Critique Devâstra Réincarnation [2012]
Avis critique rédigé par Heikel L. le lundi 15 octobre 2012 à 10h27
Un jeu qui aspire au Nirvana
Après une première mouture dont le résultat formel était plutôt mitigé, Devâstra se réincarne et fait peau neuve. A priori, on se demandait donc si ce jeu méritait d’être sorti de la tombe, et, quitte à en sortir, s'il avait réellement subit des améliorations. Plus largement, se posait la question du pourquoi une réincarnation, et une interrogation pesait sur cette nouvelle version (sans mauvais jeu de mot) : a-t-elle atteint le nirvana rôlistique dans sa conception ?
Avant de se pencher plus précisément sur le Devâstra Réincarnation, il est nécessaire de rappeler quelques éléments importants qui le constituent. Le jeu est écrit par Laurent Devernay et Romain d'Huissier (des auteurs prolifiques qui ont notamment travaillés sur des jeux comme Brain Soda,La Brigade Chimérique, Qin ou encore Capharnaüm) et se déroule dans un univers inspiré par l’hindouisme et l’Inde antique. Il propose ainsi une expérience ludique épique digne de shonen manga dans laquelle les joueurs incarnent des avatars qui sont les porteurs de devâstra, des armes chimériques contenant la semi-quintessence de divinités.
Devâstra a été ressorti des placards par l’excellent éditeur Pulp Fever (à qui nous devons des jeux comme Luchadores et Dés de sang). Dans sa nouvelle version, le livre fait une très bonne impression : le format est un poil plus grand que du A5, très épais (quelques 340 pages) avec une couverture souple divinement illustrée par Lohran. L’intérieur est très riche, tantôt en noir et blanc, tantôt avec de belles illustrations en couleur. Autant le dire tout de suite, un des atouts majeurs de cette nouvelle mouture est son style graphique.
L’hindouisme et l’Inde antique dans tout ça ?
Le jeu se déroule sur Prithivî, la terre du peuple ârya. Cette péninsule s'apparente à une sorte d’Inde fantasmée où la société est organisées en quatre castes : les Ksatriyas (des nobles millitaires), les Brahmanes (des prêtres dévots), les Vaisiyas (marchands et gens du peuple aux professions diverses) et enfin les Sudras (dit des intouchables car composée de criminels, de lâches et d'esclaves). L’histoire se passe après une guerre divine et mystique qui opposa les Asuras, créatures des ténèbres, et les Devas, entités divines de la lumière. Pour assurer la liberté aux hommes, les Devas se sacrifièrent pour protéger l’humanité. Celle ci vit aujourd’hui paisiblement dans trois grandes cités qui ont leurs spécificités : Akoda, la vielle puissance réignante, Panditya la pieuse et enfin l’opulante Pushkala.
La première partie du livre donne, en plus de cet historique, un bestiaire, une présentation des divinités révérées et quelques factions en place, de quoi planter un décor épique et totalement typé. On cerne ainsi très vite les subtilités de l’univers, ce qui est un atout majeur dans un jeu qui propose de fantasmer et d'émuler une civilisation antique, et dans lequel on peut très vite se retrouver confronté à une terminologie exotique et incompréhensible.
Et les Avatar ainsi que leur Devâstra dans tout ça ?
La création du personnage est une réelle spécificité du jeu, car ce dernier propose d’imaginer à la fois un personnage, un artefact et une divinité. C’est ainsi autour de cette création de l’avatar, du deva et de la
devâstra que l’on va aborder le jeu (ce n’est pas sans rappeler le jeu Bloodlust mais sans le côté sombre et malsain, car l’arme sert une cause noble, guidée par un dieu et confère au personnage des pouvoirs mystiques et lumineux).
Le personnage ne va pas déroger aux standards du jeu de rôle avec ses traits et compétences, ce qui va nous permettre d’aboutir à un jeune adolescent - ou adolescente - au-delà de la moyenne. Mais là où réside l’originalité de cette création est donc le choix de cette fameuse Devâstra (mot-valise né de devâ et d’astras qui contracte “dieu” et “armes”). Cette devâstra peut être une lame, un bouclier, un gantelet et peux guérir, faire voler ou encore cracher des flammes. Ce sera au personnage, avec l’appui du meneur, de la déterminer tout en s’aidant du livre qui aiguille la création et donne des outils de modération.
Le shonen manga indien, comment ça se passe ?
Le système de jeu se veut écrit pour favoriser le caractère épique des parties. Il est très fluide et les actions sont très vites résolues. Il s'agit d'un système dit de Roll Under : on se base sur un couple trait/compétence, on lance une somme de D6 égale à la compétence utilisée et tous résultats inférieurs au trait concerné sont des réussites. Plusieurs subtilités sont également présentes, là pour favoriser les exploits, comme l’utilisation de l’Atman et la Conviction qui permettent de réaliser des actes héroïques et de rajouter des succès aux actions entreprises.
La conclusion de Heikel L. à propos du Jeu de rôle : Devâstra Réincarnation [2012]
Devâstra se réincarne d’une très belle manière, et l'on peut aujourd'hui dire qu’il a atteint un niveau de production qui change vraiment la forme de l’ouvrage. On sent un travail de réorganisation et un style graphique qui, au final, nous permettent de largement savourer cette nouvelle mouture. L’effort fourni, même s’il ne change pas radicalement le fond, permet une meilleure lisibilité et en fin de compte, d’apprécier réellement le jeu et le travail des auteurs.
On a aimé
- L’univers graphique époustouflant
- Le jeu intelligemment présenté
- L'inspiration indienne pas complexe
- Le concept ludique d'avatar/devâstra
- Le système très épique et fluide
On a moins bien aimé
- Pas de révolution sur le fond
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