Critique Les Chroniques des Crépusculaires [1998]
Avis critique rédigé par Nicolas L. le mardi 14 février 2006 à 17h57
Agone ou la douloureuse ascension d’un Dieu
Agone est le fils aîné du baron de Rochronde, le plus puissant et le plus craint des nobles du pays Urguemand. Elevé dans la dureté de son rang, la culture de la haine et de la violence, le sensible Agone ne le supporte pas et se détourne de sa destinée. Il embrasse la cause des missionnaires pacifistes de Préceptorale et refuse, à la mort de son père, de reprendre sa fonction. Comme s’il avait vraiment le choix… Il n’a pas encore compris que son destin est tout autre… Et que l’apprentissage de la vérité sera douloureux et parsemé d’embûches… Un chemin de croix rempli de chagrin et de détresse mais qui le hissera très haut, jusqu’à la déification.
Les Chroniques Crépusculaires, roman de fantasy atypique écrit par un auteur français, laisse, longtemps après avoir reposé l’ouvrage, des traces dans l’esprit du lecteur. Car ce roman sombre et nihiliste ne peut laisser indifférent. Tout d’abord, ce qui surprend le plus est l’originalité de son système d’arcanes. En effet, l’univers d’Agone subit un système de magie obéissant aux lois des Muses, des déités sacrifiées pour la construction du monde, et des Danseurs, des petites créatures énergétiques issues de la destruction du dieu de la lumière. Aussi, comme on peut alors le constater, cet univers ne doit son existence, dés sa genèse, que par le sacrifice de puissantes entités…. Et cela continue, car la production d’effets miraculeux dépend souvent de la douleur d’autrui.
Puis, l’auteur nous dévoile ensuite, au fil des pages, une exceptionnelle mythologie variée et d’une grande richesse poétique, tout en se gardant de trop nous en dire. Le lecteur avide d’en savoir plus pourra de toute manière se rabattre sur les suites, Abyme et les Chroniques de Féal, ou même sur l’extraordinaire jeu de rôle (Agone) qui est la consécration de la richesse créative de Gaborit.
Peuplés de créatures mythologiques à la physionomie connue, comme les minotaures, les lutins, les nains et les farfadets, mais avec des psychologies et des coutumes bien particulières, l’univers d’Agone est donc dominé par le fer et la magie. Une magie torturée et douloureuse, faite de tortures ou de caresses en fonction des dogmes, mais qui reste redoutablement dangereuse et élitiste. Un des enjeux de l’œuvre est notamment le questionnement sur la justification de cet élitisme. Des enjeux qui vont d’ailleurs entraîner une guerre qui mettra en ruine les valeurs établies, ce semblant d’harmonie maintenu artificiellement par un ordre secret, les Eminences Grises, un système fragile pourtant omnipotent depuis des siècles.
Le déclencheur de ses évènements dévastateurs est bien entendu Agone de Rochronde, qui suivra cette sombre destinée, tout d’abord avec l’esprit révolté puis avec docilité, avant de comprendre finalement quel était le but ultime de son existence. Accompagné d’Amertine la fée noire, une créature jouant le rôle de mère et de confidente, de sa rapière dotée d’une conscience et de son Danseur, Agone va devenir à la fois assassin, sorcier, chef politique, aventurier, leader messianique puis dieu. Ce personnage torturé, qui ne peut, et qui n’a pas le droit, de connaître le bonheur, m’a fortement rappelé un certain Elric de Melnibonée, ce prince déchu, qui parcoure les continents avec son épée démone Stormbringer. Une analogie qui va jusqu’à la ressemblance physique, Agone ayant morphologiquement changé suite à son contact avec le Souffre-Jour, un arbre de vie divin cultivant la manipulation et la conspiration.
Si la lecture d’Agone est facilitée par une écriture très soignée et élégante qui magnifie le classicisme, il faut cependant signaler que le roman est assez complexe dans sa structure, assez hermétique dans sa deuxième lecture, et très noir. A la limite du dépressif, bien que la violence ne soit pas trop démonstrative, c’est plutôt dans les ambiances que l’obscurité est omniprésente. Ce n’est donc pas un ouvrage qui l’emportera à l’unanimité, le lecteur de fantasy inconditionnel de dragons, de preuxs chevaliers et de belles dames, passera son chemin, ne trouvant probablement aucun intérêt à cet ouvrage empli d’esprit gothique
La conclusion de Nicolas L. à propos du Roman : Les Chroniques des Crépusculaires [1998]
Magnifique ouvrage, à mi-chemin entre la dark fantasy et le baroque, Les Chroniques des Crépusculaires est un œuvre majeure de la littérature de fantasy française, dotée d’une beauté sombre et d’un lyrisme envoûtant. Le premier tome d’une trilogie originale, intelligente, adulte et cohérente. Un ouvrage indispensable
On a aimé
- Monde original et étonnamment riche
- Ecriture très élégante
- Trame passionnante
- Personnages fascinants
On a moins bien aimé
- Très sombre
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