Critique Les 81 Frères #1 [2015]

Avis critique rédigé par Nathalie Z. le mercredi 9 janvier 2019 à 09h00

Quand le roman noir rencontre la mythologie chinoise...

Vous connaissez peut-être Romain d’Huissier pour ses jeux de rôle. Nous avions parlé récemment de son jeu post-apo mythologique Mythic Pantheon. Il a également participé aux jeux La Brigade chimérique, Hexagon Universe mais surtout Qin qui nous plongeait dans la Chine antique, magique et mystérieuse des Royaumes Combattants. Renouant avec sa passion pour l’Empire du Milieu et ses légendes, Romain nous offre une trilogie de romans dans un Hong Kong contemporain où les mythes existent. Démons, fantômes et esprits sont bien réels dans l’Asie des Chroniques de l’Etrange.

Les éditions Critic propose cette trilogie dans des romans à la couverture rigide et à la reliure toilée, d’excellente facture, le tout illustré par le talentueux Xavier Collette.

Dans ce premier tome, nous faisons la rencontre de Johnny Kwan un détective de l’occulte/exorciste/taoïste/bad-ass. Une sorte de Detective Dee contemporain. Le quotidien de Johnny alterne entre enquête paranormale, combat face à des entités mystiques et diplomatie avec les triades : pas toujours aisé. C’est un fat si, dont la spécialité est exorciste, mais d’autres fat si exercent également à Hong Kong avec d’autres capacités : magiciens, moines combattants, devins, géomanciens, alchimistes… Le roman s’ouvre sur l’exorciste entrant dans une échoppe, une herboristerie traditionnelle comme on en trouve en Asie. Il fait presque nuit, nous sommes au début de l’été et pourtant Johnny ressent comme un froid. Il ressent le Yin, l’énergie qui est l’apanage des créatures surnaturelles et autre spectres. Une belle jeune femme le sert et il demande des nouvelles du propriétaire quand la situation dégénère. Alors que leurs doigts se frôlent à la remise du livre acheté, l’exorciste a la confirmation que ce visage d’ange n’est pas humain. Un combat s’engage entre Johnny et le sezing, un esprit-serpent, qui a repris son allure ophidienne. Le combat est rythmé, cela donne le ton, faut pas chercher Johnny Kwan. La scène d’introduction ne s’arrête pas là et quand l’exorciste pourra reprendre son souffle, le lecteur aura cerné qu’affronter des créatures telles que ce sezing n’est pas une sinécure. Blessé, il a l’habitude de se ressourcer dans un petit restaurant de quartier. Le combat n’est jamais un choix, tuer une créature est presque un aveu d’échec car le but réel est que fantômes et esprits puissent vivre en parallèle des humains sans nuisance. Les humains pour la plupart n’ont pas conscience de leurs présences et fondamentalement, la majorité des esprits ne sont pas foncièrement mauvais.  L’exorciste travaille seul avec son glock 17 aux munitions en saule et son épée Jyu Coeng,  Entrailles de poisson. Chaque Fat si a un objet magique dit sanhei en sa possession. Mais son réseau de contact est capital : Daniel Sung, un inspecteur-chef qui couvre les actions des fat si, d’autres collègues comme lui tel qu’Andy  Kwock le devin et Ann Lung, la nonne guerrière (vraiment bad-ass) et des indics comme en aurait un privé.

Ainsi, Daniel Sung le policier a recommandé notre exorciste à Anthony Chau un richissime collectionneur d’antiquités suite à un vol d’objets précieux. L’enquête de Johnny commence et va le mener vers un groupe dangereux, une mafia hmong : les 81 frères. En parallèle à la recherche des artefacts disparus, Johnny apprend que l’un de ses sifu, Eric Tse, mentor et ami, a été abattu de sang-froid. Or s’il s’agit d’un meurtre classique, Johnny n’a pas le droit d’intervenir. Pourtant, son instinct lui dit que tout est lié… Alors que l’enquête met l’exorciste et ses amis dans des situations de plus en plus mortelles, ils découvrent un complot visant à réveiller une entité démoniaque si puissante que Hong Kong entière serait menacée.

Ce premier tome ouvre une trilogie et, s’il peut se lire seul, il prendra toute sa saveur lors de la lecture du deuxième tome qui y ajoutera une profondeur supplémentaire. En effet, Romain d’Huissier a construit une intrigue complexe qui coure sur les trois volumes mais aussi des histoires propres à chaque tome. Dans ce premier volume, l’intrigue assez classique se complexifie au fur et à mesure pour se conclure sur un final explosif digne d’un film de John Woo.

La fantasy urbaine est un genre que j’affectionne : le côté polar noir mâtiné de fantastique fonctionne particulièrement bien.  

Mais l’originalité de cette saga est dans l’orientalisation du genre. Nous sommes dans une mégalopole exotique, Hong Kong, formée d’îles, surpeuplée, marquée par l’occupation anglaise et la culture chinoise. Cette ville a développé sa propre mythologie, ses rites et ses traditions. En donnant vie à toutes ses croyances et superstitions, l’auteur ajoute de la densité au cadre de son histoire. Hong Kong est envoûtante et mystérieuse, elle recèle de multiples secrets et moult dangers. Elle est un personnage de l’intrigue qui n’aurait pu se dérouler ailleurs. Parlons des autres personnages : Johnny bien sûr, attachant et courageux, n’est pas dénué de défauts. On découvre peu à peu son passé, ses relations amoureuses et le personnage s’étoffe. Pour les personnages secondaires, il faudra lire toute la trilogie pour les voir acquérir une profondeur équivalente. Ann Lung et Daniel Sung sont particulièrement intéressants. Parmi les « méchants », les triades jouent un vrai rôle dans le livre comme client de l’exorciste et force maléfique sur la ville. Ce mélange entre factions surnaturelles et factions humaines est bien fait car tous ne sont pas mauvais, en tous cas, pas tout le temps.

Mention spéciale pour le Taonet, le dark web des fat si, une idée très sympa et bien utile !

Avec un style fluide, ce roman est facile à lire et personnellement j’ai dévoré ce premier tome en deux soirs. L’auteur a pensé aux lecteurs qui ne connaitraient pas du tout la culture chinoise et ses mythes. Dès le début du roman, c’est avec une approche didactique que sont expliqués certains termes. Sans lourdeur, cela permet aux novices de suivre l’intrigue sans être perdu entre les termes techniques qu’ils soient liés aux spectres, au taoïsme ou au Kung fu. Les amateurs d’arts martiaux  ou de films du cinéma asiatique (Ricky Lau, Tsui Hark…) apprécieront les descriptions des combats. Elles sont vives comme ce premier roman qui est nerveux et entrainant.

A noter dans cette édition, en bonus, le premier chapitre d'American Fays, un roman de fantasy urbaine de Xavier Dollo et Anne Fakhouri.

La conclusion de à propos du Roman : Les 81 Frères #1 [2015]

Auteur Nathalie Z.
86

Les Chroniques de l'Etrange narre les pérégrinations d'un exorciste, détective du paranormal, Johnny Kwan dans les ruelles de Hong Kong. dans ce premier tome, les 81 frères, l'exorciste va affronter une mafia hmong mêlée à un complot visant à libérer une entité démoniaque chaotique sur la ville. Si vous aimez la fantasy urbaine ou le cinéma asiatique, foncez ! Ce roman se dévore : c'est prenant, dynamique et immersif. Même si vous ne connaissez rien à la mythologie chinoise, vous ne serez pas perdu car Romain d'Huissier sait guider son lectorat dans les méandres d'une cité mystérieuse à la recherche de créatures surnaturelles et de fantômes maudits. 

On a aimé

  • Un univers original, exotique et envoutant
  • De la fantasy urbaine contemporaine façon polar
  • Divertissant et prenant
  • Style fluide, dynamique et accessible

On a moins bien aimé

  • Intrigue du premier tome assez classique
  • Il faut lire la trilogie pour que l’histoire et les personnages gagnent en profondeur

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