Critique The Wicker Man [1974]
Avis critique rédigé par Nicolas L. le vendredi 4 novembre 2005 à 09h27
Une petite île des Highlands sans histoire
Dans un endroit reculé de la côte écossaise, un officier de police, le sergent Howie, se rend avec son petit hydravion sur la petite île de Summerisle, suite à un appel concernant la disparition d’une fillette.
Bien que poliment accueilli, l’officier se met à douter de l’honnêteté de la petite communauté habitant le petit port de pêche. Sa foi catholique est également choquée de découvrir que les villageois pratiquent des rituels étranges et païens, et que la plupart des jeunes filles semblent assez délurées.
Son enquête le conduit alors auprès de Lord Summerisle, un hobereau aisé qui vit dans sa propriété au centre de l’île.
Bienvenue dans le monde étrange du wicker man, un univers presque hors du temps et des lieux, à l’atmosphère si étrange, à la fois féerique et dangereuse. Lorsque le sergent Howie, interprété par Edward Woodward, amerrit près du petit port, il ne sait pas qu’il vient de pénétrer dans un monde cauchemardesque et qu’il vient de sceller son destin.
Dans un premier temps, grâce à l’habileté des créateurs Shaffer et Hardy, on a l’impression d’assister à une banale affaire policière au sein d’une communauté isolée et renfermée sur ses secrets honteux. On pense à une affaire de violence familiale, puis de mœurs. Des déductions incitées par de volontaires contradictions de témoignages, des attitudes réservées et quelques indices incongrus par ci, par là ; quelques masques animistes qui nous font sourire, un Mât de Mai, quelques coutumes étranges. Rien de bien révélateur, en fait. Et comme le personnage principale, on se laisse endormir par cette mise en scène pépère, dans un décor paisible et reposant, l’impression de documentaire régional – Hardy a d’ailleurs une formation de documentaliste - appuyant l’apparente banalité de l’histoire.
On est surtout intrigué par les rapports entre le policeman, fervent catholique, et la communauté villageoise, notamment les liens qu’il lie avec la fille de l’aubergiste, Willow (Britt Ekland). On sourit de l’intolérance de Howie, qui rend le personnage à la fois pathétique et un peu antipathique, et par réaction, on arrive à trouver ces gens excentriques assez amusants. On en vient à s’interroger un moment principalement sur la valeur de la force morale de Howie face à la tentation. Notamment, lors d’une séquence torride d’envoûtement où Willow, située dans une chambre adjacente à la sienne, complètement nue, simule en frappant contre le mur un énergique et bestial accouplement. Finalement, on en vient à oublier l’essentiel ; l’enquête proprement dite, et le pourquoi de cette disparition. De la même manière qu’Howie, le spectateur est magnifiquement mené en bateau.
Car le sergent est en fait le centre de gravité de cette histoire, l’enjeu, et la récompense ; le wicker man. Lorsqu’il se rend, déconcerté par les évènements et les mystères qui entoure cette tombe d’enfant découverte vide, auprès de lord Summerisle, il découvre en même temps que nous l’importance des mœurs païens – une sorte de mélange de la religion Wicca, en plein essor à l’époque en Angleterre, et du culte de Apollon Gaulois - dans la vie de ces insulaires. Révolté par tant de démonstrations impudiques, il en vient à en soupçonner tout le monde, sans qu’il lui vienne à l’esprit une seule seconde que tout cela ne pourrait être qu’un stratagème pour l’attirer dans l’île et l’y retenir. D’ailleurs, pourquoi aurait-il eu une idée aussi folle ?
En pleine journée de festivité païenne, lorsqu’il découvre finalement la petite fille, saine et sauve, il continue de se voiler la face et il refused’admettre qu’il a été grugé. Le spectateur, fortement amusé par ce spectacle à l’apparence si puérile, occulte de lui-même les détails qui pourraient lui indiquer une piste, et tombe lui aussi dans le panneau. Le final, violent et inattendu, surprend d’autant plus que rien ne pouvait laisser envisager une pareille issue.
Ce film doté d’un scénario en béton armé est appuyé par une interprétation hors pair. Christopher Lee, en protecteur, châtelain et finalement grand prêtre, est méconnaissable et très impressionnant, il nous livre à l’occasion une de ses meilleures interprétations. A coté de lui, on peut voir trois habituées des films de la Hammer – autant dire qu’elles ont du chien – que sont Ingrid Pitt, Britt Ekland et Diane Cilento, aussi ravissantes que venimeuses. Quand au personnage principal, il est incarné par un inattendu Edward Woodward - qu’une génération de téléphiles a pu voir des années durant dans le TV Show Equalizer - d’une manière géniale, avec un mélange de prétention, de prévoyance polie et d’entêtement.
La conclusion de Nicolas L. à propos du Film : The Wicker Man [1974]
N’y allons pas par quatre chemins et disons le : The Wicker Man est un véritable chef d’œuvre. Un film caméléon mêlant de manière originale et parfois indiscernable le drame, le thriller, la comédie, le suspense, le documentaire, la critique théologique et l’horreur. Très loin des canevas habituels consacrés aux films d’horreurs, le film de Hardy, grâce à une photographie exemplaire et un scénario démoniaque, est dérangeant sur toute sa durée puis vraiment horrible à la fin. Une horreur rendue encore plus affreuse par sa banalisation, illustrée par cette bande de fous dangereux regardant sans l’ombre d’un remord leur victime agoniser en hurlant.
On a aimé
- Ambiance dérangeante et étrange
- Photographie originale
- Interprétation nuancée et parfaite
- Scénario génial
- Fin surprenante
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