitime : en poussant plus loin, on peut également se dire que Crimes et Hex jouent sur une thématique assez proche. Mais en grattant un peu, on se rend rapidement compte que les orientations du jeu sont différentes. D'une part, Maléfices et Crimes se situent à la Belle Epoque, soit plus au début du XXème qu'à la moitié du XIXèmee et en cinquante ans, il s'en passe des choses ! Les certitudes et les interrogations étaient loin d'être les mêmes : le millénarisme et les angoisses de la fin de siècle n'avaient pas encore fait place à l'optimisme de 1900, et la naturalisme et le scientisme n'avaient pas encore supplanté le romantisme et son attirance pour le surnaturel, puisqu'ils en étaient à leur balbutiements. De mon impression, cela se sent même dans le traitement de l'ambiance : elle semble plus légère dans Maléfices que dans Achéron, qui plonge vraiment dans le noir le plus profond, car c'est très clairement un jeu d' "horreur", avec tout ce que cela implique. Crimes s'intéresse davantage à la déchéance humaine et au coté naturaliste de la chose : le fantastique est une conséquence logique et presque naturelle dans Crimes, pas dans Achéron où il est généré par les doutes et les peurs de l'homme. Quant à Hex, à ce que j'ai pu en lire, c'est un jeu qui possède une dimension pulp, ce qui n'est pas du tout le cas du notre jeu : les personnages ne doivent pas s'attendre à recevoir le secours d'un héros de roman aussi efficace que le capitaine Nemo ou Van Helsing, ils seront seuls et souvent démunis face à leur destin... Maléfices s'attache également à un fantastique "traditionnel" de ce que j'ai cru comprendre car on y rencontre le diable, les farfadets et les créatures du folklore. Les créatures d'Achéron sont des projections des craintes et des sentiments refoulés des êtres humains, ce qui donne un autre visage à l'horreur, peut-être plus personnel et plus dérangeant. Là où Maléfices fait naître la magie, Achéron génère un miroir vers les peurs primitives : c'est finalement les hommes eux-mêmes qui vont donner un visage à leurs croyances.
Pour éviter de dire des sottises, je ne sais pas comment est gérée l'opposition Initié/Sceptique dans Maléfices, mais dans Achéron, la réalité elle même prendra la forme que les convictions les plus fortes leur donneront. Je prends souvent l'exemple de l'Initié qui voit une vierge pleurer du sang dans une église. Si les Sceptique l'analyse avec soin, ce sang lui apparaîtra comme si la statue était tout simplement constituée dans un matériau plein d'oxyde de fer, entraînant ces rougeurs et de fait, si sa volonté est suffisante, c’est ainsi que la réalité prendra forme. En revanche, j'ai pu lire que les deux jeux s'intéressent à l'exploration et aux autres horizons : l'Egypte, l'Afrique, l'Inde ou la Chine sont des destinations ou nous espérons emmener nos joueurs dès que possible. Le voyage vers l'inconnu est une source inépuisable d'inspirations d'aventure et un magnifique générateur de frissons.
Vincent L. : Y aura t-il une "méta-intrigue" (je n'ai pas trouvé de meilleur mot) qui sera en filigrane dans le background d'Acheron, avec un ou plusieurs grands méchants, ou avec une menace millénaire dans le style de L'appel de Cthulhu ?
Nicolas Henry : Achéron contient quelques "secrets" que les joueurs devraient ignorer le plus longtemps possible pour bénéficier au maximum de l'ambiance du jeu, mais le principal ennemi de l'humanité, c'est l'humain lui même , car c'est souvent lui qui provoquera les débordements de l'Achéron sur le monde réel. Même les sociétés secrètes et les ésotéristes les plus dangereux auxquels risquent d'être confrontés les personnages n'ont aucune idée des forces qu'ils manipulent et qui fatalement se retourneront contre eux. On n'y fera pas face à des Grands Anciens revenant à la force de leurs petites tentacules musclées vers notre monde, mais aux spectres d'un passé que l'on aurait jamais du avoir. D'une manière ou d'une autre, je pense qu'aucun joueur de L'appel de Cthulhu ne me contredira : un jeu d'ambiance marche beaucoup mieux avec la suggestion qu'avec ce qui est définit avec trop de précision. Des PJ qui partent chasser le poulpe au fusil à pompe ont clairement perdu la moitié du jeu en cours de route. L'Achéron d'un certain coté, c'est une fenêtre ouverte vers ce que l'humain a de pire, et qu'il devrait s'efforcer d'améliorer pour ne jamais avoir à le croiser.
Vincent L. : Pourquoi avoir créé un tel jeu ?
Nicolas Henry : Ce jeu a connu de nombreuses versions et a été commencé il y a bien dix-douze ans. A l'époque, j'avais adoré Dracula de Bram Stoker et je ne trouvais pas ce que je voulais dans les jeux du marché : L'appel de Cthulhu était trop Lovecraftien et trop moderne pour moi et Chill était trop bourrin. Au fur et à mesure des versions, mes joueurs ont de plus en plus accroché : on est progressivement passé du classique jeu de «chasseurs de monstre" au jeu d'enquête à laquelle nous avons petit à petit rajouté la notion d'horreur oppressante. Dans ce dernier profil, ce n'est plus les personnages qui sont les chasseurs de créature, mais bien la créature qui les menace à chaque instant, tandis qu'ils doivent désamorcer le piège qui se referme sur eux. Comme j'ai toujours été un grand amateur de littérature romantique du XIXème, j'y ai greffé, petit à petit, les thèmes de l'époque, notamment ceux issus du fantastique : la peur de la science, la nostalgie et les grandes interrogations sur le psychisme humain, qui vont entraîner, entre autre, les essors de l'occultisme et du spiritisme. Ce que j'ai essayé de faire, c'est, malgré la présence importante du surnaturel, un jeu essentiellement basé sur l'introspection du personnage, ses convictions et sa réaction face à ses propres tourments. Au bout de quelques parties, on réalisera bien vite que l'on est beaucoup plus démuni face à ses peurs que face au danger en lui-même. Les PJ seront, et quelle que soit leur divergences d'opinion, poussés à se venir en aide mutuellement pour espérer survivre. Un autre thème que j'espère développer plus en avant est l'exploration et la rencontre des folklores du monde entier : chaque peuples renferment des trésors d'épouvante au sein même de sa culture (religions, contes...), sans compter le coté mystérieux de l'exploration.
Vincent L. : Quelles inspirations ont influencées la création de l'univers du jeu ?
Nicolas Henry : Les citer serait vraiment trop long. Majoritairement, c'est la littérature fantastique du XIXème qui remporte la palme : Le Horla de Guy De Maupassant, les Contes Cruels d'Auguste Villiers de L'Isle-Adam, et même une bonne partie des poèmes de Charles Baudelaire. Chez les britanniques, ça va de Dracula de Bram Stoker, au Portrait de Dorian Gray d'Oscar Wilde et Frankenstein de Mary Shelley. Je ne compte pas tous les "roman à couverture bleus", la littérature gothique du XIXe qui contient de vraies perles, souvent malheureusement accessibles seulement aux anglophones alors que beaucoup de récit mériterait d'être traduits. Charles Dickens pour la vision sombre des villes industrielles de l'époque. Jules Verne et Robert Louis Stevenson pour le coté aventure et grandes expéditions que l'on travaillera dans les extensions futures.
Niveau cinéma, j'ai beaucoup lorgné sur les films de Tim Burton mais aussi sur les vieux classiques des studios Hammer (les vieux Dracula avec Christopher Lee) et les anciennes séries B avec Vincent Price. Sinon, je dirais que quelques jeux vidéo comme Silent Hill ou Forbidden Siren ont également joué un rôle important dans la conception finale du jeu.
Vincent L. : Acheron fonctionne avec quel type de système de jeu ?
Nicolas Henry : Le système de jeu est volontairement simplissime pour laisser la plus grande marge possible au Role-play. Il se joue avec un unique D12 et la majorité des actions se résolvent avec un (Attribut+compétence) contre un seuil de difficulté. Je compte plus sur l'intelligence des joueurs et leur volonté de faire vivre une belle histoire plutôt que sur un système mathématique qui table plus sur la stratégie de jeu que sur le récit : être un tireur d'élite ou manier la canne épée avec maestria ne vous sortira pas forcément la mise face aux émanations d'Achéron. Un score de Frayeur permet de jauger la santé mentale du personnage et un score de Fatigue son état d'épuisement : ces deux facteurs sont la pierre d'angle de l'ambiance générale, puisque leur détérioration aura un impact assez fort sur le jeu. Les PJ seront constamment sous pression et devront faire preuve de finesse et d'entraide, car si l'un de ces seuils atteint un niveau critique, les personnages seront sévèrement handicapés. Bien sûr, en cédant un peu plus à leur Addiction, ils peuvent peut-être augmenter leur temps de répit, mais quelles en seront les conséquences...mieux vaut ne pas y penser.
Vincent L. : L'aspect psychologique semble avoir une place importante dans Acheron. Aura t-il droit à un traitement conséquent niveau "technique" dans le livre de base ?
Nicolas Henry : Bien sûr. Même si je ne suis pas un fana des systèmes de jeu, le chiffrage et les règles aident souvent à matérialiser les notions complexes dans la tête des joueurs, sans pour autant faire appel à une usine à gaz : la fluidité est une des clés du jeu d’ambiance... D’une part, une grande partie traite des Convictions des personnages et de leur usage en jeu : la Foi des Initiés leur permettra d’accroître les capacités de leurs dons surnaturel, la Détermination des Indécis les aidera à vaincre leurs peurs et réaliser des prouesses héroïques, quant au Scepticisme, il agira comme un véritable bouclier psychique contre la folie et la déchéance.
La folie graduelle des PJ imprudents sera matérialisée par des points d’Aliénation qui faciliteront l’emprise des créatures de l’Achéron sur ses fantasmes et pour éviter de sombrer dans la démence pure et simple, un personnage en danger pourra décider d’avoir recours à ses Addictions. Les Addictions sont les petites manies que le personnage aura mises en place pour éviter de porter son attention sur ce qui risque d’endommager vraiment sa santé mentale : l’horreur irrationnelle. C’est un réflexe de défense parfaitement humain, que l’on appelle en psychologie, une attitude contraphobique (oui je sais c’est super pédant) : on préfère céder à des petites manies moins graves que faire face à ses angoisses plus sourdes. L’alcoolisme, le jeu, l’impulsivité sont des exemples d’Addictions qui permettront au personnage de garder les pieds sur terre si le besoin s’en fait sentir, mais qui auront d’autres conséquences néfastes sur lui plus tard et iront en s’aggravant. Bien évidemment, le mieux est de gérer correctement l’équilibre psychologique de son personnage en étant prudent, mais le système permet d’ajouter une petite touche supplémentaire aux PJ et de ne pas finir invariablement à la case « asile d’aliénés » : il est tout à fait possible de ne pas avoir à faire à ce genre de problème si les joueurs jouent prudemment : c’est un peu le dilemme tentateur que posera sans cesse le jeu, doit-on vraiment chercher les tenants et les aboutissants de toute l’enquête au risque de devenir fous ou n’est-il pas préférable de laisser un voile d’ombre sur une partie de l’affaire pour éviter de perdre la raison ? C’est un des facteurs qui permettront de ne pas « banaliser » le fantastique, car tant que le doute reste, tout est permis… Ces notions se géreront assez simplement par un système de score qui pourra donner une idée assez précise au MJ et à ses joueurs de l’état de santé mentale du personnage, ainsi que des conséquences que cela pourrait entraîner en jeu.
Vincent L. : Tout le côté surnaturel sera a t-il a portée de main des personnages (dans le style des sorts de L'appel de Cthulhu) ?
Nicolas Henry : Oui et non. Les personnages dotés de Dons surnaturels ne connaissent pas toute l’étendue de leurs pouvoirs et devront se livrer à une série de test pour arriver à en maîtriser parfaitement une partie, quant aux sorciers, ils n’utilisent le pouvoir de l’Achéron qu’à travers le savoir erroné qu’ils en ont. En réalité, le background fait en sorte qu’il est impossible de se familiariser entièrement avec l’Achéron et que seules des études souvent incomplètes donnent leur version subjective de ce que représente cette dimension. De fait, à moins d’en être une émanation, il est impossible d’en manipuler correctement les forces, sans en subir une lourde contrepartie.
Les personnages Sceptiques auront également une lourde influence sur le succès ou l’échec des phénomènes surnaturels : les spirites du dimanche vous le diront, si un esprit incrédule participe à une séance de table tournante, ça ne marche évidemment pas….Ce qui est assez confortable comme position, non ?
Vincent L. : S'agira t-il d'une gamme suivie, ou le livre de base est-il la seule publication prévue ?
Nicolas Henry : J'aurais tendance à dire "Inch'Allah". De base, nous étions partis sur le principe de multiplier les aides de jeu et de donner le maximum de matière aux joueurs...s'il y en a. Même si les retours de conventions sont très encourageant, on ne sait jamais trop si le jeu va décoller ou pas avant de l'avoir lancé. Du reste, dès les derniers réglages du livre de base finis, je me jette sur une extension traitant du Shanghai de l'époque. Au programme opium, sociétés secrètes et politique trouble, sans oublier un petit détour par les mythes étranges de la Chine. Pour le reste tout est à prévoir : d'Egypte en Inde en passant par les Amériques, les idées n'attendent que le feu vert... Niveau background général, un petit topo sur la sorcellerie devrait également voir le jour tantôt et un guide du joueur pourrait se révéler utile. On verra en fonction des retours des joueurs, après tout, c’est aussi leur jeu.
Vincent L. : Quel est votre dernier coup de cœur jeu de rôle (Acheron étant bien sur exclu) ?
Nicolas Henry : Je ne sais pas trop ce qui est nouveau ou pas, parce qu'il y a des jeux que j'ai découvert récemment et qui existent depuis des lustres, donc il ne faut pas s'étonner si je cite des bouquins qui ont plus de deux ans d'existence...Je dirais que récemment je suis tombé sur Pavillon Noir qui m'a bien accroché et par l'intermédiaire de la Convention Histoire de Jouer de Caen, je suis tombé sur une pure perle : Edge of Midnight qui m'a bien bluffé. J'adore le coté film noir à l'américaine, le système original et le fait que le surnaturel n'empiète pas trop sur le coté "hard boiled" car il reste assez discret.
Vincent L. : Quel regard portez-vous sur le jeu de rôle en France actuellement, à la fois comme hobby, mais également comme activité commerciale ?
Nicolas Henry : La question qui fâche. Je ne vais pas crier avec les loups que le jeu de rôle est mort, parce que d'une part ce n'est pas vrai et que d'autre part nous avons à disposition assez de matière pour que cela redecolle au mieux. La vague des média mitraillant le jeu de rôle est loin derrière nous, les gens sont en demande d'imaginaire et la sub-culture geek s'est popularisée. A une certaine époque les films comme le Seigneur des Anneaux ou Bienvenue à Zombieland auraient tout simplement été passé au broyeur par le "on-dit" et cantonnés aux films pour "ado attardés". Les MMORPG, avec tout le tort qu'ils ont éventuellement pu faire au jeu de rôle papier ont contribué, quoi qu'on en dise à mettre à la portée de tous des univers fantastiques et plusieurs notions issues du jeu de rôle. A cela on peut rajouter que les "forum de RP", comme ils sont appelés maintenant, fleurissent et se portent assez bien : tout ça, ce sont des passerelles énormes pour sensibiliser un public plus large et en demande au jeu de rôle. Il faudrait qu'une fois pour toute, on sorte d'une part du carcan trop intimiste à mon goût du jeu de rôle, comme "Jeu des élites" ou "Jeu à geek", pour l'ouvrir au plus grand nombre. Personnellement, je l'utilise dans mon boulot et ça marche plutôt bien. Ce loisir a probablement contribué à l'amélioration constante de mes connaissances générales voire de ma réflexion personnelle sur plusieurs points, je pense qu'il y a aussi une carte à jouer là encore.
Pour l'instant commercialement en France, je pense qu'il faut arrêter toute velléités d'en vivre. C'est casse-gueule parce que cela s'appuie sur une communauté réduite et éclatée sur tout le territoire français : le nombre d'éditeurs est actuellement suffisant, si tout le monde se met à produire son propre bouquin, on divise les forces déjà en place. Ce qui est rassurant c'est que la production actuelle est le fait de passionnés et que cela se ressent dans leur travail, on sent que les gars le font par plaisir et pas par envie de se remplir les poches.
C'est là-dessus pour l'instant qu'il faut s'appuyer : la transmission de la passion à un public de plus en plus large. A mon avis, il faut d'abord donner le goût du jeu par des démonstrations simples, sur des jeux touchant des thèmes grands publics, que tout le monde connaît. Un jeu comme C.O.P.S. par exemple est parfait : tout le monde connaît les séries de flic américaines. Faire jouer votre voisin à L'appel de Cthulhu ou In Nomine Satanis / Magna Veritas 4ème édition, ça relève du tour de force. Ce n'est qu'à ce prix que l'on pourra espérer revoir des livres de jeu de rôle en librairie ou à la FNAC, et ne plus avoir la larme à l'œil en voyant les étagères des magasins spécialisés désespérément remplie de Iguane et Chateau version 5.8, sans rien d'autre à coté.
Je reproche à la communauté rôliste (mais je me trompe peut-être) de conserver jalousement ce petit trésor qu'est le jeu de rôle pour elle seule, sans vraiment chercher à la populariser. On assiste parfois à des discussions où le statut de "bête bizarre" convient au rôliste comme une sorte de pied de nez au grand public qui l'a anciennement fustigé. Comme toutes les communautés restreintes, on se conforte parfois un peu trop dans ce statut grégaire qui ne prête pas au développement et ça devrait changer pour prendre une forme plus "user-friendly". J'exagère sans doute puisque pas mal d'associations vont dans ce sens, je pense notamment à Opale, la Lune Rousse, Ephémère (je vais pas citer la mienne ça fait un peu autosatisfaction), qui se remuent pas mal de ce coté là. Je ne me fait donc pas d'inquiétude sur le futur : si la communauté roliste est prête et prend bien le virage, il y a vraiment tous les éléments réunis pour que ça reparte comme au début des années 80, avec bien évidemment une bonne campagne de com'.
Bon, maintenant excusez moi, mais il faut que j'envoie mon majordome briquer la Ferrari, j'ai un brunch avec mon éditeur...
Plus de renseignements :
Le site officiel de CDS Editions
Le blog officiel d'Acheron
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Publié le jeudi 11 novembre 2010 à 09h00
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