Critique Mowgli [2018]
Avis critique rédigé par Vincent L. le dimanche 9 décembre 2018 à 14h00
Bienvenue dans la jungle...
Les productions hollywoodiennes qui se concurrencent en exploitant le même thème, ça ne date pas d'hier. Deep Impact/Armageddon, 1001 Pattes/Fourmiz, Blanche Neige/Blanche Neige et le chasseur, les exemples sont nombreux et, chaque fois, amènent au même résultat : l'un est un succès commercial et l'autre se plante pour ne plus devenir, dans l'imaginaire collectif, qu'un ersatz plus ou moins inspiré de son glorieux adversaire. Mowgli est un nouvel exemple de cette concurrence impitoyable : la production de cette nouvelle adaptation du classique de Kipling fut lancée par la Warner en même temps que celle du Livre de la jungle made in Disney. Au final, le film de Jon Favreau fut un énorme carton commercial en 2016 (pas loin d'un milliard de dollars de recette), et Mowgli fut finalement vendu à Netflix en juillet 2018, le privant purement et simplement de la sortie cinéma qui lui était promise.
Tout cela est d'autant plus dommage qu'en dépit de leur histoire similaire, les deux projets avaient des ambitions bien différentes. Là où Le livre de la jungle était pensé comme une adaptation live du grand classique de Disney, Mowgli se voulait être plus proche du roman d'origine dans sa tonalité. Là où Le livre de la jungle s'appuyait sur des CGI "classiques" pour animer son bestiaire (avec un grand nombre de stars au casting vocal), Mowgli utilisait quant à lui la performance capture pour créer ses animaux (les acteurs faisant alors bien plus que prêter leur voix, à l'instar de ce qui s'est fait par le passé dans Le seigneur des anneaux ou La Planète des Singes). Bref, nous étions en présence de deux projets aussi similaires que radicalement différents dans leur approche, chacun pouvant apporter aux spectateurs une expérience bien particulière. L'histoire ne retiendra probablement que Le livre de la jungle, fort malheureusement...
En effet, bien que Warner ait vendu en catimini son projet au géant du streaming, Mowgli est loin, très loin, d'être un échec artistique. Il est d'ailleurs fort dommage que ce film n'ait pu bénéficier d'une sortie cinéma tant son esthétique est juste splendide. Passé une introduction techniquement un tout petit peu faible (tous les plans les moins bien finalisés s'y trouvent), Mowgli se pare d'une beauté de chaque instant : une photographie lumineuse et colorée, des décors somptueux, un bestiaire magnifique ainsi que des effets spéciaux absolument bluffants. La performance capture n'est ici pas un vague accessoire marketing : derrière chaque animal, on retrouve clairement les comédiens qui les incarnent. De Christian Bale (en Bagheera) à Benedict Cumberbatch (en Shere Khan), cette technique apporte au film bien plus qu'un simple casting vocal : tous les protagonistes ont du caractère, et tous sont émouvants.
Cela est d'autant plus vrai que la mise en scène d'Andy Serkis s'appuie sans cesse sur la composante dramatique du récit. Serkis est expert dans la performance capture (pour ceux qui l'ignoraient, il fut Gollum, King Kong ou César), il parvient donc sans surprise à en tirer le meilleur. Mowgli n'est finalement jamais aussi bon que lorsqu'il met en avant les émotions ressenties par ses divers protagonistes (la dispute entre Ballo et Bagheera est ainsi l'un moments les plus forts du long-métrage par exemple). Le film n'est pas que "techniquement joli", il est souvent touchant, parfois émouvant, de temps et temps franchement triste. Et c'est presque ce que l'on pourrait reprocher au film : à trop se focaliser sur la dramaturgie de son histoire, Andy Serkis ne nous offre pas le minimum de scènes épiques que l'on peut attendre d'une telle production (le climax final aurait notamment pu avoir un peu plus de panache).
Mais ne chipotons pas trop quand même. On a tendance à beaucoup reprocher aux blockbusters actuels leur défaut d'âme, pour une fois qu'une grosse production mise plus sur les émotions que sur le grand spectacle, on ne va jouer les pisses-froid. Et ce d'autant plus que niveau ambiance, le compte y est largement. Le film est finalement assez proche de la tonalité du roman de Kipling, et cela explique probablement pourquoi Warner n'y a pas suffisamment cru pour oser le sortir sur grand écran : Mowgli n'est pas un film pour enfant. Sans jamais être graphiquement violent, l'atmosphère est sombre, les enjeux sont relativement complexes, les personnages n'ont pas des trognes très sympathiques (la gueule défoncée de Baloo est très surprenante) et certaines séquences pourront impressionner les plus jeunes. Par bien des aspects, cela m'a rappelé les personnages de Rango, qui était tous plus effrayants qu'amusants pour les jeunes enfants.
Un petit mot pour terminer sur le travail de mise en scène d'Andy Serkis. On l'a dit, Serkis sait clairement tirer le meilleur de la performance capture, et son parti-pris a été de privilégier l'émotion sur le grand spectacle. Ce sont déjà deux belles qualités, n'est-ce pas ? Mais ce n'est pas tout. Contrairement à de nombreux acteurs qui se sont lancés dans la mise en scène, Andy Serkis fait ici preuve d'un talent indéniable pour composer ses plans et ses scènes. Tirant magnifiquement parti des effets spéciaux, il propose nombre de séquences absolument magnifiques : Shere Khan qui boit dans la marre, la rencontre entre Mowgli et l'éléphant ou l'arrivée de Kaa sont autant de passages qui restent en mémoire après la fin du film. Il sait donc créer de l'émotion, iconiser ses personnages, poser une ambiance et tirer le meilleur des aspects techniques, bref, tout ce que l'on peut attendre d'un "vrai" réalisateur. Respect.
La conclusion de Vincent L. à propos du Film : Mowgli [2018]
Abandonné par la Warner qui l'a malheureusement privé d'une sortie cinéma, Mowgli est pourtant une belle réussite. Magnifique, touchant, abouti, porté par un casting quatre étoiles, cette adaptation aurait dû avoir le droit à un grand écran et à une projection dans des conditions optimales. Ne boudons pas notre plaisir, grâce au rachat par Netflix, ce film ne moisit pas dans les tiroirs de distributeurs frileux. Ce n'est certes pas l'idéal, mais c'est déjà ça...
On a aimé
- Visuellement sublime,
- L'impressionnante motion capture,
- Une mise en scène solide,
- L'ambiance sombre et adulte,
- Un casting parfait.
On a moins bien aimé
- Il manque tout de même un climax digne de ce nom,
- Quelques plans mal finalisés,
- Quel gachis de voir ça sur une télévision...
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